Enveloppes, sacs, tampons, rien n'échappe à la vigilance silencieuse des dizaines d'observateurs postés dans le lycée technique Maçka d'Istanbul, dans une ambiance solennelle et tendue.
Le dépouillement des bulletins de vote du second tour de l'élection présidentielle a débuté dimanche soir en Turquie, après la fermeture des bureaux à 17H00 heure locale (14H00 GMT) et les partisans de Recep Tayyip Erdogan comme ceux de son rival Kemal Kiliçdaroglu sont aux aguets.
L'issue du scrutin décidera si le président sortant, 69 ans dont vingt au pouvoir, est reconduit ou non pour un troisième mandat.
"On a appelé au calme avant la fin du vote", "avant le comptage des voix", explique Halis Firet.
Ce peintre de 56 ans est l'un des milliers d'observateurs déployés par le CHP (social-démocrate) du candidat de l'opposition pour ce second tour de l'élection présidentielle, le premier de la République turque centenaire.
"Il y eu des tensions dans la journée au sujet d'une enveloppe mal fermée" signalée par un partisan de l'AKP, le parti islamo-conservateur du chef de l'Etat sortant. Le ton est monté, le bulletin n'a pas été comptabilisé et la police a dû intervenir, assure-t-il, avant de prendre place dans une salle de classe.
Un des scrutateurs va chercher une avocate qui entre en protestant vivement contre une enveloppe qu'elle juge suspecte : celle-ci est mise de côté et non comptabilisée.
- Couleur moutarde -
Assis derrière un pupitre, doigts crispés sur son stylo, Halis Firet garde les yeux rivés sur les enveloppes couleur moutarde. Appuyés contre le mur, debout, avec le même visage sérieux, la même concentration, d'autres hommes observent les opérations sans mot dire.
A la mi-journée, Kemal Kiliçdaroglu avait enjoint ses partisans à rester près des urnes après la clôture des bureaux "car cette élection s'est déroulée dans des conditions très difficiles", avait-il relevé.
A la fermeture des bureaux, M. Erdogan a fait de même.
Le premier tour le 14 mai, qui avait donné une avance de 9,5% au président sortant, s'était déroulé de manière "compétitive" mais "limitée", du fait de "l'avantage injustifié" accordé par les médias officiels, avait estimé la mission commune de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et du Conseil de l'Europe.
Dimanche, après la fermeture des votes, la Commission électorale (YSK) a assuré n'avoir pas relevé d'incidents. Mais la tension reste palpable.
"Le deuxième tour de l'élection présidentielle est terminé. (...) Nous sommes maintenant parvenus à la phase la plus critique de l'élection. Nous protégerons les votes, les sacs de bulletins de vote et les procès-verbaux signés", a affirmé au cours d'une conférence de presse Faik Oztrak, le porte-parole du CHP, le parti fondé par Mustafa Kemal Atatürk.
"Vous suivrez et empêcherez toutes les irrégularités. Vous ne quitterez pas votre lieu de service. Personne ne doit bouger jusqu'à ce que les résultats soient définitifs", a-t-il ajouté.
Au lycée technique Maçka d'Istanbul, dans un quartier privilégié, Kemal Kiliçdaroglu est donné vainqueur dans l'une des urnes, sans déclencher de réactions dans la salle.
Car, simultanément, les premiers résultats fournis au niveau national accordent une avancé significative au président sortant après le dépouillement de plus de la moitié des bulletins.
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