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IRRÉGULARITÉS DANS LES INSTITUTIONS DE MICROFINANCE : Où sont les organes de surveillance ?

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IRRÉGULARITÉS DANS LES INSTITUTIONS DE MICROFINANCE : Où sont les organes de surveillance ?

Elles sont nombreuses, les Institutions de microfinance. Elles assurent un maillage géographique comblant le vide laissé par les banques et donnent leur chance aux exclus du système classique. Cependant, bon nombre d’entre elles exercent dans l’illégalité.

CMS, ACEP, UM-PAMECAS… Ces trois institutions occupent une place prépondérante dans la structuration du secteur sénégalais de la microfinance qui est aujourd’hui en pleine expansion, comme en témoigne la multiplication des Systèmes Financiers Décentralisés(Sfd). En fait, le marché est dominé par une dizaine de réseaux qui représentent environ 74% du sociétariat, 90% de l’épargne collectée et 86% du crédit distribué.

Selon les données de la Direction des Systèmes Financiers décentralisés de la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (DSFD/BCEAO), le secteur de la microfinance s’est développé dès la fin des années 1990 et compte en 2004, plus de 700 SFD répertoriés, comprenant des groupements d’épargne et de crédit, des mutuelles, des réseaux et des SFD sous convention. Cet essor s’expliquerait en grande partie par la mise en place d’un cadre réglementaire favorable, la loi PARMEC (La loi n° 95-03 du 05 janvier 1995 et le décret 97-1106 du 11 novembre 1997). En parallèle de ce système financier formel coexiste un secteur informel encore actif, formé par les tontines traditionnelles.

L’évolution du secteur montre qu’au cours de la période 1993 – 2003, le nombre d’institutions a été multiplié par 6 atteignant 620 au 31/12/2003 alors que le nombre de points de services (caisses de base, agences et bureaux…) est passé de 1136 à 2597 ; le nombre de clients/membres servis par ces institutions qui était de moins de 313 000 en 1993 a atteint 4 millions en déc. 2003 ; les dépôts collectés passent de 12,8 milliards FCFA en 1994 à 204,7 milliards FCFA à fin 2003 ; quant aux prêts octroyés par ces institutions, ils ont été multipliés par 10 au cours de la période considérée passant de 19,4 milliards à 200 milliards FCfa .

Selon des données plus récentes, le nombre de SFD recensés par la Cellule AT/CPEC (au ministère de l’Economie et des finances) est passé de 37 en 1995 à 844 au 31 décembre 2006.

En bref, les IMF toucheraient plus du quart des familles sénégalaises et contribue à la lutte contre la pauvreté par les emplois créés. La population sénégalaise a donc trouvé en la microfinance la réponse à ses besoins de financement, en ayant recours de manière de plus en plus marquée aux Systèmes Financiers Décentralisés (SFD). Ces SFD constituent aujourd’hui un instrument privilégié de lutte contre la pauvreté car ils permettent le financement de la petite et micro entreprise et offrent des produits et services financiers adaptés aux populations les plus défavorisées.

Toutefois, ce développement n’est pas sans faire grincer des dents et malgré l’appui sur des systèmes traditionnels et un grand dynamisme, Une structuration progressive du secteur et une qualité de services appréciable, beaucoup de failles sont décelées dans la plupart des Institutions de microfinance (Imf) par rapport au respect de la réglementation. La régulation et la supervision des IMF, du fait de l’accroissement de leur nombre, sont de plus en plus difficiles pour la BCEAO et les Gouvernements. Les journées d’information de la presse sur la microfinance que le Programme d’appui à la microfinance (Pamif) Volet1, a tenu les 14 et 15 mars 2009, ont permis de s’en rendre compte.

Des responsables de la Direction de la réglementation et supervision des Systèmes financiers décentralisés (Sfd), rencontrés à cette occasion, imputent cette situation à l’absence d’expertise avérée des organes de surveillance chargés du contrôle interne des Imf.

Le directeur par intérim de ladite direction qui est rattachée au ministère de l’Economie et des finances, M. Moussa Dieng, a d’abord fait remarquer que « tout le monde sait que le secteur s’est développé ces dernières années aussi bien en termes de volume, en termes de couverture géographique mais aussi en termes de services accordés aux populations notamment celles qui sont les plus défavorisées. Face à cela, la règlementation est très utile et a permis d’en arriver-là ».

Moussa Dieng précise que la réglementation régit l’ensemble des Sfd en activités et qu’avant d’exercer, il faut au préalable recevoir une autorisation ou agrément délivré par l’autorité de tutelle qui est le ministère de l’Economie et des finances.

Malgré ces gardes fous, M. Dieng a reconnu que : « on voit des initiatives qui sont en marge de la réglementation et c’est surtout lié à un manque d’information sur les conditions d’accès ou d’entrée dans le secteur de la microfinance ». Ce qui est sûr, a-t-il poursuivi, « c’est que la réglementation ne permet pas à n’importe qui d’ouvrir une IMF. Il y a des normes mises en place et dont l’objectif principal est de permettre aux institutions d’être gérées de manière correcte et professionnelle. Ce sont des normes qui permettent aussi de maîtriser en permanence les risques liés aux activités d’intermédiation financière ». Rappelant que la finalité, c’est la protection des déposants, il indique que « Nous avons la responsabilité de procéder à la protection des gens qui viennent déposer leur argent dans ces institutions ».

Sur la même lancée, M. Thierno Gningue, chargé de contrôle et inspecteur au niveau de la direction de la réglementation et de la supervision des Sfd, indique que : « il y a beaucoup de failles dans les Institutions de microfinance. Cela est généralement dû à un manque d’expertise parce qu’au sein de chaque Sfd, il y a un organe de surveillance qui doit assurer le contrôle interne ». Thierno Gningue a fait remarquer qu’ « Il se trouve maintenant que les membres de ce conseil de surveillance qui sont choisis par l’ensemble des sociétaires pour faire le travail de contrôle n’ont pas toujours l’expertise nécessaire ». Selon lui, « il faut une inspection sur place de la direction de la réglementation et de la supervision pour se rendre compte que, pour ce qui est du contrôle interne, il y a tellement de failles et c’est ça qui fait que les Imf ne sont pas souvent en conformité avec la réglementation ».

En plus de ce constat, l’absence de statistiques fiables sur le secteur vient s’ajouter à la note. Comme l’a fait savoir M. Gningue : « malheureusement, on n’a pas encore les moyens de quantifier le nombre de Sfd irrégulières. On sait qu’il y en à beaucoup mais aujourd’hui, on n’a ni les effectifs, ni les moyens matériels ou financiers de le faire ». Sur ce dernier point, Moussa Gningue a fait savoir que : « au niveau de la direction de la règlementation et de la supervision nous sommes une trentaine de cadres. Imaginez un tel effectif qui doit couvrir tout le territoire national. Ça c’est un problème réel. Mais à chaque fois qu’on nous signale qu’il y a une institution qui exerce dans l’irrégularité, on descend sur le terrain pour faire les somations nécessaires afin de les pousser à cesser d’exercer même si on les aide quelque fois à se formaliser ».

Le cadre réglementaire régissant l’activité des Institutions de la Micro-Finance (IMF) au Sénégal est structuré autour de la loi 95-03 portant réglementation des institutions mutualistes d’Epargne et de Crédit. Cette loi découle de l’intégration au corpus juridique national d’une Loi - Cadre du système de l’UMOA, la loi PARMEC ou « Projet d’Appui à la Réglementation des Mutuelles d’Épargne et de Crédit ».

Les principaux objectifs de cette loi sont : la protection des déposants, la sécurité des opérations, la recherche d’autonomie financière des SFD, l’intégration de la finance informelle dans le cadre légal.

Ce cadre légal a été complété par des dispositions réglementaires que sont : Le Décret d’application de la loi n° 97-1106 du 11 Novembre 1997, la Convention – Cadre pour les structures non mutualistes, les Instructions de la BCEAO relatives aux normes et règles de gestion des structures financières décentralisées.

Toutefois, ce cadre légal ne régit que les structures à forme mutualiste. Il laisse alors le choix aux intéressés entre : la forme mutualiste ou non avec le statut de signataire de convention-cadre ; l’adoption d’un cadre légal ou non avec la reconnaissance des groupements d’épargne et de crédit. Le cadre juridique s’adresse en premier lieu aux institutions mutualistes d’épargne et de crédit qui se trouvent placées sous tutelle du ministère des finances. L’obtention de l’agrément leur confère la personnalité morale en contrepartie duquel elles sont tenues de communiquer un ensemble d’information et de se soumettre au contrôle et aux règles prudentielles des autorités. Les institutions de type non mutualistes sont régies par une convention signée avec le ministère des Finances d’une durée de 5 ans, renouvelable

Nouvelle réglementation pour rectifier le tir et sanctionner

Afin de mettre de l’ordre dans le secteur de microfinance, les autorités de contrôle notamment la Bceao et le ministère de l’Economie et des finances ont renforcé la réglementation dans ce secteur qui, au fil des ans, est devenue névralgique et sensible compte tenu de l’argent manipulé. Pour parer à toute éventualité, comme l’a avancé M. Gningue, la nouvelle réglementation ne cherche qu’à renforcer le dispositif. « Les articles qui vont de 74 et suivants, prévoient tout un dispositif de sanction disciplinaire, pécuniaire et même pénale. Comme vous le savez, il y a plusieurs malversations dans les Institutions de microfinance (Imf) avec des gens qui disparaissent avec l’argent des déposants.

Sur ce point précis, il faut que la presse se fasse le relais d’une information importante. Il faut faire comprendre aux populations qui adhèrent aux mutuelles qu’elles gagnent à choisir une mutuelle agréée par le ministère de l’Economie et des finances car, si toutefois il y a un détournement dans une mutuelle qui n’est pas agréée, vous imaginez que les autorités de contrôle n’ont pas tous les moyens qu’il faut pour poursuivre les promoteurs ». D’ailleurs, a-t-il poursuivi, « la nouvelle loi exige que toutes les mutuelles de microfinance inscrivent sur leur enseigne le numéro de reconnaissance, le numéro d’agrément qui leur avait été délivré par le ministère de l’Economie et des finances ».

La nouvelle loi qui a été récemment rendue applicable renferme des innovations allant dans le sens de remettre ce secteur à niveau. Selon le directeur par intérim de la direction de la réglementation et de la supervision du secteur de la microfinance, « cette loi a été mise en place juste pour accompagner le développement fulgurant et le contexte actuel du secteur mais aussi d’aider à la professionnalisation des acteurs ». Sur cette lancée, M. Moussa Dieng a cité, entre autres innovations : l’élargissement du champ d’application non seulement aux mutuelles d’épargne et de crédit, mais aussi les autres formes d’organisation comme les associations, les sociétés anonymes, les sociétés à responsabilités limitées.

La nouvelle réglementation introduit aussi le système d’agrément unique. Selon M. Dieng, « Actuellement, on n’a plus besoin d’avoir un agrément pour les mutuelles d’épargne et de crédit, une reconnaissance pour les groupements d’épargne et de crédit et la convention cadre pour les structures signataires. Que vous soyez Ong, association ou Sa, vous disposerez d’un agrément qui vous confère trois activités à savoir : la collecte de dépôts, l’octroi de prêt et la signature par engagement ». Maintenant, a-t-il poursuivi, « si vous voulez faire d’autres activités supplémentaires, vous serez tenu de solliciter une autorisation sur cette activité spécifique. Par exemple, si vous voulez ajouter le crédit-bail à votre activité principale, vous êtes obligés d’aller à la banque centrale pour demander une autorisation ».



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