Badou Ndiouck a beau se confondre en excuses, le tribunal départemental est resté insensible à son cri du cœur. Ce faux professeur de mathématiques, qui a donné des cours pendant quatre ans, a été, après avoir été démasqué, condamné par le tribunal à six mois de prison. Il n’avait même pas le baccalauréat.
Les autorités académiques, les différents principaux et même les élèves n’y ont vu que du feu. Car, Badou usait de tous les subterfuges pour dispenser ses cours. Cela lui a toujours réussi, jusqu’au jour où il a été mis aux arrêts par les policiers du commissariat central de Thiès qui l’ont trouvé au centre d’examen de Malick Kaïré où se déroulaient les épreuves du Bfem.
Le ministère public a qualifié cette affaire de très grave. Pour Alioune Dia, le mis en cause devait être devant une juridiction régionale pour escroquerie. Selon lui, ce dernier a perçu, pendant quatre ans, des salaires allant de 80.000 à 130.000 francs au préjudice de l’Etat sénégalais. Ce qui est inacceptable. Badou Ndiouck a failli sacrifier une génération entière en se faisant passer pour un brillant prof de maths alors qu’il n’en est pas un.
Tout est parti d’une lettre anonyme adressée au patron de l’inspection d’académie, révélant que Badou n’avait nullement le bac, encore moins le brevet. Certains pointent du doigt ses copains du même quartier qui auraient vendu la mèche, d’autres parlent des parents d’élèves de la localité de Pire, son dernier poste.
Comment s’est-il débrouillé pour avoir ce parchemin si précieux, un sésame tant recherché ? Le prévenu a indiqué qu’il est resté longtemps sans trouver un boulot après avoir échoué au baccalauréat vers les années 96. Par pur hasard, dit-il, il a rencontré un certain Allé Guèye qui n’est plus de ce monde, selon sa déclaration. Ce dernier lui proposa de lui confectionner un diplôme de bac. Une fois qu’il donna son assentiment, l’affairiste lui demanda de débourser la somme de 200.000 francs. Quelques jours plus tard, le voilà muni de trois diplômes. « Et qu’aviez vous fait avec ces diplômes ? », renchérit la présidente Fatou Ngom. « J’ ai déposé l’un au Fnpj, un autre à la Cse et le dernier au niveau de l’inspection d’académie de Thiès pour être recruté comme vacataire », répondit-il. Quelques mois après avoir déposé son dossier au niveau de l’Inspection, il eut la baraka d’être convoqué au département de l’éducation nationale où on lui remit une décision l’affectant au niveau de l’inspection d’académie de Thiès. Badou rejoignit le Cem de Mboro, son premier poste d’affectation. Il y passa un séjour de deux ans entre les classes de 5ème et de 6ème avant de déposer son baluchon à Pire. Là également, il fut chargé de dispenser des cours de maths. Lors de son interrogatoire, le faux prof de mathématiques a laissé entendre qu’il n’avait pas de problèmes pour prendre en charge les élèves des classes de 6ème et de 5ème. Badou connaissait moult ficelles pour s’en sortir. Comme il n’ avait qu’une heure de cours, il se débrouillait pour apprendre par cœur tous les cours qu’il devait dispenser dans l’année. Et le tour était joué.
Pour le procureur, ce qui est plus troublant dans cette histoire, c’est la témérité qu’a eue le mis en cause pour changer son prénom qui était Ngouda Ndiouck. En effet, le faux prof a eu entre temps un jugement supplétif où il porte le prénom de Badou. Pour le procureur Aliou Dia, le prévenu a encore commis une autre faute très grave, le fait d’avoir changé de prénom alors que cela demande une procédure exigeant l’aval du président de la République.
A l’en croire, il était dans un désœuvrement total, c’est pourquoi, dit-il, cette idée lui est venue en tête afin de pouvoir se prendre en charge et de subvenir aux besoins familiaux.
Dans son réquisitoire, le ministère public a requis six mois ferme de prison contre Badou Ndiouck et 500.000 francs d’amende ferme. Il a été suivi en cela par la juridiction départementale.
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