Responsabilité sociale des médias : La presse a-t-elle oublié sa fonction d'éducation ?

De nombreux dérapages imputés à la presse ont souvent des conséquences fâcheuses sur la société. Ce qui amène à penser que les journalistes font fi de leur fonction sociale. Pour en connaître les raisons, l'Ong «Académie sur le leadership» a tenté de susciter le débat à travers une conférence axée sur le thème : «Responsabilité sociale des médias»

Au regard des soubresauts sociaux notés un peu partout dans le continent africain et qui tirent leur origine des dérives de la presse, il n'est pas superflu de se demander si cette dernière a pleinement conscience de ses responsabilités sociales. Une telle interrogation a emmené l'Organisation non gouvernementale (Ong) «Académie sur le leadership» à susciter un débat sur la question, à travers un panel organisé samedi dernier à la maison de la culture Douta Seck, sur le thème : «Responsabilité sociale des médias».

D'emblée, les panélistes ont, dans leur unanimité, regretté les mauvaises caricatures à travers lesquelles la presse est actuellement dépeinte par la société. Ce qui, de l'avis du chargé du programme Radio à l'Institut Panos Afrique de l'ouest, Souleymane Niang, note que quelque part «l'échec des médias dans leur fonction sociale». Selon le conférencier, au vu des dérives souvent notées au niveau de la presse et qui ont des conséquences néfastes sur la société, on a l'impression que celle-ci oublie que son devoir d'informer s'accompagne d'une fonction d'éducation. «D'où la nécessité, de réactualiser le débat axiologique qui met en relief le respect des valeurs essentielles dans le métier de journalisme, en l'occurrence, l'éthique et la déontologie», soutient Souleymane Niang.

Cependant, si la formation est un pré-réquis fondamental, en ce qu'elle offre au journaliste les outils nécessaires lui permettant de s'acquitter convenablement de son travail, elle ne saurait, à en croire Souleymane Niang, suffire pour mettre le journaliste à l'abri de dérives. «Il faut que ce passage à l'école s'accompagne d'un code de conduite», explique le panéliste. Sociologue, Mor Faye explique les dérapages de la presse par la conjugaison de plusieurs facteurs. Au premier rang desquels, on peut évoquer le statut social du journaliste.

De l'avis de Mor Faye, les possibilités financières souvent limitées du journaliste, n'offrent pas à ce dernier d'autres alternatives pour faire face à ses obligations quotidiennes que d'être un «chasseur de perdiem». Ou simplement d'être à l'affût de certaines opportunités dont il pourrait tirer profit grâce à sa profession. «De tels comportements éloignent forcément le journaliste de son sacerdoce», regrette le conférencier. Mais pour mettre les journalistes à l'abri des besoins et les amener à mettre l'intérêt général au-dessus de leurs préoccupations matérielles, il faut, soutiennent les panélistes, que «le patronat investisse le monde de la presse».

Cette perspective trouve malheureusement des limites, de l'avis de Mor Faye. Selon lui, beaucoup de chefs d'entreprises «ont peur» de devenir des patrons de presse par crainte de gêner le pouvoir au risque d'en subir les foudres. Et le sociologue de regretter que le beau rôle joué par la presse dans la consolidation de la démocratie dans certains pays africains, n'ait pas prévalu jusqu'à présent. La meilleure façon pour la presse de contribuer à l'équilibre social, note-t-il, c'est d'opter pour «l'éthique de la responsabilité» en lieu et place de «l'éthique de la conviction».