BASSIN DE L’ANAMBE - Faute de gasoil pour irriguer les cultures de contre-saison : Le plan Reva en panne sèche

Aussi cocasse que cela puisse l’être, c’est faute de gasoil, produit qui servait surtout à ravitailler les pirogues qui emmenaient les candidats à l’émigration clandestine, que le plan Reva dans le bassin de l’Anambé se trouve dans une situation délicate. Un investissement qui risque de se révéler à perte.

Le rêve suscité par le programma Reva va-il tourner en cauchemar pour les producteurs du bassin de l’Anambé ? Les candidats malheureux à l’émigration clandestine et les candidats potentiels qui ont, dans le cadre de ce programme de l’Etat sénégalais conçu pour fixer les jeunes au pays, investi les terres aménagées dans ce bassin à cheval entre les départements de Kolda et de Vélingara n’ont que leurs yeux pour regarder impuissants l’assèchement de leur jeunes pousses.

Localité située à un peu plus de 100 kilomètres dans le département de Kolda, le site de l’Anambé a été choisi pour abriter le plan du gouvernement qui consiste à un Retour vers l’Agriculture (Reva).

Malheureusement et jusqu’à nos jours, les moyens tardent à entrer en vigueur pour mettre en valeur les 1 000 hectares prévus. La révélation est de Mohamed Cissé, secrétaire général du Conseil régional de concertation des ruraux, qui déclare que c’est le manque de carburant qui bloque les travaux.

De l’avis du président de la Fédération des producteurs du bassin de l’Anambé (Feproba), «faute de gasoil pour irriguer les parcelles, les activités culturales sont bloquées au niveau de l’Anambé depuis le 16 décembre dernier. Dans le secteur 5, déjà 480 hectares sont levés et sont menacés d’assèchement». Et Landing Diémé de préciser que l’Etat avait alloué 2000 hectares de ces rizières au programme Reva et a fourni les intrants nécessaires pour son exécution. Depuis le 15 septembre dernier, les semences de riz (sahel 108 et 202), les produits phytosanitaires, l’engrais et 17 000 litres de gasoil sont gracieusement mis à la disposition des candidats à la culture de contre-saison.

Malheureusement, ce carburant n’a fait qu’un tour d’irrigation, du 27 novembre au 16 décembre. Depuis, les terres se sont asséchées à tel point que toute activité agricole est impossible. La concertation entre les producteurs et les autorités de la Sodagri (la Société de développement agricole et industriel du bassin de l’Anambé), structure d’appui conseil, n’a pas accouché de solutions efficientes. Et les exploitants, parce que démunis, n’envisagent pas de se cotiser pour fournir le carburant nécessaire à satisfaire les besoins de pompage de toute la campagne. C’est donc dans une situation d’attentisme que se trouvent les protégés de Diémé. Pour combien de temps encore ?

A en croire Mohamed Cissé, «si dans dix jours, à compter de ce 11 janvier, rien n’est fait, c’est l’échec total du plan Reva dans la région qui devrait prendre forme à partir de ce site pilote». Pourtant, sur les trois sites retenus au niveau de la région que sont Anambé dans le département de Kolda, mais très proche de Vélingara, le Bloc Séfa dans le Sédhiou et la communauté rurale de Dioulacolon dans Kolda, seuls les périmètres de l’Anambé sont moins coûteux en terme d’investissement. Constat d’un technicien de l’agriculture qui estime que dans cette partie, il n’y a pas grand-chose à faire, d’autant plus que les périmètres du bassin sont déjà valorisés par l’ancien projet rizicole, le premier à exploiter ces terres.

Pour les producteurs et les populations, ce n’est pas le carburant qui peut empêcher au plan Reva de décoller dans cette zone. Comme si les raisons du blocage sont à chercher ailleurs, Mohamed Cissé parle de situation regrettable pour les producteurs et l’ensemble des populations. Ce dernier était face à la presse aux côtés de Baba Ngom, secrétaire général national du Conseil national des cadres ruraux (Cncr), qui faisait le point sur la campagne et la commercialisation de l’arachide après une tournée dans cette partie sud du pays. A en croire Baba Ngom, «la campagne agricole est très mauvaise à cause de l’insuffisance du matériel agricole, la mise en place tardive des intrants qui étaient introuvables dans certaines localités et la longue pause pluviométrique». Un tableau sombre dressé et qui semble fustiger les programmes du gouvernement.

Quant à la campagne de commercialisation, le secrétaire général national dit ignorer si elle se déroule dans la région. Car, soutient-il, «aucun signe ne nous montre qu’on est en campagne de commercialisation». Au contraire, c’est la déroute des producteurs qu’il faut faire voir, a-t-il ajouté. D’ailleurs, Vieux Coma un producteur de son état, déclare avoir récolté prés de trois tonnes d’arachide. Mais aujourd’hui faute d’acheteurs, le brave paysan a vendu plus de 250 kilos dans le marché hebdomadaire pour pouvoir faire face aux besoins de la famille.

Dans tous les cas, la campagne de commercialisation, lancée officiellement, tarde à prendre des contours nets à Kolda avec le refus de certains producteurs de faire confiance à certains Ops. De l’avis de Mohamed Cissé, la psychose des bons impayés affecte encore les paysans. Le secrétaire général du Crcr de Kolda dénonce la défaillance de 13 Ops qui ne s’acquittaient pas de leurs dettes contractées auprès des paysans. C’est pourquoi, reconduire un tel Ops dans un autre point de collecte est une volonté manifeste de mépriser et d’appauvrir à jamais les producteurs, selon M. Cissé.