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Economie

Révélation du président du conseil national du patronat : L’Etat doit encore 100 milliards au secteur privé

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Révélation du président du conseil national du patronat : L’Etat doit encore 100 milliards au secteur privé
Le président du Conseil national du patronat (Cnp) tourne la page de la dette intérieure budgétisée. Baïdy Agne dirige maintenant son regard vers les créances hors budget qu’il estime à une centaine de milliards de francs Cfa. Et il attend son règlement dans les meilleurs délais. Dans l’entretien qu’il nous a accordé, M. Agne a également abordé la problématique de l’énergie dont la solution définitive réside, selon lui, dans la mise en place d’un programme de restructuration de la filière et l’instauration d’un débat démocratique et républicain. Se prononçant sur la situation à Air Sénégal international, il a fait savoir que les entreprises de son organisation sont prêtes à souscrire au capital de cette compagnie aérienne. Il affiche également son pessimisme quant aux prévisions de croissance pour 2009. Selon lui, les premiers résultats de leur enquête du premier semestre 2009 montrent une baisse du chiffre d’affaires des entreprises de l’ordre 10 à 35 %.

Wal Fadjri : La dette intérieure continue de nourrir une polémique. Des entrepreneurs soutiennent que la dette intérieure n'est pas encore totalement épongée, alors que le ministre de l'Economie et des Finances avait défendu récemment le contraire. Tous les entrepreneurs membres de votre organisation ont-ils reçu leur dû ?

Baïdy Agne : Pour bien se comprendre, il suffit de faire la part des choses entre la dette budgétisée et la dette hors budget. Si nous parlons de la dette budgétisée, le ministre d’Etat, ministre de l’Economie et des Finances a, tout à fait, raison de dire que les entreprises ont été payées. Il nous a envoyé l’état détaillé des règlements effectués et nous pouvons y constater que les paiements ont été réalisés sans distinction de la taille des entreprises (grande, petite ou moyenne), des secteurs d’activités (agriculture, industrie, Btp, services), ou de leur appartenance ou pas à une organisation patronale.

En ce qui concerne le Cnp, je tiens à préciser, qu’il s’agisse de la dette budgétisée ou de la dette hors budget, que plus de 70 % des montants échus et non payés concernent nos membres. Ce qui signifie que, comme toutes les entreprises du secteur privé, celles du Cnp dont les créances relèvent de la dette budgétisée, ont été payées. Par contre, celles relevant de la dette hors budget ne le sont toujours pas et il s’agit d’une centaine de milliards de francs Cfa. Le règlement de cette dette intérieure dans les meilleurs délais constitue notre préoccupation majeure. Maintenant, chaque organisation patronale a sa stratégie pour se faire entendre.

Wal Fadjri : En avez-vous fait la revendication auprès du ministère de l’Economie et des Finances ?

Baïdy Agne : En ce qui concerne la dette hors budget non payée à nos entreprises, nous nous étions entendus avec le ministère de l’Economie et des Finances et le Fonds monétaire international (Fmi) pour la réalisation d’un audit indépendant. Et le Cnp avait dit, aussi bien à l’Etat qu’au Fmi, qu’il fallait limiter le délai de réalisation de l’audit pour ne pas pénaliser les entreprises concernées. Nous avions également souligné que tous les travaux et prestations effectués par les entreprises doivent être payés. Les entreprises ne sauraient être tenues pour responsables du dysfonctionnement des démembrements de l’Etat ayant une autonomie de gestion. Je rappelle également que l’entreprise Cde (Consortium d’entreprise) est aussi membre du Cnp et que, concernant Bara Tall, je suis non seulement en relation avec lui, mais je m’investis pour la résolution du conflit opposant Jean Lefèbvre Sénégal (Jls) et l’Etat.

Pour cette dette hors budget, le cabinet d’audit vient de déposer son rapport provisoire auprès du ministère de l’Economie et des Finances et nous devons nous retrouver dans les jours à venir avec l’Etat sur les conclusions de l’audit. Nous discuterons aussi bien du montant de cette dette intérieure hors budget que des échéances de paiement. Je dois préciser que le Cnp privilégie toujours le dialogue avec l’Etat et les partenaires au développement, car notre seule préoccupation est que les entreprises soient payées et le plus tôt possible. Mais notre argent - et je suis moi-même concerné - nous ne le récupérerons que si les partenaires au développement renforcent leur confiance à l’Etat du Sénégal et si les efforts d’assainissement budgétaire se poursuivent. Ne nous trompons pas : dans le contexte économique actuel que nous connaissons tous (crise financière, énergétique, de confiance, etc.), si les finances publiques plongent, nous en paierons tous le prix, aussi bien les entreprises, les travailleurs que la population sénégalaise. J’ai bon espoir que nous obtiendrons, à l’issue de notre concertation avec l’Etat et le Fmi, au moins un échéancier de paiement de la dette hors budget.

En attendant, nous avons demandé à l’Etat de tout faire pour accorder une attention particulière aux entreprises en difficulté : pas de pression fiscale. Et concernant les charges sociales à verser aux institutions sociales, nous avons toujours veillé (patronat, syndicats de travailleurs, Etat), en relation avec les directions générales de l’Institut de prévoyance retraite du Sénégal (Ipres) et de la Caisse de sécurité sociale (Css), à ce que les entreprises en difficulté puissent bénéficier d’un traitement spécial.

Wal Fadjri : Parlons de la crise énergétique. Les délestages que les entrepreneurs et industriels ont toujours déplorés, ont repris. Que faire face à cette situation ?

Baïdy Agne : Tout a été dit sur l’énergie et nos positions sont connues. C’est l’un des premiers dossiers que doit s’approprier le Conseil économique et social (Ces). Les enjeux sont économiques, mais également sociaux. Cela fait plus de 20 ans que nous sommes confrontés à ‘l’équation Senelec’ sans pouvoir y apporter une réponse définitive.

Il faut mettre en place un programme de restructuration de la filière énergétique qui a l’adhésion de toutes les composantes de la nation. Nous devons en faire un débat démocratique et républicain ; et si le prix à payer représente une part significative des ressources budgétaires de l’Etat, les Sénégalais apprécieront les sacrifices nécessaires pour la résolution définitive de cette problématique.

Wal Fadjri : La crise d'Air Sénégal international (Asi) pose également le problème du transport aérien au Sénégal. Les entreprises membres du Cnp seraient-elles prêtes à accompagner la mise en place d’une compagnie nationale aérienne par l’Etat ? Si oui, à quel prix et dans quelles conditions ?

Baïdy Agne : Je me suis particulièrement investi pour le renforcement de notre patriotisme et de notre souveraineté économique dans le cadre des privatisations et concessions. Je précise que mon combat est que tout ceci puisse se passer dans la plus grande transparence, en concertation avec toutes les organisations patronales. Mais, bien entendu, ce sont les entreprises prises individuellement qui investissent.

Ainsi, d’ores et déjà, des entreprises du Cnp sont prêtes à souscrire au capital d’Asi. Et d’autres chefs d’entreprises ayant un intérêt au-delà de leur appartenance à telle ou telle organisation patronale vont également se manifester, car il s’agit d’un défi national que nous devons tous relever. Maintenant, à charge pour l’Etat de créer les conditions les meilleures afin que le secteur privé national soit présent.

Wal Fadjri : Au regard des difficultés qui précèdent, vos entreprises peuvent-elles s’attendre à de bonnes perspectives de croissance économique pour l’année 2009 ?

Baïdy Agne : Nos prévisions de croissance économique sont malheureusement très pessimistes. Nous venons de boucler au niveau du Cnp notre enquête de conjoncture économique de ce 1er semestre 2009 et les premiers résultats enregistrés montrent qu’on enregistre une baisse du chiffre d’affaires des entreprises de l’ordre de 10 à 35 % dans la quasi-totalité de notre secteur productif (industrie, Btp, services).

Bien entendu, les causes sont diverses. A titre d’exemple, pour le tourisme balnéaire, c’est la crise financière internationale ; pour le Btp et les divers prestataires de services de l’administration, c’est la dette intérieure et la baisse de la commande publique. Concernant d’ailleurs cette baisse de la commande publique, le Cnp avait déjà attiré l’attention de l’Etat et du Fmi quelle serait la conséquence de l’assainissement budgétaire en cours et que des mesures d’accompagnement s’imposaient à cet effet. Je souligne également qu’on enregistre une baisse des recettes douanières liées à la conjoncture économique actuelle.

En résumé, au regard de la situation actuelle, le Sénégal ne devrait enregistrer en 2009 qu’un taux de croissance de l’ordre de 2,5 %. Et j’espère que nous aurons cette année une bonne pluviométrie, sinon le pire est à craindre…

Wal Fadjri : Glissons sur la politique pour parler des conclusions des assises nationales auxquelles vous n’avez pas pris part. Le Cnp est-il favorable aux conclusions de ces assises ?

Baïdy Agne : Nous n’avons examiné que la partie qui intéresse l’entreprise, c'est-à-dire celle portant sur l’activité socio-économique. Je dois rappeler que, même si nous n’avons pas pris part aux assises nationales, le Cnp avait transmis son Pacte de bonne gouvernance générateur de croissance et d’emplois productifs élaboré et publié lors des élections présidentielles et législatives de 2007. Nous avons de très bons rapports avec tous les acteurs de la vie politique et je rencontre régulièrement les leaders de l’opposition. Maintenant, concernant le document des assises nationales, ils ont fait un travail pour le Sénégal, c’est bien, d’autres Sénégalais le font également dans un autre cadre, c’est bien aussi…L’essentiel, c’est toujours de privilégier l’intérêt supérieur de la nation.

Vous savez, dans le développement socio-économique du Sénégal, chaque citoyen, chaque acteur socio-économique, chaque acteur politique a sa partition à jouer. Personne ne peut dire : je suis plus sénégalais ou patriote que toi… Mais il faut savoir aussi qu’au Cnp, nous ne faisons pas de politique, nous ne l’avons pas fait du temps de Diouf et nous ne le ferons jamais, car la politique ne constitue pas le fondement de notre union patronale, ni de notre solidarité patronale.

Cependant, nous œuvrons toujours, et apportons aussi bien notre modeste et discrète contribution pour que les acteurs de la vie politique se parlent, car l’entreprise a besoin de stabilité politique et de paix sociale. Je dis toujours que le monde de la politique et le monde de l’entreprise ne se confondent pas, mais qu’ils coopèrent.



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