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Vendredi 01 Juin, 2018 +33
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CONTRIBUTION - Le partage des restes du cadavre-sénégal

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CONTRIBUTION - Le partage des restes du cadavre-sénégal

Le Sénégal ne se développera pas de sitôt. Et je vais dire pourquoi.

Ce pays restera celui du malheur en raison du fait que les intelligences sont en panne. Les rares initiatives sont politisées donc dynamitées et condamnées à l’impasse. Le peuple est littéralement pris pour un con collectif devant qui les pires revirements de situations sont encore possibles.
Mbaye Diouf, qui proposa de racheter ou de devenir actionnaire majoritaire de la SNCS dont il avait vidé les caisses, est désormais au devant de la scène politique libérale dans la capitale du rail. Les mêmes individus qui le poursuivaient se plaisent honteusement à profiter de son aura profondément infecte.

Il est vrai que le peuple sénégalais semble se plaire bassement dans ce statut d’abruti tout autant qu’il est l’objet d’une manipulation politique atroce. Aussi il se manipule lui-même car il se trompe en connaissance de cause. Il croit encore en une issue heureuse tout en luttant corps et âme pour demeurer dans la misère chronique. Je veux dire qu’après avoir contribué collectivement à la catastrophisation de l’existence socio-économique du Sénégal, tout un peuple aujourd’hui, en accord avec une élite politique éhontée, met son retard sur le dos de la fatalité.

Dieu, en vertu de Son orgueil infinie, ne peut accepter d’être montré du doigt sans réagir dans une affaire qui a tous les airs d’un travail humain défectueux. Sa réponse à cette fatalisation a été sans doute de verrouiller toutes les portes à ce peuple. De façon temporaire ou définitive ? N’eut été les valeureux et dignes leaders religieux dont il regorge, peut-être pourrait-on légitiment conclure à un maudissement du peuple sénégalais.

Nul n’ignore que les choses ont toujours empiré au pays de la Téranga. Pourtant tous semblent faire comme si c’était justement le contraire. Ce pays fait partie des 50 du genre les plus pauvres de la planète. Dire que changement qualitatif il y a eu c’est se positionner en carnivore de ce peuple-cadavre en décomposition très avancée. Le fait est que jamais une croissance quelconque ne s’est observée dans ce pays en dépit de chiffres mirobolants que les marchands de progrès n’ont de cesse d’établir.

Il est très facile de duper une population déjà abusée, violée, pillée, volée et désormais exsangue. On peut lui faire avaler les pires supercheries. Depuis plusieurs siècles ce fut les mêmes tortures psycho-socio-économiques. Les indépendances ayant transférés les instruments de torture à une classe politique surentraînée dans le domaine. Son ingéniosité a été telle que désormais l’élite ne se donne plus la peine de forcer le peuple à se gaver de mensonges et de promesses gratuites. Les populations s’alimentent elles-mêmes de ces monstruosités. Elles en ont l’habitude. Pire, elles en ont désormais la culture. C’est devenu une manière d’être caractéristique du sénégalais-type, un état d’esprit à part entière. Ce sénégalais préfère entendre le mensonge plutôt que la vérité. Sait-il encore ce à quoi renvoie cette valeur ? C’est une question pertinente dans une organisation sociale si gangrenée par la corruption et les raccourcis faciles.

Le Sénégalais semble se porter mieux quand il est sans cesse trompé ou quand il dupe son vis-à-vis. Il se méfie de celui qui prétend dire la vérité ou jouer franc jeu avec lui. Les hommes et femmes qui pratiquent la politique ne sont plus jugés sur leurs talents et compétences que tout le monde sait inexistants. Ils le sont sur leurs capacités intarissables à mobiliser le maximum d’abrutis derrière eux. Le vainqueur est toujours celui qui, en ayant fait fi de tout altruisme, aura été le plus prolixe dans ses discours et le moins présent sur le terrain des réalisations. Les Sénégalais ont peur du changement quelque pragmatisme qu’ils puissent exiger de leurs élites. Je dirais qu’ils en ont peur car ils ne savent pas en assumer dignement les conséquences. Le pauvre devenu riche se fomente une existence et une intouchabilité sociale que rien ne justifie. C’est à peine s’il se mêle ou adresse la parole à ses anciens compagnons de galère. En revanche le riche qui s’appauvrit se met à l’idée qu’il l’est en raison d’un maléfice porté par son entourage immédiat. Dès lors, nombreux sont ceux qui portent leur choix sur une existence modeste sans penser monter ni descendre dans l’échelle sociale.

Si la majorité adopte une attitude aussi immobiliste qu’on ne s’étonne pas de voir tout un peuple crouler sous les affres de la misère. Il ira sûrement en reculant et en s’enfonçant inexorablement dans un gouffre ardent. C’est là une hypocrisie qui cache mal le fatalisme qui semble être sénégalais en ce début de millénaire.

Pourtant, à y regarder de plus près, rien dans ce fatalisme n’indique un regain de religiosité dans la société sénégalaise. Il a été question d’autoriser la formation de partis politiques d’obédience religieuse ces dernières années sur l’échiquier. Les porteurs de ce message se sont ridiculisés avec des scores électoraux qui n’ont jamais été aussi bas. Ce fut le cas de Ousseynou Fall et Cheikh Abdoulaye Dièye en 1993 et aux échéances suivantes. Ce désaveu du discours religieux a été une surprise pour ses véhiculaires mais pas pour le peuple sénégalais. Celui-ci, malgré sa religiosité islamique brandie, reste hostile à une imprégnation du politique par des considérations confessionnelles. La charia comme source de juridiction n’est donc pas la bienvenue. On peut le déplorer ou non mais c’est comme ça. Un très sérieux sondage donne pour vainqueur le Non à cette question hypothétique à hauteur de 95%, soit le pourcentage approximatif de musulmans dans la société sénégalaise.

Le Sénégal ne s’islamise pas davantage contrairement aux idées reçues. Elle s’occidentalise en revanche. Ses fils ne se tuent pas pour aller à la Mecque mais pour fouler le sol espagnol par les Canaries, par Ceuta ou Melilia. Les pirogues et les barbelés qui ont eu raison de centaines d’entre eux n’ont rien entamés à leur motivation. Ce choix migratoire est particulièrement parlant. Le blanc est toujours supérieur dans la mentalité encore archaïque du sénégalais.

Les bikinis, les maillots de bains sur les plages, les maisons closes pour prostituées, la pédophilie et l’homosexualité dans une moindre mesure ont inondés sérieusement les milieux sociaux de ce pays. Rester sans copine est vécu par la majorité des garçons comme une humiliation contre laquelle il faut lutter au plus vite. Les filles ont horreur des accoutrements décents tout autant qu’elles se laissent aller à des baisers goulus échangés désormais sur les espaces publics. Ces amourettes restent nocturnes mais ne sont ignorées par aucun sénégalais ordinaire. On laisse faire. Modernité oblige ! Les parents sont muselés, les leaders d’opinion empêchés de parole.

J’ignore dès lors d’où pourrait provenir l’idée fataliste que c’est Dieu qui a décidé d’une misère éternelle pour le peuple sénégalais. C’est possible mais ce discours devrait être porté par une société davantage à cheval sur les recommandations religieuses; ce qui est de moins en moins le cas. En dehors de milieux sociaux très influents, les jeunes et mêmes les plus âgées se passent bien de la législation islamique pour s’octroyer une liberté à l’occidentale. Il est d’une hypocrisie sans conteste de continuer à voir au malheur qui accable le peuple une simple volonté divine. Ce raccourci déresponsabilise ceux et celles qui ont été, pendant plus d’un demi siècle, au cœur de la construction du Sénégal comme terre de souffrances. Il nie toute implication d’un peuple démissionnaire à une faute qui a tout l’air d’une action collective.

Je disais dans un livre sorti le 02 mai que le peuple était en otage. Il l’est toujours. Il l’est par les politiques au pouvoir comme par une opposition irresponsable et immature. Si c’est pour simplement permettre à son leader de cracher sa colère ou d’influencer uniquement le pouvoir, un parti politique n’a strictement aucune raison d’être. On n’est pas en présence d’une jungle politique au Sénégal mais de la politisation d’une jungle. En effet, la fine couche démocratique perçue faussement par la communauté internationale cache mal la meute de loups affamés qui se partage les restes puants du cadavre-sénégal. Il est abusif de compter sur l’opposition en l’état actuel pour venir à bout de la crise. Tel n’est pas leur combat. Soit elle s’en prend à l’âge du président soit cette opposition est dotée d’une soupape reliée au pouvoir pour permettre de façon loisible les allers et venues des transhumants.

Tout le monde est d’avis que d’Etat et le politique au sens fondamental, le Sénégal en est allergique.

En 2006 encore, ce pays est incapable de faire siennes des institutions publiques saines et dynamiques. L’intelligence de ce pauvre peuple est tout entière tournée vers les plaisirs immédiats et faciles telle la danse ou la chanson. Toute une jeunesse ne déploie son maigre savoir-faire que sur l’émotivité, les sensations fortes et les soirées dansantes. La Raison semble toujours hellène et c’est dommage. L’émotion est sénégalaise j’ai envie de dire ; ce qui enlève rien de la volonté d’une frange de la population de s’en sortir.

Rien n’enchante plus ce peuple. Ni le religieux, ni le politique. Rien de la fonction politique ne rassemble, rien ne fédère un peuple qui s’est écartelé trop tôt. Rien ne permet d’espérer sauf à maintenir ses yeux fermés et à nier l’évidence.

Omar Ba, auteur de Pauvre Sénégal
http://www.omar-ba.euro.st/




1 Commentaires

  1. Auteur

    Allons Y Molo

    En Octobre, 2010 (18:37 PM)
    --
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