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MOR BA, COMEDIEN ET Kinésithérapeute «J’étais le masseur de Macky Sall»

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MOR BA, COMEDIEN ET Kinésithérapeute «J’étais le masseur de Macky Sall»

C’est dans une modeste demeure située à la Sicap Liberté 5 où il vit avec ses enfants et petits-enfants que l’artiste comédien Mor Bâ nous a reçus. Son talent d’imitateur de la voix du défunt Président Lépolod Sédar Senghor a participé à sa notoriété. Aujourd’hui qu’il a disparu de la scène, il se concentre sur son métier de masseur. « Le Pays au Quotidien » est allé le rencontrer pour retracer son parcours.

Vous faisiez partie, il y a une vingtaine d’années, des barons de la comédie. Que devenez-vous ? 

Ah, je suis là. Vous savez, le public sénégalais aime les nouvelles découvertes. Ce sont les jeunes comédiens qu’on met en avant en nous oubliant. Mais, nous sommes toujours là. Le talent est encore là. Je suis bien vivant.

Mais, on a l’impression que vous êtes mort artistiquement …

Moi mort, non ! Vous savez, comme tous les artistes comédiens, la plupart de nos prestations sont sur la base de contrats, ce sont les gens qui nous sollicitent. S’il y a quelqu’un qui a besoin de moi, je peux jouer pour lui. La preuve, lors des foires ou de certaines manifestations, quand on m’appelle, je viens faire de l’animation.  D’ailleurs, je reste créatif avec de nouvelles comédies.

Comment appréciez-vous, par rapport à votre temps, la comédie aujourd’hui ?

La comédie est rétrogradée. Les comédiens font et disent du n’importe quoi à la télévision. Vraiment, cela me fait mal quand j’entends des artistes utiliser un langage insolent dans leurs sketches, alors qu’ils sont suivis par des enfants et de grandes personnes. Le comédien doit rester un modèle. Nous, les anciens, nous évitions d’être incorrects. Ce qui ne nous empêchait pas d’amuser beaucoup les gens. Moi, depuis le temps de Senghor, je fais de la comédie et je n’ai jamais versé dans l’incorrection. C’est pourquoi de grandes personnalités m’appréciaient et aimaient mes prestations.

Mais, comment le masseur de profession que vous êtes est devenu comédien ?

Justement, c’est grâce à mon métier de masseur que je suis entré au Théâtre National Daniel Sorano. J’allais là-bas pour des séances de massage. J’ai commencé à travailler à Sorano en 1969, quand j’ai été libéré de l’armée. Mes premiers actes en comédie, c’est  un jour où j’ai imité la façon de parler du premier Président Léopold Sédar Senghor et Mansour Mbaye. Quand les gens ont suivi cette prestation, ils ont beaucoup apprécié et j’ai été copté à Sorano pour jouer la comédie. C’est venu naturellement je ne savais même pas que j’avais ce talent. C’était juste un jeu pour moi quand j’imitais les gens. Et puis j’étais le seul à pouvoir imiter le Président Abdou Diouf. D’autres ont essayé mais ils ne l’ont pas réussi. (Il coupe et prend l’accent de la voix du Président Diouf en rappelant les propos qu’il lui avait dit lors d’un arbre de Noel) : « Mais vous êtes un grand artiste, le fait de prendre la voix de quelqu’un, ce n’est  pas facile, même Famara Sagna qui est assis à mes côtés, vous l’avez imité ». J’ai imité beaucoup de personnalités dont la voix n’est pas facile à imiter, comme Mamadou Diop Decroix.

La comédie est donc un don chez vous…  

C’est un don du ciel. Même le français que je parle, je ne l’ai appris nulle part. Mon père faisait partie des parents qui refusaient d’amener leurs enfants à l’école, car ils pensaient que le fait d’apprendre le français nous déracine.

Étiez-vous le meilleur comédien humoriste de votre génération ?

Non, je pense que feu Sanokho était le meilleur d’entre nous. De tous les comédiens du Sénégal, même de la dernière génération, il n’y a personne qui lui arrive à la cheville. Malheureusement, il n’a pas exploité de façon professionnelle tout le talent qu’il avait.

Avez-vous une carrière internationale en tant que comédien ?

Oui, j’ai quand même beaucoup voyagé. Je suis parti jusqu’en Union Soviétique. J’ai même visité la tombe de Lénine à la Place Rouge. Avec la troupe de Sorano, je suis allé en Roumanie, aux Martiniques, à Point à Pitre et en France où j’ai même épousé une blanche. J’ai aussi participé à différents festivals en Tunisie, en Algérie, etc.  

Hormis le fait de l’imiter, quelles relations aviez-vous avec le président Senghor ?

Senghor, c’est moi qui l’aimais personnellement mais vraiment il n’a rien fait pour moi. Il ne m’a pas donné de l’argent ni rien, je n’ai jamais eu cette occasion.

D’aucuns disent que vous étiez son humoriste et qu’il vous invitait souvent au Palais. Qu’en est-il ?

Non c’est faux. Je l’imitais en public parce que je l’aimais bien mais il ne m’a rien donné et je n’ai jamais eu d’audience avec lui.

Et pour les autres Présidents  de la République?

Abdou Diouf, j’ai animé une fois un arbre de noël pour lui, il m’a remis de l’argent qui est passé entre plusieurs mains avant d’arriver à moi. C’est un sergent qui m’a appelé et m’a donné 110.000 frs mais je sais que c’était plus que cela.  Quant au Président Abdoulaye Wade, c’est lui qui m’a le plus aidé. Si j’avais un problème, j’appelais son aide de camp, le colonel Bara Cissokho qui me mettait en relation avec lui. D’ailleurs, quand ma femme qui est décédée devait subir une opération en France, c’est lui qui m’a remis 11 millions pour la prise en charge. Vraiment, je le remercie beaucoup. Même s’il ne m’a jamais reçu en audience, il m’a beaucoup aidé par l’intermédiaire de son proche entourage. Le Président Wade m’a avoué lui-même que j’étais le seul comédien à pouvoir le faire rire. Et puis il faut le reconnaitre, il aidait beaucoup d’artistes ici qui étaient dans le désarroi. J’ai entendu deux artistes comédiens dire à la 2STV, lors d’une émission, que le Président Wade n’a rien fait pour eux alors que c’est faux.

Est-ce que vous avez une relation particulière avec l’actuel Président Macky Sall ?

Macky est un grand ami. Du temps où il était le Directeur général de Petrosen, c’est  moi qui lui faisais ses séances de massage et même pour certains membres de sa belle-famille. J’étais le masseur de Macky Sall. Je peux témoigner que c’est quelqu’un de bien. Je vous raconte une anecdote. Le jour de l’enterrement du père de Baïla Wane, qui était un ami de mon père, Macky Sall, qui était Premier ministre, m’a offert 175.000 Fcfa. Son geste était suivi par Serigne Abdoul Aziz Sy Junior et Baïla Wane.

En temps que masseur, le Président Macky Sall est-il toujours votre client ?

Non, non cela fait longtemps que je ne le masse plus. C’était du temps où il était directeur de Petrosen.

Continuez-vous à pratiquer le massage ?

Oui, bien sûr ! Ceux qui me connaissent m’appellent des fois chez eux pour des massages et j’ai n’importe quel genre de client. Vous savez, la comédie est un don. Mais, le massage, je l’ai appris depuis 1957, à Dakar, chez un professeur vietnamien. Parmi mes clients, il y a des marabouts. Je quitte Dakar pour leur faire des séances de massage. Vous savez le massage n’est pas un simple geste. Il y a des connaissances mystiques qui l’accompagnent. Par exemple, les soins liés aux os sont liés mystiquement au charognard. Il y a des mots que je récite pour demander la permission à cet animal. Je ne peux pas entrer dans les détails. Malheureusement, je vois que quiconque se lève aujourd’hui et devient masseur.

Vous pratiquez la médecine traditionnelle aussi, est-ce  parce que la comédie ne marche pas que vous êtes tourné vers cette pratique ?

Non c’est une pratique que j’ai héritée de mes parents. La mère de la chanteuse Fatou Laobé qui est ma sœur était d’ailleurs meilleure que moi dans cette pratique de la médecine traditionnelle. Je ne veux même pas faire de la pub sur ça, mais les gens qui me connaissent savent de quoi je suis capable dans ce sens.

Et vous soignez quel genre de maladies exactement ?

Non je ne veux pas entrer dans les détails, mais je sais de quoi je suis capable.

Vous faites aussi de la voyance ?

Non je n’entre pas dans ces trucs-là.

Revenons au sujet des artistes dont vous faites partie. Pensez-vous que votre secteur marche bien ?

Non, parce que les artistes ont toujours du mal à vivre de leur art.

Avez-vous de l’espoir avec le nouveau ministre Youssou Ndour ?

Bon, (il marque une petite pause et cherche les mots), Youssou Ndour, en tant que ministre, je pense qu’il est en train de faire son devoir de citoyen. Mais moi, je pense que sa place est dans la musique où il était. Le statut de ministre ne lui profite pas trop, contrairement à celui de musicien. Son chiffre d’affaires pour un seul spectacle vaut plus que son salaire de ministre. Mais puisqu’il veut apporter quelque chose de plus dans la Culture, je l’encourage.

Mais qu’attendez-vous de lui en tant que ministre de la Culture ?

En tout cas, on a été déçu par les ministres de la Culture qui l’ont précédé. Le seul qui a commencé à bien travailler du temps d’Abdoulaye Wade, c’était Dr Serigne Mamadou Bousso Lèye. S’il avait continué, il aurait beaucoup fait pour la Culture. Mais je veux que Youssou Ndour voie ce qu’il était en train de faire pour les artistes et suivent ses pas.

Parlons de votre style marqué avec votre chéchia bien particulière et votre mobylette !

C’est vrai que c’est avec ce style qu’on me connait, mais c’est pour être très pratique. Vous savez avec ce genre d’accoutrement, je peux entrer dans n’importe quel milieu, je peux même l’amener à la Présidence ! Ce genre d’accoutrement, avec le bonnet, c’est ce qu’on appelle « Ndobiné » en wolof, c’est un accoutrement complet. Mon bonnet incliné va dans tous les sens.

On vous voit toujours sur votre vieille mobylette. Qu’est ce qui vous lie ?

Depuis 1965, je conduis cet engin. C’est pour me déplacer plus vite. C’est vrai que maintenant, j’ai un scooter que Ckeikh Amar m’a offert, mais je garde toujours cette vieille mobylette. Si je conduisais ce vieil engin, c’est parce que mes moyens limités ne me permettaient pas de conduire autre chose.

Vous êtes donc pauvre à ce point ?

Mais, les artistes n’ont rien du tout. C’est encore pire chez les artistes comédiens et ceux qui font du théâtre. Nous avons du mal à assurer la dépense pour les trois repas quotidiens. Nous n’avons pas d’argent gardé dans nos comptes, les artistes que nous sommes vivent au jour le jour.

Donc la comédie ne vous rien apporté ?

Rien du tout, je vous dis ! Heureusement que moi, j’ai mon propre métier en tant que masseur. Mais, ceux qui ne comptent que sur leur art sont dans le désarroi. Nous passons toute notre vie à louer, on ne peut même pas avoir notre propre maison.

Vous êtes une famille d’artistes, il me semble ?

Oui j’ai deux filles qui sont danseuses : la danseuse de Fatou Guéwel Gagnesiry et ma cadette (Ndéye Arame) qui est avec Pape Diouf. Mon fils, lui, joue à la Kora pour Fatou Laobé qui est ma nièce.

Le fait que vos enfants soient aussi des artistes  ne vous pose aucun  problème?

Non, je n’y vois aucun inconvénient.

Vous avez combien d’enfants, il parait que vous en avez beaucoup ?

(Rires) ! Ah j’en ai vraiment beaucoup. Je remercie le bon Dieu. Je dois en avoir en tout cas une vingtaine. J’ai même un enfant métis âgé de 26 ans, issu de mon mariage avec une Française. Il vit en France. 

FAWADE WELLE (Stagiaire)

 



4 Commentaires

  1. Auteur

    Serigraph

    En Octobre, 2012 (11:26 AM)
    on comprend pourquoi le lobby homosexuel monte en puissance
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  2. Auteur

    Ibou Ngaté

    En Octobre, 2012 (12:06 PM)
    Mor Ba est non seulement un artiste comédien patenté mais aussi bien connu pour son humilité qui fait de lui un homme facilement abordable. Il sait porter ses habits d'homme du peuple, prêt à toujours faire rire ceux-là qui l'approchent ou l'entourent à l'écoute d'anecdotes que seul il a le secret de raconter par souci de se montrer, un laps de temps, bien au service du public sans rien attendre de lui. Il sait se servir de son talent tout autant qu'il reste fier dans une humilité qui lui vaut l'amour et l'estime de beaucoup de sénégalais. On le voit décrire des situations assez regrettables propres aux artistes de sa générations comme à ceux d'aujourd'hui, mais dont il se garde d'imputer la responsabilité à qui que ce soit.C'est cela aussi une marque de sa grandeur qui l'amène tout autant à louer ceux-là qui ont eu à l'aider parce que conscients de son talent. Voilà une race en voie de disparition et c'est bien dommage pour les générations à venir! Merci
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    Auteur

    Nopmacky

    En Octobre, 2012 (16:22 PM)
    humm! moi je le masseré bien nontre cher président...
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    Auteur

    Les Beaux Yeux De Macky

    En Octobre, 2012 (18:58 PM)
    Mor, masser Macky, euhm. Le gas est bien gras. Tu l'as touche partout?
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