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Economie

ECHEC - Une dégradation longue de sept ans : L’économiste Wade à l’école de Sakho et Loum

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ECHEC - Une dégradation longue de sept ans : L’économiste Wade à l’école de Sakho et Loum

Les recettes qu’il a annoncées hier, avaient déjà été testées au Sénégal, sans succès, il y a quelques années, dans un contexte de gestion beaucoup plus rigoureuse que celle que nous connaissons.

Les propos du Président de la République, auxquels on a voulu donner toute la solennité républicaine, en leur donnant pour cadre la salle des banquets de la Présidence, ont fini d’afficher ouvertement ce que tous les mal-pensants du pays avaient commencé à laisser percevoir bien avant l’élection présidentielle, à savoir que le pays est situation de quasi-faillite aigüe. Et l’ironie de l’Histoire est que, notre grand économiste, qui vient de sortir un volumineux ouvrage de mathématiques appliqués à l’économie, rend, par les mesures qu’il vient d’annoncer, hommage à un fameux tandem des finances sénégalaises, le duo Sakho-Loum qu’il ne se gênait pas de tourner en dérision dans les années 90. Cela est une manière de dire qu’il n’y a rien de novateur en matière de recette économique pour redresser un pays, dans ce qui a été déclaré hier. Abdou Diouf, dans un contexte de Politique d’ajustement structurel (Pas), avait appliqué les mêmes recettes de réduction de salaires (de 15% à l’époque !) et mis en place un plan d’urgence de réduction des dépenses (le fameux Plan Sakho-Loum). Dans une économie fortement tenue en laisse par les institutions de Bretton Woods, les deux sœurs Fmi et Bm, le président Diouf n’avait pas tellement le choix. Malgré ses réticences, il n’a pas non plus été en mesure de s’opposer à la dévaluation du Franc Cfa, qui est intervenue l’année suivante.

La pilule du Pas avait été tellement amère que ses effets ont fini par faire décoller Abdou Diouf du fauteuil sur lequel il a été soudé pendant 19 ans. Malencontreusement pour lui, cela est arrivé juste au moment où les sacrifices qu’il a imposés au peuple ont commencé à donner des fruits. Cela a permis à son successeur d’avouer ingénument que les caisses de l’Etat étaient bien plus remplies qu’il ne l’avait toujours cru.

DEPENSES TOUS AZIMUTS

Ayant à sa tête l’homme le plus diplôme du Cap de Bonne espérance au Detroit de Cherbourg, le Sénégal s’est engagé dans une politique de dépenses tous azimuts, comme pour rattraper le temps perdu à se soumettre aux ordres des institutions financières. En dehors des dépenses politiques, comme les augmentations de salaire dans l’administration territoriale, qui ont provoqué la cascade de contestations sociales qui a fini par brouiller la structure salariale que Senghor et Diouf ont tout fait pour préserver, on s’est engagé dans des investissements structurants, comme la construction de routes interurbaines. Des choses dont le Sénégal a un besoin criard, mais que ses finances ne lui permettent pas de réaliser sur fonds propres.

Signe de son entêtement à vouloir n’en faire qu’à sa tête, le Président de la République, alors que le pays est en train de passer les dernières étapes de l’Initiative pays pauvres très endettés (Ppte), se lance dans une politique de recrutement dans la Fonction publique. 15 000 agents et fonctionnaires sont recrutés en trois ans, par vagues de 5 000 par an. Me Wade a assez d’argent dans ses caisses pour ne pas se soucier des mises en garde de la Banque mondiale et du Fmi. Ces dernières, ne finançant pas cette opération, ne sont pas en mesure de s’y opposer ou de l’arrêter. Il en est de même des routes dans Dakar. Tous ceux qui demandent au Président de financer plutôt des pistes de production, pour désenclaver l’intérieur du pays, sont jugés mesquins. On leur reproche de faire croire que le Sénégal ne mérite pas d’avoir une capitale politique de classe internationale. Mais, quid de l’environnement des affaires de classe internationale ?

Car le problème est que l’Etat reste le premier, sinon l’unique, bailleur. Le secteur privé national est introuvable dans les grands travaux lancés à grand bruit à travers le pays. C’est l’Etat qui fait jouer son entregent auprès de Taïwan, pour mailler le pays avec un bon réseau de cases de tout-petits, de foyers de jeunes, de maisons de l’outil, ainsi que d’autres structures de béton aussi coûteuses que non utilisées. Les Japonais financeront les écoles ou les quais de pêche, les Français prendront leur part aussi, ainsi que d’autres. En attendant que les représentants de Beijing ne viennent se mettre dans la danse. Le président, suivi de ses Premiers ministres et de son ministre de l’Economie et des Finances, peut claironner qu’il a de l’argent à ne savoir qu’en faire. A Paris en 2003, le ministre Diop s’est permis de déclarer aux journalistes après la réunion du Conseil consultatif du Club de Paris, que «le Sénégal a obtenu plus d’argent qu’il n’en a besoin pour se développer». A l’époque, ce n’était que 889 milliards de francs Cfa, bien loin des plus de 2 100 milliards décrochés par Hadjibou Soumaré. Alors ? Que s’est-il donc passé ? Ce qu’il y a eu les vraies dépenses, celles dont tout le monde parle, les somptuaires, qui ont scandaleusement transformé le train de vie des nouveaux dirigeants du pays.

SALAIRE, QUEL SALAIRE ?

Le président Wade se distingue rapidement par sa boulimie à consommer des ministres. L’intellectuel le plus diplômé de ce côté de l’Atlantique, avait toujours promis, tout au long de son parcours dans l’opposition, qu’il ne formerait jamais un gouvernement de plus de 25 membres. Eh bien, il a tenu parole ! Jamais il n’a eu un gouvernement de 25 ministres ou moins. Et la durée de vie moyenne d’un gouvernement, est de 3 mois, comme dans le Zaïre de Mobutu. Or, la tradition républicaine, copiée de la France, veut que chaque ministre limogé conserve l’intégralité de son traitement, à côté de certains autres avantages, pendant 6 mois environ. Ce qui fait que, pour un seul poste ministériel, le Trésor en vient rapidement à payer deux, trois, voire quatre salaires, pendant de longues périodes. Et le cabinet présidentiel n’est pas moins fourni que le gouvernement, avec même des ministres d’Etat, qui tous bénéficient de traitements équivalents à ceux de leurs collègues du gouvernement. Il y a également les voyages du Président. C’est vrai qu’Abdou Diouf n’était pas un petit voyageur. Mais il a été battu, en moins de deux ans, par Abdoulaye Wade. Et l’actuel président a semblé confondre la gestion «en bon père de famille», avec la gestion de sa cassette personnelle. S’il dit donc qu’il va réduire son salaire, on ne peut prendre la mesure au sérieux. Déjà, Le Quotidien n°1445 de samedi 27 et dimanche 28 octobre, qui a donné l’information, a souligné combien il était improbable que Me Wade vive de son salaire officiel uniquement. Réduit même du dixième, il ne lui coûtera rien en sacrifice, si son train de vie ne suivait pas.

NOUVEAU PROGRAMME D’AJUSTEMENT STRUCTUREL

La reconnaissance officielle de ses carences de gestion, arrive au moment où le Sénégal va finaliser avec le Fonds monétaire la signature de l’Initiative de soutien à la politique économique (Ispe), le nouveau programme sans décaissement de l’institution de Bretton Woods. En réalité, on a là un Programme d’ajustement structurel sans financement. Les financiers de Washington caressent les susceptibilités tropicales en disant que c’est parce que le Sénégal a prouvé qu’il n’a pas besoin de finances supplémentaires, que l’on ne lui donne pas d’argent. Mais que l’Ispe est un moyen de gagner la confiance des investisseurs, ainsi que du marché financier international, pour les convaincre que le pays est bien géré, sous la supervision du Fonds monétaire international.

En réalité, les fonctionnaires du Fonds vont pouvoir réoccuper les sièges des ministères stratégiques, mettre leur nez dans tous les contrats que signeront les Sénégalais, décider du bien-fondé de chaque mesure ou décision financière. Ils auront le droit de peser sur beaucoup de décisions économiques et politiques. On les a vus à l’œuvre, quand ils ont fait sortir les «privés» choisis par le fils Wade dans le montage financier de l’aéroport de Diass. Ils ont même bloqué la «privatisation» de l’Apix, ils se sont opposés à la délocalisation de plusieurs entreprises dakaroises dans la zone attribuée à Jafza, vers le plateau de Diass. On peut préjuger que l’on les entendra encore bien plus souvent, une fois l’Ispe à l’œuvre. La question était pendant longtemps de savoir, alors qu’il venait juste de sortir d’un éprouvant processus d’annulation de la dette multilatérale, à travers l’Initiative Ppte, ce qui justifiait que le Sénégal veuille signer l’Ispe qui donne tant de pouvoirs aux bailleurs de fonds sur notre économie.

Depuis hier, on sait. En fait, Me Wade n’avait plus le choix.



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