Le Secrétaire général-adjoint du Parti africain pour la démocratie et le socialisme (Aj/Pads) déclare qu’avec 37 fédérations, les conditions sont réunies pour un congrès aujourd’hui. Landing Savané récuse ce chiffre affirmant que ces « fédérations sont fictives ». La tension monte entre les deux camarades de parti. Chaque camp revendique sa légitimité.
La scission au sein d’Aj/Pads semble atteindre un point de non retour. Comment se porte la tendance qui vous est favorable ?
Ce n’est pas un problème de tendance. C’est un problème du parti. Nous ne nous reconnaissons pas du tout sous l’appellation de tendance, de faction ou de camp. Nous nous reconnaissons sous le vocable de militants d’And-jef. Nous revendiquons tellement cette légitimité que lorsque les cadres du parti se sont rendus compte que le parti était abandonné et risquait d’être définitivement marginalisé ils se sont levés. Ce n’est pas Mamadou Diop « Decroix ». J’irai en tant que responsable qui doit être dans un congrès convoqué par les bases du parti. Toutes les conditions sont réunies pour avoir un grand congrès. Avec des « fédérations fictives » ? C’est de bonne guerre. Ce serait étonnant qu’ils (ndlr : Landing et son camp) ne parlent pas comme ils ont parlé. S’ils parlaient autrement, ils seraient venus au congrès. Il y a un dicton wolof qui est très fort. Je n’ai pas l’équivalent en français, « weddi guis bok ci. li nek ci kanam rawoul beut » . Samedi à 15 h au stadium Marius Ndiaye, nous verrons si le parti est là ou pas. Nous allons présenter les secrétaires généraux des fédérations. On déclinera leur ancienneté dans le parti, à la tête de leur fédération. On verra bien si c’est du fictif ou du vrai. On verra aussi si c’est du bidon ou du béton.
Quelles sont les bases juridiques du congrès de ce week-end ?
Ceux qui organisent le congrès (ndlr : aujourd’hui) ont été les principaux artisans des statuts et du règlement intérieur pour ne rien vous cacher. Nous avons rédigé le règlement intérieur, parce qu’en tant que démocrate, rédiger les statuts d’un parti et le règlement intérieur, c’est anticiper sur des situations difficiles. Nous avons dit si telle situation se présente ? des fédérations ou 2/3 des membres du Conseil national peuvent convoquer un congrès. C’est le règlement. Nous l’avons accepté et voté en 1998. La situation du parti est là. Depuis deux ans, ça ne marche pas. C’est un secret de polichinelle. Des personnalités ont fait de leur mieux pour contribuer à ce que l’entente revienne dans le parti, mais elles n’ont pas réussi. Les fédérations ont constaté que ce qu’elles peuvent faire c’est de s’appuyer devant cette situation de blocage sur le règlement du parti. La fédération de Guédiawaye a lancé un appel à toutes les fédérations et 37 fédérations ont répondu par écrit en faisant des assemblées générales. Vous verrez bien que ce ne sont pas des fédérations fictives. J’ai entendu dire que pour tenir le congrès, les gens doivent se réunir 3 mois avant. Cela concerne le congrès ordinaire. Une situation extraordinaire s’est produite. Lorsqu’on est passionné, il faut garder le minimum de bon sens. Nous sommes absolument dans notre bon droit. La fédération de Guédiawaye a bien exploité les dispositions de nos textes. Le parti a bien réagi. Nous sommes inattaquables.
Sur quel mot d’ordre le congrès va-t-il axer ses débats ?
C’est un congrès de la renaissance. Parce qu’Aj est un parti qui a énormément apporté à ce pays. Personne ne me dira le contraire. Il n’est pas normal qu’il se délite et qu’il disparaisse de la scène politique nationale (...) Il y a quand même un problème, parce qu’en dépit de tout ce que le parti a fait, il n’a jamais dépassé 4% de l’électorat national. Il y a un problème. Les gens disent qu’il faut que Aj renaisse (...) Je ne personnalise pas le débat, mais il est clair qu’il y a un problème de leadership. Le leadership est important, mais je ne veux pas aussi qu’on aille penser qu’il faut mettre tout sur le dos d’une personne. C’est une remise en cause profonde qu’il faut opérer, entamer des réformes politiques organisationnelles profondes et aussi nous réformer nous-mêmes. C’est ce que voulons. Mais certains n’en veulent pas du tout.
Certains vous reprochent de vouloir « vendre » Aj au Pds...
Je l’ai déjà entendu. Mais ceux qui suivent de très prêt le parti et qui me connaissent savent absolument que cela n’a jamais traversé mon esprit. Je suis un militant. Je ne suis pas un carriériste en politique. Je n’ai pas un agenda ouvert ou caché. Mais je ne suis pas un larbin. Ceux qui ont fait le parti savent qu’on n’a pas pétri les gens dans le larbinisme.
Je crois que le congrès devra faire cette autocritique. On peut faire une confiance aveugle à quelqu’un, mais lorsqu’on découvre qu’il y a un problème, on se rebiffe. C’est actuellement le cas. Le parti s’est rebiffé et personne n’y peut rien. Ensuite, supposons que je veuille prendre la place de mon grand-frère, on est dans un parti démocratique. Ce n’est pas un crime. Le parti n’est pas un patrimoine d’un individu. Ce sont des hommes et des femmes libres qui décident d’adhérer. Ceux qui disent que je veux vendre le parti savent que je suis plus indépendant qu’eux. Ils savent, preuves à l’appui, que je suis plus indépendant. Pourquoi le président Wade, parlant de moi, a dit à Landing ceci : « ce que je sais de lui, c’est qu’il est loyal, sincère et désintéressé ». On peut ne pas être d’accord avec le président Wade, mais on ne dira jamais de lui qu’il a dit ce qu’il ne pense pas. Il dit exactement ce qu’il pense. S’il pense cela de Mamadou Diop, il l’a dit sur la base d’une expérience. Ce témoignage est plus éloquent que mille théories. Je crois que ce n’est pas courageux d’agir comme ça. Je prends de la hauteur par rapport à ce type d’accusation, parce que ceux qui l’avancent n’y croient même pas.
La plaie semble profonde entre vous et Landing Savané. Est-ce que des retrouvailles sont possibles ?
En politique on ne dit jamais, jamais. Mais pour l’instant, nous devons régler les problèmes dans le parti. Ces problèmes ne sont pas une affaire d’individus. Je n’ai aucun différend avec qui que ce soit dans le parti. Et je ne peux pas en avoir. Parce que s’il est vrai que ce que nous disons nous y croyons, que nous avons consacré notre existence à ce peuple, ça veut dire que nos individualités bien qu’importantes ne sont pas au poste de commande. C’est la raison pour laquelle je peux avoir des problèmes avec un militant, mais je ne vais pas les mettre au-dessus des intérêts du parti.
Les problèmes politiques prennent le dessus sur une amitié vieille de 40 ans entre vous et Landing. N’est-ce pas ?
J’ai des amis dans tous les partis politiques du Sénégal. Où est le problème ? Nous, Sénégalais, je crois que nous devons revoir les choses. Pourquoi les débats politiques ne fleurissent pas toujours ? Ce n’est pas parce que quand je dis que je ne suis pas d’accord avec telle personne, celle-ci va considérer que je suis son ennemi alors qu’en fait c’est une bataille d’idées. Je ne pose pas le problème en termes d’amitié. Ce n’est pas parce qu’en m’opposant politiquement à mon grand-frère on va me considérer comme son ennemi que je ne vais pas le faire si j’estime que je dois le faire. Ça ne me dérange pas.
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