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COUMBA GAWLO, ARTISTE- COMPOSITEUR « J’ai beaucoup mûri musicalement, humainement, personnellement… »

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COUMBA GAWLO, ARTISTE- COMPOSITEUR « J’ai beaucoup mûri musicalement, humainement, personnellement… »

A quelques jours du méga concert que la grande diva, la gazelle noire, en tant qu’ambassadrice du Pnud, s’apprête à tenir à Bouaké en Côte d’Ivoire le 17 novembre prochain, Coumba Gawlo nous a accueillis dans son nouveau quartier général en plein chantier sis à Sacré cœur 3. Et c’est pour parler « plus sérieux » avec elle.Car Coumba Gawlo dit avoir « beaucoup mûri ».  Autrement dit, aborder avec elle son côté « militant pour les causes nobles ».  Pour ne pas dire son « côté philosophe ». Entretien.

Coumba, vous vous apprêtez à faire un saut en Côte d’Ivoire plus précisément  à Bouaké, peut-on savoir les raisons de cette visite au pays de  Houphouët-Boigny?

Effectivement, nous allons nous retrouver à Abidjan le 17 Novembre prochain plus précisément à Bouaké où j’aurai à donner un méga concert en fin de journée mais qui sera précédé par une journée de sensibilisation sur la lutte contre la pauvreté dans le cadre des Omd. Notamment le Sida, l’amélioration des conditions de vie de l’enfant, la scolarisation des filles et leur maintien à l’école et l’émigration clandestine. Mais le programme de cette année a quand même une particularité. Surtout si l’on sait que cela se passera à Bouaké, une ville symbolique. Et quand on sait que depuis les événements de Côte d’Ivoire, il n’y a pas eu d’artistes, je pense, si je ne me trompe, à part Tiken Jah Fakoly, qui ont eu à y donner un concert. Et je me sens honorée, et flattée en tant que Sénégalaise mais aussi en tant que femme d’avoir à me produire dans cette ville symbolique de Bouaké dans le cadre de ma mission d’ambassadeur pour la lutte contre la pauvreté.

Est-ce qu’il y a d’autres artistes africains ou étrangers qui vont participer à cette grande manifestation?

Nous avons des artistes de la localité qui vont venir car à chaque fois que nous organisons ce genre de manifestation, nous y convions des artistes du pays. C’est un programme étranger, c’est-à-dire que nous, en tant qu’artistes étrangers, on a pris un programme que l’on a déménagé dans un pays et donc il est très important pour nous d’y associer les artistes de la localité. C’est pour cette raison qu’il y aura des artistes ivoiriens comme  Thierry Major, le rappeur de 12 ans Bébé Arafat, l’humoriste Adama Daîko… Ce sont des artistes assez connus en Côte d’Ivoire. Des rappeurs, des artistes du coupé- décalé aussi, qui sont très présents et qui vont s’associer à ce programme.

On sait que vous  avez été déjà été au Mali, au Burkina Faso et au Niger. Le 17 prochain, ce sera au tour de la Côte d’Ivoire, quelles sont les prochaines étapes de cette grande tournée?

Ce programme existe depuis 2002 et depuis l’année dernière, il a été «internationalisé». Chaque année nous essayons d’innover en l’élargissant parce que l’objectif principal de ce programme, c’est le rapprochement des peuples d’Afrique et cette année, par la grâce de Dieu, il s’est élargi par la ville d’Abidjan. Et après, nous aurons à faire le Gabon, la Mauritanie, la Gambie. Nous retournerons au Mali encore pour l’édition de cette année, ainsi qu’au Burkina Faso et au Niger qui verront le programme pour la 2e année consécutive.

Vous embrassez beaucoup de domaines d’activités mais, il y a des Sénégalais qui vous critiquent, qui font des remarques sur tous ces artistes nationaux qui s’investissent dans beaucoup de crises à l’étranger mais qui snobent un peu nos réalités propres. Par exemple, il y a un grand bouillonnement sur le plan politique au plan national, avec l’opposition qui réclame des assises nationales depuis très longtemps, le coût de la vie qui ne cesse d’augmenter, une crise sociale très aiguë. Sur le plan politique, il y a la rébellion en Casamance, avec le mouvement irrédentiste et souvent, on ne voit pas les artistes nationaux, que répondez vous à ceux qui formulent ces critiques?

Je pense que ces critiques ne sont que flatteuses pour moi. Nous sommes Sénégalais, le public nous aime et souhaite que l’on soit toujours plus proche d’eux mais je pense que pour ma part, je suis très impliquée dans ce qui se passe dans mon pays parce que ce programme que je développe dans la sous-région est avant tout un programme que j’ai développé dans mon pays. Parce que nous le faisons chaque année dans la sous- région pour sensibiliser  notamment sur l’émigration clandestine. Car il faut signaler que j’ai été très impliquée dans le combat contre l’émigration clandestine depuis plusieurs années bien avant même que d’autres artistes s’impliquent dans cela avec l’Onuduci. De même que sur la drogue et la scolarisation des jeunes filles, leur maintien à l’école. Dans le cadre de mon association «Lumières pour l’enfance pour tous» qui concerne notre pays et d’ailleurs, c’est ce qui m’a poussé à vouloir élargir mon implication au-delà d’autres frontières vu que la demande m’a été faite par d’autres, tout simplement parce qu’ils ont vu le combat que je mène dans mon pays. Maintenant, pour ma part, je vais essayer d’accentuer cela, de redoubler d’efforts mais je pense que je suis déjà très impliquée dans mon pays.

Trois ans que vous êtes ambassadrice du Pnud.  Quel bilan faites-vous de vos  activités depuis cette période?

C’est un bilan très positif quand on sait que j’ai eu à aller avec le Parep, le Pnud... Il faut signaler que mon implication commence chez moi d’abord, j’ai eu à visiter des villages dans le Fouta comme Namardé, Namarel. J’ai été jusqu’à Ndioum, Matam, Saint-Louis en tant que femme qui croit au développement et à l’entreprenariat féminin dans le cadre de ma mission dans la lutte contre la pauvreté. Et j’ai eu à rencontrer des femmes extrêmement dynamiques et intelligentes. Une manière aussi de sortir de mon domaine en tant qu’artiste pour voir aussi d’autres femmes s’activer et les encourager. Et ce sont des femmes qui se sont constituées en Gie, en organisations de femmes couturières et j’ai eu à véhiculer des messages à ces femmes, à aller visiter des écoles pour enfants. J’ai eu aussi à sensibiliser des parents sur l’importance capitale qu’il y a à scolariser les filles, d’avoir un taux assez important de femmes intellectuelles demain. Et au-delà de cela, j’ai eu à élargir ma mission dans d’autres pays comme le Burkina. Où j’ai eu à visiter le camp des femmes rejetées, qui sont accusées de sorcellerie. Une manière pour moi, Africaine, de leur dire que nous sommes tous pareils. On a tous besoin d’être soutenu. Et puis d’autres actions dans le cadre de la sensibilisation notamment sur l’éducation, l’entreprenariat féminin, sur la scolarisation des filles, sur les maladies sexuellement transmissibles (Mst) et sur l’émigration clandestine dans le cadre de mes tournées «School tour», (la tournée des écoles). Parce que je pense que les personnes qui ont besoin d’être sensibilisées sur la question de l’émigration clandestine sont les jeunes. Notamment, les jeunes et la drogue, les jeunes qui sont dans les écoles afin de les encourager à beaucoup plus étudier parce que nous avons encore besoin de jeunes étudiants. Nous avons besoin d’intellectuels, et leur dire que c’est bien beau de partir, mais il faut partir dans des conditions saines. Il faut partir dans des conditions claires pour éviter ce qui se passe en ce moment.

À propos de l’excision des filles, je sais qu’il y a eu une grande déclaration qui avait été faite par un certain nombre de communautés rurales sous l’égide de l’Ong Tostan, disant que les ciseaux et les lames étaient rangés dans les tiroirs. Or, semble-t-il, jusqu’ici, la pratique continue.

L’excision est un problème assez délicat et personnellement cela me peine beaucoup. Je pense qu’une fille, avant d’être une femme, est avant tout un être humain, elle a besoin d’avoir droit à la parole, de prendre ses décisions et je pense qu’il est important de les aider à ne pas avoir une plaie en elles parce que c’est une plaie intérieure et c’est quelque chose qui ne s’efface pas, qui grandit et qui un jour, peut créer beaucoup de problèmes. Mais d’un autre côté étant une artiste africaine, sénégalaise et assez traditionaliste et respectueuse de nos cultures, je comprends le souci des parents, même si je n’y adhère pas. Parce qu’il y en a qui pensent que c’est une pratique qui répond à la culture ou à la tradition mais je pense qu’aujourd’hui, nous sommes à un siècle où ces «barbaries» doivent être éliminées. Aujourd’hui si je peux faire quoi que ce soit pour Tostan, j’en serais flattée.

A votre  avis que peut-on faire pour juguler ce fléau? Comment peut-on résoudre le phénomène de l’excision?

Je pense que c’est un phénomène qui ne peut pas disparaître du jour au lendemain parce que d’abord c’est culturel. Les gens y ont cru pendant plusieurs années, ils sont venus au monde, ont vu leurs parents y croire ou même ont été victimes de cela. Il y en même qui ont été victimes de l’excision mais ne se considèrent pas comme tel du moment qu’elles l’ont acceptée et sont heureuses de le faire. Elles continuent en quelque sorte le phénomène donc le processus continue. C’est ce qui fait que c’est assez difficile de vouloir l’enlever du jour au lendemain mais je pense qu’en allant à la base, en parlant avec ces femmes, ces pères surtout pour les sensibiliser en discutant avec eux, on pourra peut-être arriver à quelque chose, au final.

Revenons à la musique pour terminer. Dans votre  album «Dieureudieuf », pourquoi avoir senti le besoin de dire «Merci»?

Merci est le mot le plus court au monde mais aussi le plus important. Merci, c’est quand quelqu’un fait du bien pour nous, on le remercie, quand le bon Dieu nous donne des victoires. Il arrive même parfois qu’il nous donne des défaites, et là on le remercie, tout simplement parce qu’on a la foi en Lui et en espérant demain qu’Il nous donne de la joie. Il est très important de dire Merci aux gens qu’on aime, aux gens qui nous ont soutenu et qui ont toujours été là. Et pour cet album particulièrement, je dirais que c’est l’album de la maturité, l’un de mes meilleurs albums. Parce que tout simplement, il y a une synergie parfaite dans tous les thèmes. En écrivant les chansons, j’ai été très inspirée par tout ce qui se passe. D’ailleurs, pour revenir sur l’émigration clandestine, avec la chanson «Dof». Pour vous montrer mon implication. Pour revenir à «Dieureudieuf», je dirais que c’est une manière de dire «Merci», de remercier d’abord le bon Dieu de m’avoir donné le nom que j’ai, d’avoir fait de moi ce que je suis, remercier mes parents et mon entourage et enfin dire merci aux fans. Parce que tout simplement dans la carrière d’un artiste, il y a des hauts et des bas et quand c’est difficile, les fans sont toujours là, vous soutiennent toujours et croient en vous. Et dans la carrière d’un artiste, il arrive de prendre des chemins qui ne sont pas les bons et malgré tout, les fans vous suivent, vous soutiennent.

A part le thème de l’émigration, quels sont les autres thèmes abordés?

Il y a «Dof» qui parle de l’émigration, de la vie et de ses folies. Je me pose la question de savoir si c’est le monde qui devient fou ou c’est moi qui devient folle? Parce que j’ai constaté qu’on a perdu un peu d’âme, un peu partout dans le monde  avec la guerre en Irak qui a empiré, le Darfour, Les Grands lacs, les expulsés çà et là, avec tous les problèmes qui se passent un peu partout en Afrique et dans le monde. Le soutien, l’amour que les gens se vouaient l’un l’autre, je vois que les gens ont beaucoup perdu de cela. Plus on va vers le modernisme, plus on perd cette envie d’aider l’autre et de penser à l’autre. Il y a aussi «Femme-objet» qui est un hymne à la femme, à la femme du refus, à la femme dynamique, battante qui sait ce qu’elle veut et ce qu’elle vaut et je pense qu’aujourd’hui, les femmes savent ce qu’elles veulent.

Il y a aussi «Domou baye» qui est un titre sur le rapprochement par le sang de deux êtres humains qui doivent donc se rapprocher de la même manière que le sang les a liés au lieu de s’ignorer. Il y a aussi «Magal bess» qui rend grâce au jour de la naissance de l’être humain qui  voit le processus de développement de son corps qui grandit et qu’à chaque année, on se mette à fêter la naissance. À chaque fois que notre anniversaire arrive, c’est le moment de faire notre brain- storming, se demander quels ont été les bons et mes mauvais moments. C’est aussi le moment de faire le tri entre les bonnes et mauvaises choses et d’en garder de bons souvenirs. «Cool» qui est la chanson que j’adore car la vie est tellement compliquée, tumultueuse et que parfois les tumultes de la vie peuvent nous envahir à tel point qu’on oublie parfois de se calmer. Une fois je l’ai chanté devant l’ambassadeur de Chine et de Corée et ils disaient que cela correspondait beaucoup à la culture de chez eux, au bouddhisme, avec toute la sérénité qu’il faut et c’est de cela que je parle. Plus les percussions avec Doudou Ndiaye Rose, cela nous renvoie dans le Sénégal des profondeurs, cela nous fait découvrir aussi les mystères de l’Afrique.

On sent à travers les thèmes développés dans votre  album, une certaine maturité, est-ce à dire qu’on s’apprête à voir une Coumba Gawlo qui, de plus en plus, va se départir de ces thèmes du genre expressions osées, sexuellement parlant.  On sent que c’est une Coumba Gawlo qui va rompre avec cette façon de chanter qui provoque un peu?

Cela dépend. À chaque artiste, son évolution. L’être humain évolue, car mentalement, humainement, psychologiquement et en ce qui me concerne, je pense que j’ai beaucoup mûri musicalement, personnellement et humainement aussi. J’ai aussi beaucoup évolué et personnellement je ressens beaucoup de choses. J’ai besoin d’autre chose dans mon évolution actuelle, dans mon ressentiment actuel, j’ai envie d’autre chose. J’ai besoin d’autre chose que de ces chansons qui étaient plus provocatrices. C’était à une époque de ma vie, une époque que je salue et que j’ai beaucoup appréciée. Mais maintenant, j’ai envie de donner plus de profondeur, plus de philosophie et de recherches à mes textes.

En tant qu’auteur-compositeur. Mais cela ne veut pas dire que demain je ne vais pas revenir à mes premières amours. Sur scène, je suis un peu comme Céline Dion, prête à chanter et elle y aller à fond.



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