[ Opinion ] ‘ Alliance Sopi pour Demain’ signifie ‘ Tous derrière Karim’

Les électeurs ont montré qu’ils ne veulent pas de Karim, mais Gorgui n’a cure de leurs vœux. Son ultime projet pour le Sénégal est de lui imposer son fils comme président. Pour y parvenir, il doit d’abord faire en sorte que Karim soit le candidat des libéraux et ensuite pousser les populations à voter pour lui.

Tout pour Karim, Karim partout

‘Karim n’a jamais dit qu’il veut être président. Ce ne sont que des rumeurs, des spéculations…’ Les plus prudents d’entre nous s’exprimaient ainsi, alors que le Prince, lui, attendait et attend encore qu’on lui livre le ‘royaume’ sur un plateau. Après s’être battus pendant des années pour élire Me Wade, des millions de Sénégalais virent débarquer, en 2003, un second président qu’ils ne connaissaient point : Karim Wade. Le garçon ne savait même pas où se mettre, tellement il était inexpérimenté et ne connaissait rien des réalités du pays. Papa et maman devaient alors le mettre sur les rails. Flanqués d’opportunistes qui parlaient à sa place, le marmot s’immisça dans la gestion de l’Etat. Très vite, il devint plus puissant que les ministres de la République relégués au rang de subordonnés. Depuis, dès qu’il est question de gros sous, Karim est au centre.

Un beau jour, ‘Monsieur 10 %’, à qui était discrétionnairement confiée la direction de l’Anoci, créa la fameuse Génération du concret qui, petit à petit, phagocyte le Pds au pouvoir, avec la bénédiction de ‘la seule constante’. Est-ce qu’Aminata Niane oserait créer un mouvement politique et l’associer aux travaux de l’Apix ? Y a pas à dire, Karim est un citoyen bien au-dessus des autres. Dopé par son entourage, il eut enfin le courage de dévoiler ses ambitions. Le voilà politicien déclaré. Il tenta de leurrer les chômeurs de la banlieue dakaroise en leur disant qu’il est des leurs, lui qui se balade en jet privé. Convaincu qu’il avait des demeurés en face de lui, il se présenta aux élections locales de mars 2009 avec l’appui remarquable de son papa qui battait campagne alors qu’il n’en avait pas le droit. . Ouïe ! Quelle raclée ! Il fut laminé et rejeté comme une bête immonde. On crut qu’il allait se terrer en Europe pour cuver son humiliation et ne plus revenir. ‘Bon débarras !’ pensait-on. Cela ne plut pas à son papa qui se dit : ‘Ah bon ? Ils ne veulent pas de mon fils ? Je vais donc leur montrer que ce pays m’appartient.’ Le Sénégal se vit doté, malgré lui, d’un super-ministre d’Etat : Karim Wade.

Après les révélations de Latif sur les ‘contes et mécomptes de l’Anoci’, d’aucuns croyaient que Karim allait démissionner ou serait viré du gouvernement. Que nenni ! Le prince rentra de vacances pour s’octroyer encore plus de pouvoir et plus de milliards de nos francs à gérer. La justice ne peut l’inquiéter, encore moins l’Assemblée nationale.

Nous avions écrit dans une contribution : ‘On peut dire sans trop exagérer que le Prince (Karim Wade) contrôle désormais le pays. Tout ou presque est sous sa houlette. On dirait qu’il est à la fois, le maire des maires, le ministre des Affaires étrangères, le ministre de l’Economie, le ministre des Infrastructures, le ministre de l’Urbanisme et le ministre des Transports aériens. A quelques exceptions près, seules l’armée et la police ne sont pas encore sous ses ordres.’ Nous avions apparemment bien vu. L’armée et la police lui sont maintenant confiées. Abdoulaye Baldé, son bras droit et dévoué serviteur, est nommé chef suprême des militaires. Le nouveau ministre de l’Intérieur est Bécaye Diop, l’homme qui déclare n’avoir qu’un objectif : faire plaisir à Wade et le servir sous toutes les formes. Et comme l’objectif de Wade est de hisser son fils au sommet, lui faire plaisir, c’est soutenir son fils, le servir, c’est servir son fils. Cheikh Tidiane Gadio, ex-ministre des Affaires étrangères, a été limogé, parce que, dit-on, il ne voulait pas obéir à Karim. Pourtant le président Wade disait de lui ‘qu’il est le meilleur ministre des Affaires étrangères de l’Afrique’. Son successeur, Me Madické Niang, a compris qu’il doit se soumettre au Prince héritier s’il veut rester dans le gouvernement.

Au Gabon, Bongo-fils était ministre de la Défense avant de s’imposer au pouvoir. En Guinée, Dadis Camara a pris le pouvoir grâce à l’armée. Au Sénégal, Karim a l’argent sous la main et plonge sa cuillère dans la marmite des hommes de tenues…

Le groupe de presse de Karim Wade

Karim contrôle tout, sauf les électeurs. Les distributions d’argent, de sacs de riz, de billets pour La Mecque et autres s’avérant inefficaces, la nouvelle trouvaille est de l’imposer médiatiquement aux Sénégalais. La presse privée ne le couvrant pas de lauriers, il faut donc créer une presse chargée de redorer son blason. Inaugurations par-ci, signatures de contrats par-là, etc. Le meilleur outil pour y parvenir est la télé. Le Rts étant saturée par les images du père, une nouvelle chaîne pour le fils s’impose. Pour tester l’opinion, on fit courir la rumeur sur l’imminente création du groupe de presse de Karim : journal, radio et télé. Cela ne pouvait passer car tout potentiel candidat devrait avoir les mêmes droits, or Wade ne veut accorder une télé qu’à son fils. Il fallait s’y prendre autrement, user de subterfuges. Le groupe de presse Sopi fut annoncé. Là aussi, il y avait un problème car cela ouvrait la porte à un groupe de presse Benno ou Ps, Afp ou autre. C’est alors que Me Wade décide de l’appeler ‘télé panafricaine’. Une chaîne qui ne sera financée que par le Sénégal, donc par Wade qui ne permet pas qu’on ouvre une télé avec de l’argent venant de l’étranger. Un pied de nez aux Sénégalais qui attendent la télévision du groupe Futurs-Médias. Si Youssou Ndour veut que Tfm démarre dans de brefs délais, il n’a qu’à promettre que les deux tiers des programmes seront consacrés à Karim Wade.

La double candidature des Wade

Dès que Me Wade a annoncé sa candidature prématurée - qui n’a encore rien d’officiel - en n’excluant pas celle de son fils, celui-ci, récemment vomi par les Sénégalais, a déclaré qu’il va parcourir le pays pour battre campagne, sous prétexte que ce sera pour faire réélire son père. Ce qui est étrange est que le président Wade, lui-même, clame qu’il n’a pas besoin de battre campagne parce qu’il est le seul lutteur dans l’arène. Donc pour qui Karim fait-il tout cela ? Eh oui, une candidature peut en cacher une autre. Actuellement, Wade fait tout pour empêcher les autres libéraux et les alliés de la mouvance présidentielle de se présenter. Il leur dit : ‘Je suis votre chef, je suis partant pour un troisième mandat quand bien même je n’en ai pas le droit, mais je fais ce que je veux. Laissez tomber vos ambitions et venez me soutenir.’

Les retrouvailles Wade-Idy et l’Alliance Sopi pour Demain.

Quel deal Wade a-t-il conclu avec Idy pour que ce dernier accepte de le laisser exécuter son plan ? Pour l’instant, ils ont passé l’éponge sur les dizaines de milliards de francs que les Sénégalais réclament toujours. Me Wade invite Idy dans le gouvernement pour le neutraliser, comme disait Farba Senghor. Il faut mettre le Damel de Thiès dans une ‘station’ qui sera sa camisole de force, et éloigner ses hommes des postes stratégiques pour laisser Karim occuper tranquillement le terrain.

Une cérémonie d’inauguration à l’usine de montage Senbus industries, à Thiès, fut le prétexte pour de nouvelles retrouvailles. Idy se dit prêt à laisser Wade l’égorger. Qu’il sache que son frère, Karim, est en train d’aiguiser le couteau qu’il remettra à son papa le moment venu, et je ne crois pas qu’un ange descendra du ciel avec un bélier. Dès qu’Idy a accepté de se soumettre à son père, Karim a envahi Thiès. Le jour des ‘retrouvailles’, son spectre hantait les lieux. Un journaliste raconte : ‘A l’entrée de Thiès jusqu’au centre ville, on voit partout des affiches avec l’effigie du chef de l’Etat, mais estampillées Génération du concret. Et à part quelques banderoles où on peut lire ‘la commune d’arrondissement de Thiès Nord souhaite la bienvenue au président de la République’, partout, le long de la route nationale, ce sont des drapeaux du Sénégal avec des affiches de Wade signées GC.’ Il y avait aussi des photos de Karim. L’invasion des soldats du Prince fut telle que le maire se sentit obligé de saluer ses frères et sœurs de la Génération du concret. Quelques jours plus tard, Karim implanta à Thiès le ‘MK 2012 ’ (Mouvement Karim 2012), prétendant que c’est pour soutenir la candidature de son papa. Ce n’est pas ‘Abdoulaye Wade 2012’, mais bel et bien ‘ Karim 2012 ’. La pilule est grosse, et pourtant Idy et les siens doivent l’avaler. Eh oui ! Qui se fait brebis, le loup le mange.

Karim, trop pressé, a déjà commencé ses agissements alors qu’il devrait au moins attendre que papa finisse d’alpaguer toutes les ouailles, au nom de la grande famille libérale. Si Macky Sall, Alioune Badara Cissé, Jean-Paul Dias et autres, retournent au Pds, comme Idy, Fada et Aminata Tall qui ont déjà le couteau à la gorge, ils subiront le même sort. Karim a besoin de moutons pour la Tabaski qui approche et celles à venir. Tous les partis qui sont entrés dans cette Alliance Sopi pour Demain, née du Pdsl avorté, doivent savoir ce qui les attend. Ils n’ont qu’à bien s’engraisser pendant qu’il est encore temps, car la fin est pour bientôt.

Bathie Ngoye THIAM

<26> [email protected]