IBRAHIMA MBODJI ALIAS LAMARANA : « Je suis un gros chômeur»

Lamarana Diallo, de son vrai nom Ibrahima Mbodji, ne va plus jouer dans la même pièce que Rouba son ex-femme dans ledit sketch. Cette année, pour le bonheur des Sénégalais, l’auteur de «Lama ak koor gui» vole de ses propres ailes. Même s’il refuse de se prononcer sur ses bisbilles avec son ancien metteur en scène, Lamarana a fait son choix. Il ne travaillera plus dans l’informel.

Qui est Ibrahima Mbodji ?

Je suis un jeune Walo-walo habitant dans le village de Mbilor, près de Dagana. Je suis de la région de Saint-Louis. Je crois qu’actuellement, tous les Sénégalais me connaissent. Je ne suis plus un inconnu dans ce pays.

Racontez-nous vos débuts dans ce métier ?

C’est en 1986 que j’ai commencé à faire du théâtre. À ce moment, j’avais déjà quitté les bancs. Si je me rappelle bien, c’est durant la période des années 84-86. J’étais en classe de Cm2. Durant les vacances, comme je ne faisais rien, j’ai intégré la troupe de théâtre de mon quartier Deggo. Qui avait été mise sur pied par la dame Ndèye Coumba Ndiaye. Elle avait pris cette décision dans le but de canaliser les enfants pour qu’ils n’aillent pas à la plage. C’est là que j’ai démarré ma carrière de comédien. Cette année-là, quand l’année scolaire a repris, j’ai refusé d’y aller. J’avais commencé à prendre goût à la comédie. J’ai alors intégré la troupe «Xaléyi Baye Fall» de Grand-Yoff. J’ai fait trois (3) ans dans le théâtre populaire avant de rejoindre la troupe «Daraay Kocc».

Comment s’est passé votre intégration dans la troupe «Daraay Kooc» ?

Cela s’est bien passé. Car, j’ai pu rejoindre cette troupe grâce à des membres clés de la formation tels que  Demba Keïta et feu Maniang Faye. Ce sont eux qui m’ont présenté à Cheikh Tidiane Diop. Qui a aussitôt accepté. J’allais les rencontrer plusieurs fois jusqu’au jour où je fus intégrer définitivement dans la troupe.

Quelles sont vos activités en dehors du théâtre ?

Je ne fais rien. Rien du tout. Je suis un gros chômeur. À part le théâtre, je ne fais rien.

Votre arrivée à Daraay Kocc n’avait-il pas suscité de la jalousie ?

Non, du tout ! Quand je suis arrivé dans la troupe, j’étais parmi les plus petits. Il y avait les anciens comme Tapha Diop, Ndèye Mour, Bouba, Tata Dié Astou Diop, Seune, Maty… Je ne pense pas que ces gens-là ont pu nourrir une quelconque jalousie à mon égard. J’étais le plus petit et je ne pouvais pas avoir accès à leur niveau. Cela ne pouvait pas se faire et jusqu’à présent, je m’entends bien avec tout le monde.

Quel était votre premier rôle à Daraay kooc ?

Je crois que c’était le film «Un Dg peut en cacher un autre». Et là, je devais jouer un rôle de quelques secondes. J’étais l’ami du garçon du directeur, en l’occurrence Moustapha Diop. Je le taquinais d’ailleurs devant la porte du lycée. Je faisais aussi des séries de sketch (un homme avait laissé sa femme enceinte et sortait la nuit. Un jour, la police a fait une rafle et l’a gardé au poste. Et je m’étais chargé de l’annoncer à sa famille).

Votre premier rôle principal ?

C’est Lamarana dans «Diéégù yoor yoor». Un téléfilm qui m’a beaucoup relancé d’ailleurs.

Pourquoi imitez-vous tout le temps la communauté guinéenne ?

C’est venu naturellement. Je pense que c’est un don de Dieu. Je ne l’ai pas appris. Quand je faisais le théâtre populaire, je n’avais jamais joué le rôle d’un Guinéen. Je parlais wolof et imitais les vieux. Mais, cela est venu naturellement.

N’est-ce pas parce que vous avez grandi au milieu des Guinéens ?

Non, pas du tout. Cela ne m’a, en rien, influencé. D’ailleurs, quand je suis entré dans le théâtre, ce n’était pas pour les imiter. Comme je l’ai dit tantôt, c’est naturel en moi, même si j’ai habité et grandi avec eux à Khar  Yalla, où il y a une forte communauté guinéenne.

Est-ce que vous n’avez pas subi l’influence de cette communauté ?

Non ! Je ne faisais même pas attention à eux.  D’ailleurs, je ne me suis jamais mis à côté d’un Guinéen pour apprendre leur manière de parler. C’est venu naturellement.

Comment se fait la distribution des rôles à «Daraay kocc» ?

Là, je ne peux rien dire. Car, je n’ai jamais écrit une pièce de théâtre pour distribuer des rôles. C’est feu Cheikh Tidiane Diop qui s’en chargeait. À sa mort, c’est son neveu Pape Demba Sy qui s’en occupe. D’ailleurs, dans la troupe, je ne suis pas dans le cercle de ceux qui distribuent les rôles. Je ne fais pas partie du comité. Je ne suis qu’un simple membre. On me donne un rôle et je le joue.

La comédie nourrit-elle son homme ?

Je ne dirai pas que je suis riche comme crésus, mais je ne me plains pas. Avec ce travail, j’arrive à nourrir ma famille. C’est difficile, certes.

Que pensez-vous de ces comédiens qui font autre chose qu’éduquer ?

On ne peut pas être dans un métier et dénigré les autres.  Avec la comédie n’éduque plus. Chacun essaie, malgré le manque d’expérience. Avec tout ce que requiert le théâtre, si je devais lancer un appel aux troupes actuelles, je leur demanderais de se rapprocher d’un grand comédien issu de leur localité pour les guider. Il faut que l’Etat réorganise le secteur et aide les comédiens. Les autorités doivent installer des écoles de metteurs en scène, de technique d’écriture de scénarios.

Quels conseils donneriez-vous aux jeunes qui souhaitent vous imiter ?

Je leur dirais de faire des recherches dans ce domaine.  D’avoir un bon encadrement et de ne pas vouloir coûte que coûte être une star. Mais plutôt d’être humble. J’en ai fait un métier et j’y crois fermement.

Comment voyez-vous le théâtre actuellement ?

Je me rappelle quand on était gamin, on entendait et voyait que deux troupes théâtrales : «Diamono Tey» et «Daraay Kocc». Qui jouaient tous les mardis et les dimanches. Après, les Saint-louisiens, avec Golbert Diagne, sont entrés dans la danse. Les Thiessois aussi créent la troupe «Dianxene». C’est une ouverture, un pas en avant pour la comédie sénégalaise. Seulement, ils se partagent les heures et les pièces à la Rts1. Je pense que le théâtre avance. Mais, il reste beaucoup de choses à faire.

Quel problème y a-t-il entre Lama et Mamadou Bitèye ?

(Il est catégorique). Je ne vais plus en parler.

Pourquoi ?

Entre Mamadou Bitèye de Walf et moi, c’est une histoire finie. Nous avons travaillé ensemble. Mais cette année, j’ai créé ma propre troupe théâtrale. Avec un encadrement au complet. Dorénavant, je veux être davantage professionnel. Il n’y a rien entre lui et moi.

Cela suppose qu’avec Bitèye, il n’y avait rien de professionnel ?

Je travaillais à l’amiable. Pas de contrat, ni rien du tout. Maintenant, je gère mon image. Plus de travail dans l’informel, comme auparavant. Je travaille maintenant pour  mon propre compte. Nous avons travaillé trois ans et nous nous sommes séparés. J’ai ma propre structure. Chacun travaille de son côté. C’est bien. Vous savez, entre Bitèye et moi, il n’y a aucun problème. Il ne me doit rien. J’ai toujours honoré mes engagements. Je travaille pour mon propre compte maintenant.

Comment s’est passé la rupture ou la séparation ?

(Il insiste). Non, mais il est temps que je travaille pour  mon propre compte. C’est tout.

Vous en avez marre de travailler pour les autres ?

Ce n’est pas cela. Mais dorénavant, je ne vais travailler que sur des bases claires