Calendar icon
Monday 01 September, 2025
Weather icon
á Dakar
Close icon
Se connecter

Tourisme responsable au Sénégal : une ambition durable encore en construction

Auteur: AICHA FALL

image

Longtemps centré sur la promotion du balnéaire, le tourisme sénégalais s’oriente progressivement vers une approche plus durable, soucieuse de préserver les écosystèmes, de valoriser les patrimoines culturels et d’ancrer l’activité économique dans les territoires. Des plages de la Petite-Côte aux mangroves du Saloum, en passant par les contreforts du Fouta, les initiatives se multiplient pour faire émerger un modèle plus éthique. Mais cette transformation, bien que réelle, reste encore fragmentée et inégalement répartie.
Le secteur représente environ 7?% du produit intérieur brut national. Le gouvernement affiche l’ambition d’atteindre 10?%, en diversifiant l’offre touristique et en consolidant ses retombées économiques. En 2023, le pays a accueilli près de 1,83?million de visiteurs internationaux, pour des recettes estimées à 800?millions de dollars. Ces indicateurs témoignent d’un dynamisme retrouvé, mais masquent une forte concentration des flux sur les régions de Dakar, Thiès et la Petite-Côte, qui captent l’essentiel des infrastructures, des investissements et de la fréquentation.
Ce déséquilibre géographique limite la portée inclusive du tourisme et prive de nombreux territoires de ses bénéfices potentiels. La Casamance, le Ferlo ou encore le Fouta restent en marge des circuits classiques, souvent en raison de l’insuffisance des équipements, du manque de promotion ciblée ou encore de l’absence d’accompagnement technique.
Pour répondre à ces enjeux, le Ministère du Tourisme et de l’Artisanat a mis en place une politique sectorielle ambitieuse pour la période 2025–2029. Celle-ci s’inscrit dans un cadre plus large, celui de la vision nationale de développement durable à long terme, qui vise à bâtir un Sénégal prospère, équitable et autonome. Cette politique entend favoriser un tourisme territorialement équilibré, en soutenant notamment les services à haute valeur ajoutée, et en encourageant l’innovation dans les filières culturelles et artisanales, afin de renforcer la compétitivité du secteur.
Certaines initiatives incarnent déjà cette orientation. À Popenguine, la gestion participative d’une réserve naturelle par un collectif de femmes mêle protection de la biodiversité, éducation environnementale et autonomie économique. Dans le Saloum, des campements villageois misent sur l’hospitalité locale et l’immersion dans les cultures sérères, tout en contribuant au financement de projets sociaux.
Malgré ces signaux encourageants, le secteur reste encore largement dominé par une logique de volumes, portée par les grands tour-opérateurs et les complexes balnéaires. La prise en compte systématique des critères environnementaux, l’implication effective des communautés hôtes, ou encore la traçabilité des retombées économiques demeurent, dans bien des cas, embryonnaires. La formation adaptée, la structuration des filières durables et l’accès aux financements pour les petits opérateurs constituent encore des points de fragilité majeurs.
L’aspiration à un tourisme plus enraciné, équitable et résilient est bien présente dans le discours institutionnel comme dans certaines dynamiques locales. Mais sa généralisation exige des réformes de fond?: une meilleure planification territoriale, un encadrement plus rigoureux des investissements hôteliers, ainsi qu’un accompagnement stratégique des collectivités et des acteurs de terrain. C’est dans cette tension entre volontés politiques, initiatives citoyennes et inerties structurelles que se joue la mutation du tourisme sénégalais, appelé à concilier développement économique, justice sociale et exigence écologique.
Auteur: AICHA FALL

Commentaires (0)

Participer à la Discussion