Le témoignage saisissant du père d'un terroriste du Bataclan

Azzedine Amimour est le père de Samy, l'un des trois terroristes du Bataclan. Invité sur le plateau de l'émission hollandaise "RTL Late Night", l'homme est revenu sur le parcours chaotique de son fils jusqu'à sa radicalisation. Il a aussi été confronté à deux victimes du Bataclan. "Je n'ai jamais eu de problèmes avec lui. C'était un garçon normal", dit Azzedine pour parler de son fils. Jusqu'au jour où, lentement mais sûrement, Samy Amimour a basculé par l'islam radical.

"Sa radicalisation a commencé quand il a rencontré un voisin, que moi-même j'ai rencontré. Il était venu me parler d'islam. Je lui ai dit que je connaissais ça mieux que lui. Il était ensuite allé voir ma femme qui a eu la même réaction. Et puis il a rencontré Samy, qui est le type gentil, qui aime rendre service, qui aime écouter, ... Et donc il est influençable. Et puis après, c'est la montée... Il y a plusieurs facteurs qui entrent en compte.

" Les mauvaises fréquentations de Samy Amimour ont contribué à le faire basculer selon son père. "Ils étaient trois copains et l'un de ces copains avait hébergé une personne qui était fichée par la police. Un jour, la police s'est présentée à 7h du matin au domicile de ces trois copains. J'étais là quand ils ont ramené Samy. Ils ont cassé la porte, cela n'a pas été fait d'une manière douce mais je le comprends. C'était la première fois, avant le Bataclan, qu'il a commencé à se radicaliser. En sortant, je l'ai regardé et il m'a regardé. Je lui ai dit: "Samy, qu'est-ce qui se passe?" Il m'a dit: "Papa, je n'ai rien fait".

Et puis j'ai vu son regard, car ma femme et moi étions menottés dos-à-dos. Ça l'a travaillé." "Pas seulement à la mosquée" Amimour a alors passé quatre jours en détention et son père s'interroge sur le traitement qui lui a été réservé. "Quand il est sorti, il ne voyait pas les choses de la même façon. La radicalisation ne commence pas qu'à la mosquée." Les longues discussions avec son fils ont été difficiles. "J'ai essayé de lui parler mais ce n'est pas facile. Il ne faut pas le brusquer en lui disant: "Ce n'est pas bien ce que tu fais". Il ne faut pas crier. Ça ne marche pas cette méthode! Au départ, il voulait partir en Afghanistan.

Je l'ai écouté. J'ai essayé de lui expliquer que j'ai voyagé à travers le monde, que je connaissais le monde et que l'Afghanistan n'allait rien lui apporter. Il voulait apprendre l'arabe et la religion. Je lui ai expliqué qu'en Afghanistan on ne parlait pas arabe... Après, il a changé d'avis mais il était complètement instable. Il voulait partir au Yémen. Petit-à-petit, j'ai réussi à l'orienter vers l'Egypte. J'étais content car c'est un pays que je connais." Azzedine Amimour a même voyagé avec son fils jusqu'à Dubaï. "Je l'ai ramené à Dubaï car je me suis dit que là-bas, il allait changer complètement. Je considère que c'est un paradis terreste.

Il n'y a pas de chômage, c'est toujours propre, il n'y a pas de racisme alors qu'il y a 80% d'étrangers, il n'y a pas de taxes, c'est le pays le plus sécurisé au monde, ... Nous étions dans un hôtel cinq étoiles. Mais il était déjà très impregné par les images qu'il voyait à la télévision. Au petit déjeuner, il ne prenait qu'un jus d'orange. Il me disait qu'il y avait des gens qui ne mangeaient pas. Vous voyez dans quel état d'esprit il se trouvait... J'ai tout essayé. Je vais vous dire une chose: cela peut arriver à n'importe qui."

"Nous ne sommes pas en colère contre lui"

Sur le plateau, Bob et Ferry ont écouté attentivement le discours du père de Samy Amimour. Ils étaient tous les deux présents au Bataclan le 13 novembre 2015. "Nous ne sommes absolument pas en colère contre lui", disent-ils. Bob voulait absolument rencontrer le père du terroriste. "J'avais une petite idée de comment cet homme devait se sentir et cela s'est confirmé. Comme nous, c'est une victime. D'une autre manière, peut-être de plusieurs manières. Je voulais le rencontrer pour moi, mais aussi pour retirer quelque chose de positif ce qui est arrivé. Il y a déjà suffisamment de colère et de mauvaises choses actuellement. Si nous voulons trouver une solution ensemble de manière constructive, je veux y contribuer.

" Ferry est du même avis que son compère. "Je veux dire à cet homme que je ne suis pas du tout en colère contre lui. Nous ne lui en voulons pas. C'est terrible pour un homme de voir son fils se radicaliser. Il a reçu une bonne éducation, il a fait des études et malgré ça, il arrive quelque chose comme ça. Je trouve ça chouette de pouvoir lui parler et surtout de pouvoir le lui dire. J'espère que nous allons encore pouvoir nous rencontrer." Pour Azzedine aussi, le contact avec les survivants est important. "Pour essayer de trouver des solutions, pour essayer de comprendre. Je compte écrire un livre et peut-être qu'ils pourront m'aider. Ils ont vu les assaillants, ils ont vécu cela de l'autre côté."