POUR AVOIR NOTE QUE LES BELLES VILLAS FOISONNENT ALORS QUE LA PAUVRETE AUGMENTE : Gilles Hervio fâche le ministre du Budget Abdoulaye Diop

Gilles Hervio n'a pas fait qu'interpeller le gouvernement, hier, sur la réforme du Code des marchés publics. Le diplomate européen a surtout émis une observation sur la pauvreté, qui n'aura pas eu l’heur de plaire au ministre délégué, chargé du Budget, Abdoulaye Diop, dont la réplique ne se fera pas attendre.
Gilles Hervio a en effet fait ressortir le contraste entre les belles villas qui fleurissent à foison, alors que la pauvreté refuse de reculer depuis quelques années. «On constate cette stabilisation de la pauvreté, alors qu'en même temps, lorsqu'on se promène dans les quartiers, on voit des maisons luxueuses. Je crois qu'il serait bon de faire attention à ce qu'il n'y ait pas de décalage important», a souligné le représentant de l’Union européenne à Dakar.

«Ce n’est pas parce que les villas sont construites que la pauvreté a augmenté», réplique M. Diop

Des propos, qui soulèveront l'ire du ministre Abdoulaye Diop dont la réplique a été sèche. «À ma connaissance, il n'y a pas d'indicateurs qui disent que le nombre de villas ou de belles villas ou de cases ou je ne sais quoi encore, construites à gauche et à droite, permettrait de dire que la pauvreté a augmenté ou pas. On est dans un domaine très sérieux», a-t-il rétorqué. Puis, il a ajouté, toujours sur un ton pas des plus amicaux : «Il faut qu'on aborde la question un peu plus scientifiquement. Je crois qu'on est dans le domaine économique et financier, il y a des indicateurs, il y a des façons de calculer, je suppose. Alors calculons-les avec les méthodes, avec les mêmes outils et les façons nouvelles, et c’est seulement après que nous pourrons dire que les choses ont été stabilisées ou pas».
Pour M. Diop, «c'est logique que la pauvreté ait stagné ces trois dernières années, parce qu'avec la crise, le taux de croissance a ralenti fortement». Et donc, «intuitivement, ça se comprend ; techniquement et scientifiquement, sur la base des chiffres, ça se voit. Mais vraiment ce n’est pas parce que les villas sont construites de gauche à droite que la pauvreté a augmenté», a dit le ministre du Budget selon qui, «une étude de la Banque mondiale a montré une corrélation entre le taux de croissance et la baisse de la pauvreté». Ce qui a soulevé des murmures dans la salle du Méridien Président où se tenait la rencontre sur la Revue du Dsrp II.

La question de la corruption royalement ignorée par les officiels sénégalais

La non communication du gouvernement sur les cas de corruption dans lesquels sont parfois mis en cause des autorités étatiques n’a pas été du tout du goût du représentant de l'Union européenne au Sénégal. Gilles Hervio s'est désolé, hier, lors de la Revue du Dsrp II, que sur les cas de corruption, ses collègues et lui sont «trop souvent alimentés pour comprendre et essayer de décrypter ce qui se passe, par la seule presse qui, quelquefois, donne des informations vraies, d'autres fois inexactes».
C'est pourquoi M. Hervio a réclamé un système de communication officiel à ce sujet. «Il semble donc important, une communication du gouvernement qui soit claire et précise pour nous permettre de rapporter la réalité», a confié le diplomate.
Une interpellation qui sera royalement ignorée d'abord par le Premier ministre qui ne répondra que sur la réforme du Code des marchés. Et avant lui, le ministre du Budget, très en verve, mais qui n'a pas lui aussi pipé mot sur le sujet.