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Référendum : les Suisses ont rendu les armes

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Référendum : les Suisses ont rendu les armes

Les Suisses, passionnés d’armes à feu, se sont prononcés, dimanche, lors d'un référendum sur le durcissement de la législation en matière de contrôle. Le oui l'emporte à 64 %, selon les résultats quasi définitifs.

Certes, depuis la cuisante défaite de Marignan en 1515, les Suisses n’ont plus jamais pris les armes. Cela n’empêche pas la population helvétique de nourrir une véritable passion pour les fusils et autres pistolets semi-automatiques, notamment les adeptes du tir sportif, pratique très répandue dans le pays.

Problème, une loi découlant de mesures antiterroristes votée au parlement européen, visant à durcir les conditions d'acquisition de certaines armes, a obligé les Suisses à revoir leur législation en la matière. La population a donc été sommée de se prononcer, dimanche 19 mai, par voie de référendum, en faveur ou non d’un durcissement du contrôle des armes. D'après les résultats quasi définitifs, le oui l'emporte à 64 %.

Si les électeurs avaient rejeté un contrôle plus accru de la législation, ils auraient exposé le pays, – qui ne fait pas partie de l’Union européenne –, a une exclusion des accords européens de Schengen et Dublin auxquels ils appartiennent. Or sortir de l’espace Schengen et des accords de Dublin aurait eu des conséquences néfastes en matière de sécurité, de droit d'asile mais aussi dans le domaine du tourisme et aurait pu coûter "plusieurs milliards de francs suisses par an", selon les autorités fédérales.

Les passionnés du tir sportif ne désarment pas

Pour éviter un tel scénario, la Suisse n’avait d’autres choix que de se soumettre aux exigences de l’UE, mais les défenseurs des armes à feu n'entendaient pas capituler si facilement. La vive opposition du lobby des armes à feu ajoutée à celle des passionnés de tir sportif a d’ailleurs permis de réunir suffisamment de signatures pour déclencher un référendum.

Il faut dire que la culture des armes à feu est profondément ancrée en Suisse. Avec près de trois armes à feu pour 10 habitants, la Suisse se place au 16e rang des pays qui possèdent le plus d’armes au monde, selon le centre de recherches genevois Small Arms Survey.

Paradoxe, le pays n’a que très rarement connu de fusillades à grande échelle ou d'attaques terroristes. Contrairement aux États-Unis, qui détient le taux de possession d’armes le plus important au monde, le taux de morts violentes par arme à feu en Suisse est 15,5 fois inférieur à celui des Américains, selon les données du Small Arms Survey. La dernière tragédie meurtrière remonte à 2001 : 14 personnes avaient été tuées dans la ville centrale de Zoug.

Une nation "pacifique"

Cette contradiction n’étonne pas les spécialistes de la question. Selon Martin Killias, directeur de l'Institut de criminologie de l'Université de Lausanne, "ce qui compte ce n’est pas tant le nombre d’armes mais le nombre de personnes qui les détiennent. Or, en Suisse, le nombre de détenteurs d’armes est relativement faible", a-t-il expliqué au journal francophone suisse Le Temps, ajoutant que "les propriétaires d'armes suisses sont également pacifiques".

La forte culture des armes à feu en Suisse est étroitement liée à celle du service de défense nationale du pays. La plupart des hommes âgés de 18 à 30 ans sont soumis à un service militaire obligatoire comprenant trois semaines par an et sont autorisés à conserver l'arme qui leur a été attribuée à leur domicile. En résumé, "il y a globalement trois catégories de personnes qui détiennent des armes à feu dans le pays : les militaires et ceux qui ont fait leur service militaire, les passionnés de tir et les chasseurs. Mais il est presque impensable que quelqu'un achète une arme à feu pour protéger sa famille, par exemple", assure Martin Killias.

La Suisse détient le record du nombre de suicide par arme à feu

Bien que les fusillades soient très rares en Suisse, le taux de suicide par arme à feu est tout de même l’un des plus élevés d’Europe. Il est même trois fois supérieur à la moyenne européenne, selon un rapport diffusé à la télévision suisse RTS. On y apprend que la moitié des jeunes suisses qui se suicident utilisent une arme à feu, un record en Europe.

Brigitte Crottaz, députée socialiste suisse, voit d’un bon œil la nouvelle législation car elle pourrait enrayer cette triste réalité. "Les données l’ont prouvé : plus nous avons d'armes à feu, plus il y a de suicides", a-t-elle déclaré au Figaro.

Actuellement, pour détenir une arme en Suisse, il faut être un citoyen suisse âgé de plus de 18 ans, posséder une carte d'identité et ne pas avoir de casier judiciaire. Les armes à feu sont également divisées en catégories, chacune ayant des restrictions différentes.

Les nouvelles lois obligeront les passionnés de tir à prouver qu’ils se rendent régulièrement sur un stand afin d’obtenir une autorisation. Ceux qui en sont déjà propriétaires auront trois ans pour les déclarer aux autorités régionales. Les armes semi-automatiques avec des chargeurs de grande capacité seront également répertoriées comme "interdites". Les collectionneurs et tireurs sportifs pourront encore les acquérir en demandant une "autorisation exceptionnelle".

Un "diktat" européen, selon les opposants

Une législation "totalement inutile", s’insurgent les défenseurs des armes à feu qui y voient là une forme de "diktat européen", privant les Suisses de leur souveraineté nationale. Parmi eux, les membres de l'UDC, parti de droite populiste qui recueille le plus de suffrages dans le pays. Ils estiment "exagérées" ces disposition légales, qui supprimera à terme le droit de posséder une arme et enterrera le tir sportif. Ils jugent aussi possible de trouver une "solution pragmatique" avec l'UE pour conserver la tradition nationale.

Philippe Miauton, secrétaire général des Libéraux-Radicaux, n’est pas de cet avis. "Il ne s’agit pas d’un diktat, estime-t-il dans un entretien accordé à France 24. Je suis pour cette réforme qui touche peu de gens et concerne spécifiquement les armes dangereuses. Ce n’est pas par peur des armes, mais pour rester dans l’espace Schengen. La Suisse a déjà pu obtenir un certain nombre d’exceptions notamment avec son service militaire. J’estime que la législation n’entravera pas  la tradition suisse."

Les résultats du référendum lui ont donné raison. Tous les cantons ont glissé un oui dans les urnes à l'exception du Tessin, qui a rejeté la loi à 54,5 %. La loi sur les armes a, au contraire, été plébiscitée à Bâle-Ville (75 %) et Genève (72,8 %).



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