Aujourd’hui, avoir un logement dans Dakar, en ville ou en banlieue, est un luxe et un véritable casse-tête. Les tarifs des locations et des ventes ont énormément augmenté ces dernières années. Une étude menée par la Direction de la prévision et des études économiques (DPEE) fait état de la présence d’une « bulle immobilière » depuis le début des années 2000 dans la capitale sénégalaise. En dix ans, les prix des logements ont enregistré une hausse de 233% et font de Dakar la 3ème ville la plus chère du Continent après Lagos et Douala. Ce phénomène est, pour les Dakarois, une source d’incompréhension totale.
En matière de logement, le Dakarois aujourd’hui, doit, plus que jamais, avoir les moyens de ses ambitions. Abdou Diallo, un courtier d’une cinquantaine d’années installé à Bourguiba depuis plus de 20 ans, témoigne de cette surenchère immobilière : « En 2003, je me souviens que la vente d’un T8 (2 chambres + Salon) dans le quartier de Sacré Cœur III tournait autour de 8 millions de FCFA. Aujourd’hui, la même transaction atteint facilement les 30 millions ».
Louer coûte aussi cher. D’après une autre enquête, cette fois-ci, conduite de 2007 à 2008 par l’Agence nationale de la Statistique et de la Démographie du Sénégal (l’Ands), on constate une hausse de 40% en moyenne pour la location d’une chambre et de 56% pour la location d’une maison de 2 à 3 pièces dans un quartier populaire.
La faute à personne ?
Du coté des Agences immobilières, le mot d’ordre est à la langue de bois : « C’est au propriétaire d’exprimer ses préférences par rapport au prix auquel il voudrait que nous louions son bien », se défend Mme Ndiaye, cadre dans une agence du quartier de Baobab. « Tout ce que nous pouvons faire, de notre coté, est de nous assurer que le logement soit remis en parfait état au locataire. Nous n’avons aucun moyen d’évaluer ou de plafonner le prix des loyers que nous proposons aux clients ».
En avril 2007, Me Yacouba Traoré, un expert judicaire prés les cours et tribunaux du Sénégal spécialisé dans les questions immobilières, a eu à répondre aux questions d’une revue spécialisée quant à la hausse des loyers. Selon lui, cette augmentation des prix dans Dakar et sa proche banlieue est en grande partie due à la flambée des prix du mètre carré dans la presqu’île : « Dakar est une ville confinée où l’espace libre est de plus en plus rare. C’est ce qui explique pourquoi le prix du mètre carré, soumis à la logique de l’offre et de la demande, augmente d’année en année », explique-t-il. « Le prix des loyers, quand il est calculé pour un bien immobilier, répond à plusieurs paramètres dont le décret n° 81-074 du 18 janvier 88 fixant l’évolution du prix du mètre carré selon la localisation du site. Le prix des loyers répond donc à un critère marchand en plus de ceux d’éthique et de déontologie auxquels mon corps professionnel est soumis. Le plateau est de loin le secteur le plus cher de la ville : à la place de l’indépendance, par exemple, le mètre carré peut s’acheter jusqu’à 1 million de FCFA ».
L’Etat laisse faire
Si cette hausse des prix dans l’immobilier est ressentie par tous, le ne semble pas préoccuper les autorités. L’existence de nombreux circuits parallèles, la quantité trop importante de garanties et de frais réclamés par les Agences conduit les prospecteurs à recourir aux services d’intermédiaires informels mois chers, comme les courtiers. La Commission d’enquête parlementaire initiée, fin juillet 2008, par le vice-président de l’Assemblée Nationale, Iba Der Thiam, qui visait à voir clair dans la jungle des loyers à Dakar, elle n’a, jusqu’à aujourd’hui, pas abouti.
Du coté des populations, rares sont celles qui trouvent une logique derrière ces fluctuations et chacun y va de sa théorie : « C’est l’alternance qui a fait s’envoler les prix », affirme Abdou Diallo. « Les logements ne sont pas à la portée de la bourse des ménages modestes et à certains endroits, près de 70% des habitants sont des étrangers, parce que les Sénégalais déménagent toujours plus loin dans la banlieue. On construit toujours plus d’immeubles et de maisons, mais les prix risquent de ne pas baisser de si tôt, parce qu’il n’y a pas de cohérence dans les travaux entrepris. Il y a même des quartiers, comme celui des maristes, où des rues entières sont à louer ».
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ENQUETE PARLEMENTAIRE SUR LA CHERETE DES LOYERS
Le projet relancé ce mois-ci par le professeur Iba Der Thiam
Le problème de la hausse du prix des loyers constatée ces dix dernières années a récemment obligé les autorités à se pencher sur la question de l’immobilier à Dakar.
Le 7 juillet 2007, une demande de constitution d’une commission d’enquête parlementaire a été déposée par le député Iba Der Thiam, afin de déterminer concrètement les causes du phénomène.
Le 28 juillet, soit trois semaines plus tard, une deuxième commission était réclamée, portant cette fois sur la spéculation foncière pratiquée dans la presqu’île. Quelques mois après, le 11 novembre, un projet de loi visant à réduire uniformément les loyers dans toute les capitales départementales ou régionales de 25% était remis à Macky Sall.
Suite à de nombreuses perturbations, notamment plusieurs remaniements au sein des structures responsables de la conduite ses enquêtes, ces commissions n’ont pas encore donné de résultats malgré un accord verbal sur l’essence de la loi qui aurait été émis par le chef de l’Etat, Me Wade.
Une lettre adressée le 12 janvier 2009 au Président de l’Assemblée, Mamadou Seck, a demandé l’inscription de ces commissions d’enquête ainsi que de la proposition de loi à l’ordre du jour de la prochaine délibération de l’assemblée nationale pour relancer le dossier.
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