Les sondages d’opinion, bien que de plus en plus présents dans le paysage sénégalais, évoluent dans un cadre juridique à la fois daté et faiblement appliqué. La loi n°86-14 du 14 mars 1986, qui régit la production et la diffusion des sondages, prévoit la création d’une Commission nationale chargée de veiller au respect des règles déontologiques. Cette instance, censée valider la méthodologie des enquêtes et autoriser leur publication, reste toutefois peu visible dans la pratique. L’absence de mises à jour de la loi, face à l’émergence de nouveaux acteurs et de techniques numériques de recueil de données, limite son efficacité et laisse place à de nombreuses zones d’ombre.Sur le plan économique, le financement des sondages reste largement informel et rarement documenté. Leur coût varie considérablement en fonction de l’ampleur de l’échantillon, de la complexité des thématiques abordées ou encore du canal de collecte (téléphonique, face-à-face, en ligne). Un sondage national peut représenter un investissement allant de plusieurs centaines de milliers à plusieurs millions de FCFA. Pourtant, peu d’informations sont publiquement disponibles sur les circuits financiers impliqués. Les cabinets d’études, souvent mandatés par des partis politiques, des entreprises ou des partenaires étrangers, ne communiquent que rarement leurs sources de financement ou leurs critères de sélection, alimentant une certaine défiance.Ce double déficit normatif et économique affaiblit la légitimité des enquêtes publiées, particulièrement dans les moments sensibles comme les périodes électorales. La multiplication de sondages non déclarés ou méthodologiquement discutables nuit à la crédibilité de l’ensemble du secteur. Pour restaurer la confiance, plusieurs pistes sont évoquées ; à savoir une réforme de la loi de 1986 pour l’adapter aux standards internationaux, l’instauration d’un registre public des enquêtes autorisées ou encore un encadrement des contrats passés entre commanditaires et instituts d’étude. Une telle clarification serait salutaire pour asseoir la fonction des sondages comme instruments d’éclairage démocratique, et non comme outils d’influence à géométrie variable.
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