La gorge tranchée la veille de la célébration de son mariage, dans la nuit du 21 au 22, Mouhamed Tounkara a survécu et lutte actuellement contre la mort, sur un lit, en section réanimation de l’hôpital Principal. Dans les environs de la Corniche de la Patte-d’Oie où les faits ont eu lieu, les langues se délient. On parle d’ex-copines jalouses qui ont envoyé un agresseur, d’un patron qui cacherait des secrets compromettants, etc. Deux éléments restent constants selon les témoignages. La victime n’avait pas l’habitude d’emprunter ce chemin pour se rendre chez sa douce moitié, ce qui fait penser qu’il a été suivi. Par ailleurs, le ou les agresseurs n’ont rien pris au nouveau marié, ni son téléphone, ni son argent de poche : d’où la thèse du règlement de comptes.
Un jeune apprenti poignardé aux petits matins, un petit garçon retrouvé avec une tête fracassée, un couple qui projetait de convoler en justes noces, également poignardé, tous à la Médina. Ce n’est pas fini : deux vigiles ont été étranglés à deux points opposés de Dakar, au cours d’une même nuit, à l’aide de bouts de tissus... La violence règne en maître à Dakar depuis trois mois. Dans la nuit du 21 au 22 avril 2006, c’était autour de Mouhamed Tounkara, transitaire, d’affronter une mort violente. Cloué sur un lit à l’hôpital Principal, il se bat encore contre la Grande Fâcheuse. Pourtant, tout semblait aller si bien pour ce nouveau marié, à la veille de sa réception...
Demain est un grand jour, pense sans doute Mouhamed Tonkara, ce vendredi 21 mars, en quittant son domicile à la Pate-d’oie, pour se rendre chez sa toute nouvelle épouse à la cité Impôts et Domaines. Il est d’usage au Sénégal de célébrer les mariages dans les mosquées ou les Eglises et d’attendre quelques jours pour organiser une fête et recevoir ses proches. C’est donc dans cette ambiance de réjouissances que Mouhamed Tounkara rend visite à la femme qu’il vient d’épouser. La cérémonie est pour demain, les préparatifs vont bon train, surtout chez les femmes qui mettent un point d’honneur à se pavaner avec de nouvelles toilettes. Ce soir encore, la conversation entre son épouse et ses copines, va probablement tourner autour des derniers réglages pour que la fête soit belle et réussie. Il est 21 h et le jeune transitaire en est à ces réflexions, lorsqu’il est interpellé au niveau de la Soprim par deux jeunes filles. Cette partie de la Corniche de la Pate-d’Oie, raconte une proche de son épouse, M.F est très fréquentée par les « boujaron » et autres sans-abris à cause de l’obscurité qui y règne et de la proximité des Niayes qui permettent de se camoufler dans les plantes. Toujours selon M.F, Mouhamed a fait un bout de chemin avec les deux inconnues et tout d’un coup, quelqu’un a surgi des Niayes pour l’égorger par-devant. « Je ne peux pas dire s’il s’agissait d’une personne ou de plusieurs, mais on ne lui a rien volé, ni son téléphone, ni l’argent qui était dans ses poches ». Leur forfait accompli, les agresseurs disparaissent, laissant le couteau sur place. Les deux femmes aussi se fondent dans la nature. La gorge tranchée, Mouhamed Tounkara parvient à se traîner jusqu’à un endroit éclairé. Il tombe sur deux garçons qui l’aident à composer les numéros de son épouse et de son frère. « Lorsque ma copine est arrivée, il était déjà dans le coma », relate M.F. Cependant, avant de perdre connaissance, Mouhamed a fait signe à son frère de lui donner du papier et de quoi écrire. Les mains tâchées de sang, il aurait griffonné des noms et des numéros de téléphone. Ceux des commanditaires ? Dès qu’ils ont été informés des faits, les éléments du commissariat des Parcelles Assainies se sont rendus sur les lieux. Le blessé était déjà transporté à l’hôpital par l’ambulance. Le commissaire Ibrahima Diop n’a pas jugé opportun d’ouvrir une enquête puisque les proches de la victime ont déposé une plainte à la gendarmerie de Thionc.
Comme il est d’usage dans ces cas, les rumeurs vont bon train et tout le monde s’improvise « Inspecteur Colombo ». D’après des proches de la victime, le patron du jeune transitaire craindrait que son employé étale au grand jour certains secrets. Il aurait donc envoyé des agresseurs pour le faire taire. D’autres, qui partent du fait que Mouhamed Tounkara avait beaucoup de succès auprès des dames, pensent que l’une de ses ex-conquêtes, déçue de n’avoir pas réussi à lui passer la corde au cou, a préféré le voir mort, plutôt que de le savoir marié à une autre. Toujours est-il que, constate la copine de sa femme M.F, les agresseurs, qui avaient le temps de prendre le téléphone et de le porte-feuille, n’ont rien volé. Par ailleurs, ce qui a étonné plus d’eux, c’est que Tounkara n’avait pas l’habitude d’emprunter ce chemin. Il aurait donc été suivi, a-t-on laissé entendre.
Encore une affaire de violence à élucider par les pandores. Prions que Mouhamed Tounkara gagne sa bataille contre la Grande Gâcheuse et qu’il retourne bientôt dans les bras de sa toute nouvelle épouse...
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