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Le projet de recasement des sinistrés cache des non dits : Des hectares prévus pour des privés existent dans le plan de l'Etat

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Le projet de recasement des sinistrés cache des non dits : Des hectares prévus pour des privés existent dans le plan de l'Etat
’Taisez-vous, nous volons vos terres’. Tel peut être le titre du film qui se déroule en ce moment dans la communauté rurale de Sangalcam, plus particulièrement dans le village de Tivaouane Peul. Après leur refus de céder leurs terres à l'Etat, sous prétexte qu'elles doivent abriter des sinistrés, les villageois viennent de découvrir une vaste escroquerie derrière le projet de Wade. En effet, des hectares doivent être cédés aux promoteurs qui se chargeront de les vendre aux particuliers.

A qui profitent le projet de recasement des sinistrés de la banlieue ? Cette question était sur toutes les lèvres, ce lundi, lors de la seconde rencontre entre les populations de Tivaouane Peul et les services déconcentrés de l'Etat. Dirigée par le sous-préfet de Sangalcam, la rencontre a permis aux populations de voir les bourdes des autorités et la manie avec laquelle se fait la spoliation des terres dans les communautés rurales. Non seulement le projet de recasement des sinistrés ne prend pas beaucoup d'espaces dans le plan montré par le cadastre de Rufisque, mais deux autres grands projets se cachent derrière ce que le sous-préfet appelle ‘le projet du président Wade’.

Il s'agit du projet de construction dénommé ‘Une famille, un toit’ appartenant à des promoteurs immobiliers non encore identifiés et d’un autre projet marqué en noir sur le plan et qui n'a pas encore de nom. Ces deux projets réunis font quatre fois celui de relogement des inondés. Les terres, qui doivent être récupérées pour ces projets, serviront aux promoteurs privés qui les vendront aux particuliers. ‘Nous ne pouvons pas comprendre comment l'Etat peut arracher des terres aux particuliers et les donner aux promoteurs. Si nous sommes venus habiter ici, c'est parce que nous sommes des sinistrés qui viennent de la banlieue. Nous habitons Yeumbeul, Pikine’, lance un habitant en colère.

Lorsque les populations de Tivaouane Peul, qui veulent en savoir plus, demandent aux autorités le nom des projets, ces dernières très réticentes se cachent derrière le recasement des sinistrés. Même le géomètre du cadastre dit ne pas savoir les noms des différents projets. ‘Je ne suis qu'un envoyé de l'Etat et j'étais chargé de faire le tracé conformément au document qui m'est venu d’en haut’, lance l'agent du cadastre.

Lors de la rencontre d’hier, le sous-préfet n'a pas eu un écho favorable du côté des propriétaires terriens. Ces derniers voulant revenir sur la forme et le fond de la procédure. Pour le chef de village de Tivaouane Peul, il faut que les autorités reconnaissent qu'il y a vices de procédures. ‘Comment peut-on se lever un beau matin et venir tracer des concessions entières, des terres cultivées en traversant des cours habités sans même avertir le chef de village ou à la limite le père de famille. C'est aberrant, même si c'est un projet du président Wade, il y a un minimum’, regrette le chef de village.

Des menaces de mort aux agents de l’Etat

Aujourd’hui, au niveau des populations, il n'est pas question que ces opérations se poursuivent. ‘Nous n'accepterons plus jamais que des agents de l'Etat pénètrent nos terres. Nous tuerons quiconque osera venir tracer nos terres’, soutient-on. Hier, un tour dans les champs, fait avec le concours des coopératives d’habitat, aura permis de relever toutes les constructions érigées sur les lieux. Sous-préfet de Sangalcam, Ibou Diop confie : ‘Nous avons reçu l'ordre de procéder comme ils ont dit et nous avons exécuté. Mais, aujourd'hui, nous nous sommes rendus compte que les choses ne sont pas comme prévues’. Cette réponse du sous-préfet n'agrée guère les populations. Au terme de la rencontre, elles se sont réunies pour définir un plan de bataille. C'est ainsi qu'elles comptent organiser une marche de Tivaouane Peul à la sous-préfecture de Sangalcam. ‘Nous ne permettrons jamais que l'Etat, sous quel prétexte que ce soit, prenne nos terres pour les remettre aux particuliers. Et si le président Wade veut bien aider ses sinistrés, hé bien qu'il les remette ces hectares de terres qui sont inoccupées à Keur Massar’, lance cet habitant. C'est sous une forte escorte de la gendarmerie que les autorités, accompagnées des populations, ont fait le tour du site, ce lundi. Sur place, l’on a pu constater qu’une dizaine d'hectares sont sous le contrôle de deux coopératives d'habitat, qui ont déjà fait le lotissement et sont sur le point d'obtenir un bail. Des dizaines de maisons déjà habitées sont également dans les projets. Des champs cultivés, des vergers et une mosquée sont inclus dans le document du cadastre. Le service du cadastre, qui s'était pointé sur les lieux, n'a rien épargné. Il a tout fiché et enregistré dans le plan pour enfin conclure que le site est vierge. Voilà ce qui a poussé les populations à la révolte.

DES MILLIERS D'HECTARES ENTRE LES MAINS DES PARTICULIERS : La boulimie foncière prend racine au sommet de l'Etat

‘Même le président Wade a donné des terres à un de ses amis dans le village de Tivaouane Peul’. Cette phrase montre toute la détresse des populations de Tivaouane Peul qui ne savent plus à quel saint se vouer. Les autorités, sensées les protéger, sont les principaux spéculateurs fonciers dans le village. Plus un seul hectare n'est laissé aux villageois. La boulimie foncière organisée des libéraux prend racine au sommet de l'Etat. La stratégie est simple. On vient avec une carte confiée au cadastre avec l'appui du commandement territorial pour annoncer un projet du chef de l'Etat. Le nom du projet est sans importance, mais quand il s'agit du chef de l'Etat, le projet ne se discute pas. Le plan concocté à Dakar, sans une consultation des élus de la communauté rurale, peut ne pas être conforme à la réalité. Mais peu importe. Le sous-préfet, qui est libéral, est chargé de faire passer le projet. Il peut intimider qui il veut, le chef de village y compris.

Ainsi, plusieurs projets sont ‘finalisés’ et des hectares volés aux populations. Si on fait le compte, c'est l'Apix qui est en tête avec 165 hectares, Namora, qui au moins a construit quelque chose sur son site, dispose de 118 hectares. L'ami du président Wade, du nom de Aliou Ardo Sadio, s’est vu octroyer 110 hectares. Le groupe Nabi, qui était associé à Namora, a 50 hectares, tout comme Coséprim qui dispose du même espace sur le site. Et enfin Global village, un projet du président Wade non encore identifié, doit être bâti sur un peu plus d'une centaine d'hectares.

Aujourd'hui encore, ce sont des centaines d'hectares qui sont ciblés pour abriter les sinistrés, le projet ‘Une famille, un toit’ et l'inconnu qui ne trouve pas toujours de nom. ‘Ce qui nous fait penser à une vaste escroquerie foncière, l'une des plus grandes du siècle’, lance un jeune du village, qui dit vivre avec trois de ses frères mariées chez son père.



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