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Airs du temps…

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Airs du temps…

Ah ! Cette fête … Le thème  retint mon attention : l’Armée  au service de la diplomatie. De l’épique « Ñani bañ na », hymne de Lat Dior à l’insolite « En passant par la Lorraine », la Musique principale des Forces armées  a effeuillé ses  partitions. Jazaaka de Borom, Touba, Kaaroo Yalla de  Khar Mbaye Madiaga ont fait tressaillir es chefs coutumiers et religieux. Un seul raté : « La  musique qui marche au pas »  oublia de prévoir « Auprès de ma blonde » pour l’accueil en fanfare de Gorgui et sa Vivi marchant triomphalement vers la tribune. Les  nostalgiques de la Coloniale  d’écraser une larme au souvenir du bon vieux temps où les leçons d’histoire commençaient par « nos ancêtres les Gaulois... » 

 

- « Si vous voulez l’Indépendance…Les anciens qui avaient retenu la leçon de  Ferdinand « Le vieux Nègre et la médaille », évitèrent l’offre de la France « qui donne de la main droite et retire (subrepticement) de la gauche ». Les « pères » avaient eu raison de se méfier…La dévoreuse nous a piqué l’or pour nous refiler le cuivre des clairons, cymbales, et trompettes de la fausse renommée. A la place d’une philharmonie qui ne nous exalte guère les sens, que n’a-t-on pincé koras, xalams, ritis, frappé les balafons, sollicité les junjungs du Sine ? Dans nos royaumes d’antan le Xiin-tambour de guerre galvanisait les troupes au front tandis que les instruments à cordes berçaient les veillées de  victoires.

En Afrique, défilés et parades devant une tribune d’officiels, pendant que la  multitude transpire au soleil, me  font toujours l’effet d’une « monarchisation » des institutions dites républicaines. Et l’on imagine aisément que tel chef  d’Etat africain se surprenne à murmurer : - Tout ça, c’est moi !

Il en va autrement lorsque l’indépendance est arrachée de haute lutte ; la fête devient alors l’affaire d’une nation et non d’un système qui se l’approprie, l’ordonnance sur du papier à musique et lui fait marquer le pas…Un ! Deux ! Droite ! Gauche !

Infanterie ou forfanterie ?  Au défilé-vitrine, tout ce que contrôle l’Etat a été astiqué, remis à neuf.  Pour quel client ? « Buleen ko wanteer-ne le bradez pas » supplie Abdoulaye Mbaye, le musicien aveugle qui de désole du bradage sans crainte ni remords de notre patrimoine.

Malgré le faste déployé, le peuple ne s’est senti nullement concerné ; il n’y a pas eu l’élan spontané de liesse populaire. Ni à Medina Sabakh ni au Fouta et pas plus à Guediawaye, Guet Ndar qu’à Fongolimbi ou Marsassoum.

 

Avant l’Indépendance, nos fêtes nationales, en dehors de Tabaski et Korité,  étaient 14  Juillet (prise de la Bastille), et 11 Novembre (Armistice). Les Blancs réussissaient la prouesse de s’amuser à nos dépens tout nous faisant accepter aussi bien supériorité de la France civilisatrice que l’immaturité de nous autres Nègres. A ces fins, s’organisaient des festivités auxquelles nous participions, avec une généreuse naïveté. Il  y avait mât de Cocagne, peau noire-masque blanc et course de vitesse en sac.

M’en vais les raconter aux générations nées  après le cha cha cha.

Mât de cocagne : poteau d’une centaine de mètres tout  enduit de cire et autour duquel est actionné un cerceau d’où pendent jouets d’enfants, bibelots tenus en laisse. Le cerceau, monte et descend chaque fois que le grimpeur tend le bras vers ses convoitises, tout en essayant de s’agripper sur le mât luisant dont il risque de dégringoler à chaque mouvement.

Peau noire, masque blanc : pièces de bouréy, fiftine ou tank (monnaies anciennes) à retirer du fond d’une calebasse de farine, avec les dents ; contraste hilarant de visage noir sous masque blanc et souriant de toutes ses dents après avoir pêché deux ou trois sous. Même image bête et méchante que s’offrent, sur vidéo, les touristes jetant des pièces de CFA ou d’Euros aux petits nageurs de Gorée plongeant du haut de la  Chaloupe de Gorée accostant sur l’Ile.

Course de vitesse en sac : courir, le corps fourré, jusqu’à la taille dans un sac de sisal retenu d’une main. Et ça sautille, tombe, retombe… Chûtes saluées par des fous rires.  Les  premiers, sur la ligne d’arrivée, remportent un sac de mil.

Ils trouveront

Tous en rentrant

Le couscous

Dans les calebasses

Pilon Pan Pan

Pilons gaiement ! 

 

Les jeux ont changé de forme et contenu malgré et surtout avec l’Indépendance mais à bien y réfléchir, c’est toujours dans l’air du temps de tenir la dragée haute, rouler dans la farine, claudiquer la démarche pour arriver à ses fins.

 Quelle parade ?

C’est cécité idéologique que de vouloir éblouir son peuple avec des vernis  d’opulence. Parade pour parade, l’ensemble instrumental, un bataillon de  rappeurs, deux ou trois écuries de lutteurs dansant et déclamant leurs palmarès, quelques amuseurs du genre Sa Neex, Koutia, le duo Sylla Mougneul-Tonton Ada auraient largement suffi et à moindre frais. A la place des vingt coups de canons qui effarouchent poules et cabris, je suggère de vibrants sarxole moins polluants, tout comme autrefois, à l’arrivée du roi.

Le lendemain même de la fête, les écoliers rangent ou retournent les uniformes de circonstance flambant neufs pour retrouver, chacun, la tenue qui le différencie socialement de l’autre. Pourtant, chez nos cousins du tout petit territoire gambien, élèves et écoliers portent l’uniforme de rigueur qui rase les complexes entre gosses de riches en Nike ou Tommy Jeans  et  ceux qui dissimulent leurs chaussures plastiques sous les pupitres.

Dommage que les fastes d’une matinée fassent oublier la réalité des établissements scolaires, infrastructures sanitaires où le minimum du quotidien fait cruellement défaut.

« Def sunna, bayyi farata… » Ça vous dit quelque chose ?

 

Amadou Gueye Ngom

Critique social

 

 

 

 



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