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"On se sent inutiles" : la frustration des politiques confinés à cause du coronavirus

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"On se sent inutiles" : la frustration des politiques confinés à cause du coronavirus
Comme des millions de Français, les élus découvrent la vie cloîtrée entre quatre murs, confinés à cause de l'épidémie de coronavirus. Une assignation à résidence qui ne les empêche pas de faire leur travail, même s'ils aimeraient pouvoir faire plus.

Même elle a dû se résoudre au confinement. Danielle Simonnet, infatigable élue de terrain du XXe arrondissement de Paris, de tous les combats et toutes les mobilisations sociales, s'est retranchée chez elle en application des consignes du gouvernement face à l'épidémie de coronavirus qui a fait 260 morts et contaminé au moins 9.134 personnes en France. Tout juste a-t-elle eu le temps de repasser à son local de campagne lundi matin pour récupérer ses affaires avant l'entrée en vigueur de la restriction de déplacement. Repos forcé. "Mes proches qui se moquent de moi en disant que je ne tiens pas en place en sont pour leur compte", s'amuse-t-elle. Bruno Bonnell, député La République en marche du Rhône, ne dit pas mieux : "J'ai retrouvé mes vieux réflexes de prof de maths et je fais cours à mes enfants, sinon je m'organise avec ma femme, c'est d'ailleurs à son tour de faire le tour du pâté de maisons." Un député LR ironise : "Je peux au moins sortir courir, ce qui va me permettre de perdre mes quelques kilos en trop." Une légèreté de façade qui masque difficilement leur inquiétude. Immense. "C'est ce que l'on redoutait tous, confie un élu de droite accablé, ce qui se passe en France est d'une extrême gravité. Je ne suis pas optimiste."

Assignation à résidence

Amenés à rencontrer chaque jour de nouvelles personnes, serrer des dizaines de mains, les politiques font partie des professions les plus lourdement touchées par le covid-19 : deux ministres, dix-huit députés, et des élus de tout bord, dont le président des Républicains Christian Jacob ou le maire de Nice Christian Estrosi, ont été testé positifs au virus asiatique. La crise du coronavirus astreint les politiques au plus strict confinement. Une assignation à résidence plus ou moins bien acceptée par ces animaux sociaux qui, pour certains, étaient encore en campagne la semaine dernière. "On se sent inutile, c'est un peu frustrant tout d'un coup quand tout s'arrête", relate Danielle Simonnet. Face à cette situation inédite, les élus s'adaptent : ils ont renvoyé chez eux leurs équipes qui travaillent à distance, et un petit nombre de députés de la région parisienne a été mobilisé pour voter les deux lois d'urgence du gouvernement contre l'épidémie de covid-19. Pour le reste, l'heure est au respect des règles de distanciation sociale. Les élus réduisent leurs déplacements et privilégient le téléphone, les visioconférences ou les incontournables boucles Telegram. Même le madré député de l'ouest parisien Claude Goasguen s'est mis à Whatsapp ! Quant aux expressions médiatiques, elles sont réduites au minimum. "Plus question de se rendre sur les plateaux de télé", souligne le député des Côtes-d'Armor Hervé Berville.

Les élus locaux, eux, organisent la résistance dans leurs territoires. Arrêtés municipaux, mobilisation des centres périscolaires, information des habitants... Ils se démènent pour tenter de limiter la propagation de l'épidémie. Sans compter leur temps. Depuis le premier tour des élections municipales, le maire de Maisons-Laffitte Jacques Myard n'a plus vu le jour ... ou presque. "Je passe mes journées entre mon domicile et la mairie", explique-t-il. "Tout reste à organiser au niveau local", pointe le jeune député LR Aurélien Pradié, élu municipal de la commune de Labastide-Murat, Coeur de Causse (Lot). Ces derniers jours, le parlementaire a passé son temps au téléphone pour organiser l'accueil des enfants des personnels de santé et superviser la livraison de repas à domicile des personnes âgées de sa commune. "On n'a plus le temps pour la politique politicienne, d'ailleurs on en a perdu le goût. Tout ce qui compte aujourd'hui, c'est le pratico-pratique", soupire-t-il. Dans certaines communes, les maires se retrouvent à faire la police quand leurs administrés prennent les consignes du gouvernement avec un peu trop de légèreté. "Rien que cet après-midi j'ai dû rappeler à l'ordre deux cyclistes qui se promenaient dans le parc de ma commune, d'autres font du cheval... Il y a un vrai problème de discipline et un un gros travail de prise de conscience à faire", regrette Jacques Myard.

Gravité

Face à leurs électeurs, les élus tentent de trouver le bon ton entre ré-assurance et gravité. "J'ai beaucoup d'appels de personnes qui ont un malade dans leur entourage, de chefs d'entreprises inquiets des conséquence de la crise. Je tente de les aider du mieux que je peux en leur détaillant ce qui va être mis en place par le gouvernement, comment cela peut les soulager et en leur disant qu'après toute récession, il y a un rebond économique", indique Bruno Bonnell. Aurélien Pradié, lui, n'hésite pas à tenir un discours de vérité devant ses administrés. "Parce qu'il n'y a pas eu de transition entre le moment où on leur disait que la crise n'était pas grave et celui, maintenant, où on leur annonce que c'est super grave. Cette épidémie a été trop banalisée", regrette le député. Certains, comme Claude Goasguen très enraciné dans le XVIe arrondissement de Paris, entendent mettre à contribution leur poste de député pour arracher des concessions économiques en faveur des commerces et des entreprises de leurs circonscription. "Il y a une très vive préoccupation parmi les commerçants et les artisans du XVIe arrondissement, dont certains s'attendent déjà à faire faillite", avertit le parlementaire.

Si la politique nationale est en pause, la période reste propice à la réflexion et ses inévitables plans sur la comète. Un député LREM, par exemple, cogite déjà sur la sortie de crise. Qu'il imagine... ambitieuse. "Il faudra frapper fort, bouleverser le champ politique, avec un gouvernement d'union nationale. Pourquoi pas Sarkozy Premier ministre ? Personne n'y a pensé... En tout état de cause, le match de 2022 face à Marine Le Pen est plié, Emmanuel Macron a déjà gagné. Il s'est imposé comme le père de la nation. Mais comme l'a dit le président de la République, il faudra tirer les conséquences de la crise. Prévoir un plan de relance, avec une forte coloration écologique, tout revoir, un peu comme le conseil national de la résistance au sortir de la Seconde guerre mondiale. Sur le plan européen par exemple, je ne vois pas comment on pourrait encore reculer sur les eurobonds [la mutualisation de la dette entre pays européens; NDLR] . Nous sommes en guerre !"


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