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Abdou Diouf à l'Université de Reims : ‘ Les barbelés, les camps de rétention, les politiques de quotas ne feront rien contre la force du désespoir ’

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Abdou Diouf à l'Université de Reims : ‘ Les barbelés, les camps de rétention, les politiques de quotas ne feront rien contre la force du désespoir ’
Le président Abdou Diouf semble convaincu que toutes les mesures prises contre l'immigration sont vouées à l'échec si la misère continue de sévir dans les pays sous-développés. Il a fait cette déclaration, avant-hier, au Palais des Congrès de Reims où il recevait le titre de docteur Honoris Causa de l'Université de Reims Champagne-Ardenne. Pour lui, ‘les barbelés, les camps de rétention, les politiques de quotas ne feront rien contre le désespoir’ des peuples démunis. Il a reçu le diplôme des mains du président de l'Université de Reims en présence de plusieurs personnalités parmi lesquelles Amath Dansokho, secrétaire général du Pit, Sidiki Kaba, président honoraire de la Fidh, Babacar Néné Mbaye, ancien ministre du récipiendaire.

(Correspondant permanent à Paris) - L’ancien président de la République du Sénégal et actuel secrétaire général de la Francophonie, Abdou Diouf a été fait, depuis avant-hier, docteur Honoris Causa de l’Université de Reims Champagne Ardenne où sont inscrits de nombreux étudiants francophones, notamment sénégalais. Et la tribune de la cérémonie a permis à l’ancien chef de l’Etat sénégalais de réaffirmer certaines vérités. Il s’est fait le porte-parole des pays en développement qui croulent sous le poids de la pauvreté aggravée par la crise économique et financière. Il a rappelé que 1 milliard de personnes n’ont pas d’eau potable. Sur le plan de l’éducation, Abdou Diouf signale que 43 % des garçons et 50 % des filles ne vont pas à l’école. Sans compter que dans les pays en développement, les populations voient leurs revenus baisser de 20 %. Alors, pourquoi ‘des millions d’hommes, sans avenir, ne se pressent-ils pas déjà aux portes des pays de cocagne, de l’eldorado ?’, martèle le président Diouf. Avant d’avertir que si rien n’est fait, ‘les barbelés, les camps de rétention, les politiques de quotas ne feront rien contre la force du désespoir’.

Cette sortie du président Abdou Diouf rappelle celle qu'il avait faite alors qu'il était en exercice. Il soutenait, alors, que tant que la situation de pauvreté s'aggravait dans les pays en développement, notamment en Afrique, même si l'Occident mobilisait toutes ses armées aux frontières, cela n'empêcherait pas l'émigration.

Pour le secrétaire général de la Francophonie, ‘jamais, nous n’avons été aussi dépendants des uns des autres’. Et ‘la plupart des problèmes majeurs qui engagent le devenir de l’humanité et du bien commun mondial sont, en effet, devenus des problèmes transnationaux qui ne peuvent que très partiellement être résolus à l’échelle des Etats Nations’. Il s’agit par exemple ‘de la protection de l’enfant, des grands enjeux technologiques et bio-éthique, de la lutte contre les pandémies, de la maîtrise de l’avenir démographique, de la lutte contre le terrorisme international ou du crime organisé’, énumère le successeur de Léopold Sédar Senghor.

Pour Abdou Diouf, ‘la légitimité autoproclamée de quelques-uns à prendre des décisions et à adopter des normes qui déterminent l’avenir de tous ne résistera pas à la révolte naturelle qui gronde ici ou là et dont on aurait tort de mésestimer la capacité de déstabilisation’. Une allusion implicite surtout au sommet du G20 tenu en Angleterre pour trouver des solutions à la crise économique et financière qui frappe la plupart des pays développés et dont les répercussions négatives sont ressenties dans les pays en développement. Alors, ‘être membre de la francophonie, c’est refuser ces réalités intolérables, c’est refuser le creusement des inégalités, les dérives d’une mondialisation débridée ; c’est refuser la confiscation du pouvoir à l’échelle planétaire par quelques pays ou groupe d’intérêts’, dénonce le secrétaire général de la Francophonie qui rate rarement l’occasion de mettre en avant l’institution qu’il dirige. Même s’il précise que les membres de l’Oif ne sont ‘ni plus ni moins’ vertueux.

Pour ceux qui pensent encore que l’Oif est ‘une organisation repliée sur elle-même, vouée à la défense rétrograde d’une langue dans un monde enclin au nom du progrès, mais aussi du profit, à la standardisation linguistique et culturelle’, Abdou Diouf est d’avis contraire : ‘Nous réfutons cette uniformisation. Nous nous battons et nous agissons pour que le français reste la langue de création, du commerce, de l’enseignement supérieur et de la recherche, du droit ; pour que le français reste une langue officielle et de travail à l’Onu, à l’Union européenne, à l’Union africaine, non pas seulement pour nous-mêmes, mais avec l’objectif que toutes les langues et toutes les cultures soient respectées et valorisées dans leur diversité et leur génie propre parce qu’il y va de la préservation du patrimoine de l’humanité, mais de la démocratisation des relations internationales et de la paix.’

Prenant auparavant la parole, le président de l’Université de Reims Champagne Ardenne, Richard Vistelle, a qualifié son nouveau docteur Honoris Causa ‘d’homme exceptionnel d’un humanisme indéfectible’. Alexandre Steyer, recteur de l’Université de Reims, chancelier des Universités, Recteur de l’Université de Reims dira d’Abdou Diouf qu’il est ‘un homme d’action, ancré sur un territoire, sur un sol, un qui est le Sénégal, ensuite l’Afrique et la terre entière’. ‘Vous nous honorez de votre présence beaucoup plus que vous n’êtes honoré. Dans vos actions, nous avons vu un homme du présent, un homme pleinement universitaire, un homme de pensée. Son excellence, vous êtes l’alliance entre la pensée et l’action. Le 15 mai, nous remettrons à tous les doctorants de l’Université Champagne Ardenne leur diplôme de doctorat, et je vous citerai pour eux comme un modèle’, ajoutera-t-il.

La charge de l’éloge du président Diouf reviendra à deux personnes : le Doyen de la Faculté de Droit et Sciences politiques Olivier Duperon et le Pr Albert Bourgi qui enseigne à cette université. Ils déclineront les différentes actions et fonctions du récipiendaire lorsqu’il était président de la République. Pèle-mêle, la politique de la décentralisation, le multipartisme, la campagne pour l’instauration de la Cour pénale internationale et la campagne menée contre l’apartheid qui sévissait en Afrique du Sud. Mais la défaite à l’élection présidentielle de 2000 n’a pas été occultée. Elle a permis pour la première fois en Afrique francophone, rappelle Albert Bourgi, la transmission démocratique du pouvoir. ‘Ce fut un choc et une défaite durement ressentis par vos partisans et nombre de vos amis au Sénégal, comme ailleurs en Afrique et dans le monde, vous l’aviez, vous, considéré, Monsieur le Président, et à juste titre, comme un événement normal venant conforter l’exception sénégalaise en matière de démocratie’, raconte Albert Bourgi. Ce dernier croit que le 19 mars 2000 inflige ainsi ‘un cinglant démenti à tous ceux qui, et ils sont hélas nombreux, persistent dans l’idée que la démocratie ne serait pas compatible avec la culture africaine, voire serait un luxe pour le continent africain’.

Faisant face à Abdou Diouf, assis entre le président et le recteur de l’Université de Reims, Albert Bourgi dira : ‘Pour tous les actes que vous avez posés tout au long de votre parcours et qui donnent tout leur sens à vos convictions, l’Université de Reims Champagne Ardenne s’honore de vous rendre hommage, et à travers vous, de saluer une Afrique debout, une Afrique qui crée, une Afrique qui peut et veut occuper toute sa place dans le concert des Nations’.

 



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