Les Mauritaniens se rendront aux urnes demain pour élire leur nouveau président de la République qui mettra fin à dix-huit mois de transition militaire. Dans cette course vers le Palais Ocre, trois candidats sont pressentis pour accéder au second tour de la présidentielle.
Si l’on rencontre en plein centre de Nouakchott d’inattendus jardins verts vifs, par contre les grands parterres de fleurs qui entourent les différents palaces des grandes artères sont devenus pâles. Comme les devantures du stade olympique qui a fini d’avouer son infidélité à son lustre d’antan en trimballant ses couleurs au gré des conditions météorologiques. Mais, on a quand même de quoi se gaver les yeux sur la route Tefargh Zeina avec ses pistes vastes en lacets renforcés par des murets de pierres sèches. Et les Mauritaniens qui s’offrent un nouveau destin dans les urnes se sont réveillés, la bave à la bouche.
A quarante huit heures du scrutin présidentiel, la capitale mauritanienne a presque arrêté de fonctionner. Sa tête s’est tournée ailleurs. En cette matinée de vendredi, le soleil s’est presque révolté en tapant forts ses rayons avec en toile de fond une chaleur torride et un thermomètre qui affiche 43°, pour peut-être venir jouer aux troubles fêtes en ce jour de clôture de la campagne électorale. Mais, les Nouakchottois sont restés presque impassibles en continuant à vaquer à leurs occupations. Avec en première ligne les préparatifs du scrutin du dimanche qui suscite beaucoup d’attentes après dix-huit mois de pouvoir militaire, dirigé par le Colonel Mouhamed Ould Vall qui a tenu sa parole de se retirer du pouvoir. «Maintenant, nous allons retourner à l’ère civil. Même si je reconnais que les militaires ont fait du bon boulot, mais le pouvoir appartient aux civils. Donc, nous attendons avec impatience ce retour à la normale» savoure Moustapha Bâ avec son turban bien enlacé sur la tête.
Dans cet ordre de retrait des hommes du Colonel Mohamed Ould Vall, les voix se sont levées pour saluer le come-back des civils depuis le coup d’Etat d’Ould Taya le 5 août 2005. Et le retour des militaires dans les casernes. «Je suis ravi que les gens normaux reprennent la tête de l’Etat et les militaires doivent s’occuper de la sécurité du pays. Les rôles seront bien partagés par tout un chacun. Espérons qu’il n’y aura plus de confusion de genre» s’esclaffe un chauffeur de taxi.
Et dans un sursaut démocratique, la Mauritanie se prépare à se séparer du régime militaire sans peut-être une seule once d’amertume ou de déplaisir, pour introniser les civils. Dans les dédales grouillants du populeux quartier de la banlieue nord de la capitale, Bedkha, Andel Ould Diah a réuni ses fils pour savourer les dattes fondantes sur la petite nature en paille de son salon. A quelques heures du scrutin, sa demeure a une ambiance légère. Au fond de la tente, la photo d’un homme au visage pâle continue à peser lourd sur les flancs de son refuge. «C’est le meilleur Président pour la Mauritanie. En tout cas, je le souhaite vivement pour mon pays» sourit-il en indexant la barbe blanche d’Ahmed Ould Dadah, le candidat de l’Union des forces démocratiques et patriotiques (Ufp).
Incontestablement, le vieux briscard de la vie politique mauritanienne a la côte chez ses concitoyens. Sur les hauts parleurs accrochés au dessus des 4x4 ou des Mercedes qui traînent leurs carcasses sur des routes crevassées qui distillent les Zéghouar, le clan d’Ould Daddah étale sa suprématie logistique dans les rues de Nouakchott. Même les tentes semblent avoir donné leur allégeance au frère du père de l’indépendance mauritanienne (Moctar Ould Daddah). «Il est sage et intelligent. Il a une grande expérience politique et pacifique que tout le monde lui reconnaît. Donc, nous pensons que c’est lui le bon choix» justifie Fatou Sarr enveloppée dans son abbaiya noir.
De loin, une voie isolée avertie les partisans du leader de l’Ufp qui baigne dans une confiance dithyrambique. Car dans un autre coin où une fête populaire arrosée de thé est promue, c’est dans le quartier, dans la partie Nord de l’infinissable Téfrangh Zeina. C’est le fief de Zeina Ould Zeidane, un candidat indépendant qui bénéficie d’une côte de popularité presque insaisissable. Ethman Varah prédit : «C’est l’homme qui est capable de redresser ce pays. Il l’a montré quand il était directeur de la Banque centrale de la Mauritanie. Il est jeune et bardé d’expériences. Je vote pour lui.» L’allusion arrache un sourire à une autre personne estampillée Zeidane : «Le choix est vite quand je verrais le bulletin unique. C’est Zeidane le meilleur. Il est le seul à pouvoir assumer cette transition.»
Dans ce duo que les observateurs politiques du pays ont déjà placé au deuxième tour de la présidentielle, le troisième larron reste Sidi Mouhamed Ould Cheikh. Le dernier ministre de la Pêche du dernier gouvernement d’Ould Taya dispose d’une large part de sympathie chez ses concitoyens. Avec les dizaines de mouvements de soutiens qui escortent sa candidature, le 11 mars peut augurer une surprise. Ses souteneurs sont convaincus de son arrivée au Palais Ocre. «Vous savez dans ce genre de situations, le pays a besoin de sages et des personnes expérimentées pour terminer une transition. C’est vraiment important de le confier à Sidi. C’est un homme de dialogue, d’ouverture et de paix», décline Leila Sahir en train de goûter à son verre de thé.
En tout cas, les profils déversent et la Mauritanie devra choisir son destin civil dés demain. Aux urnes de ressortir le meilleur profil.
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