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Politique

Amadou Ciré Sall, député des sénégalais de l'extérieur : « Wade a confié une charge trop lourde à Karim »

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Amadou Ciré Sall, député des sénégalais de l'extérieur : « Wade a confié une charge trop lourde à Karim »
Selon les députés du Parlement paritaire Afrique Caraïbes et Union européenne, le transfert d'argent des immigrés africains a diminué de 40 %. C'est la révélation faite, lors d'une conférence de presse tenue vendredi dernier, par Amadou Ciré Sall, député des Sénégalais de l'extérieur et membre de cette assemblée paritaire. Il a également informé sur les propositions que ses collègues et lui vont faire à l'Union européenne. Il a donné son point de vue sur la nomination de Sada Ndiaye comme ministre des Sénégalais de l'extérieur et sur l'actualité politique nationale. Extraits.

Wal Fadjri : Vous êtes député du Parlement paritaire Afrique Caraïbes Pacifique et Union européenne. Vous vous êtes réunis récemment à Prague sur la problématique de l’immigration. En marge de cette rencontre, les députés de la zone africaine se sont réunis également sur le même thème. Qu’est-ce qui en est ressorti et quelles conclusions vous avez tirées de la crise financière actuelle ?

Amadou Ciré Sall : Nous avons discuté de la crise financière. On est arrivé à la conclusion que le transfert de l’argent par les immigrés a diminué de 40 %. Cela aura des conséquences au niveau des familles. Les immigrés envoyaient au Sénégal un milliard par jour. S’il arrive moins d’argent maintenant, imaginez les conséquences quand on sait que 75 % de cette somme sert à la consommation. (…)

Wal Fadjri : Pensez-vous avoir des chances d’être entendus par l’Union africaine ?

Amadou Ciré Sall : Quand j’ai évoqué cette politique commune de l’immigration, les députés de la zone Afrique étaient tous d’accord. Je ne pense pas que l’Union africaine va fermer les yeux sur cette question qui préoccupe tout le monde. Aujourd’hui, l’Afrique n’est pas en mesure de garder tous ses enfants parce qu’il n’y a pas assez d’emplois.

Prenez l’exemple des Philippines où j’ai été. C’est l’office des migrations internationales qui m’y avait envoyé en voyage d’études. Ce que ce pays fait en matière d’immigration est très important. Ils ont des écoles de formation qui forment, par exemple, des infirmières qui sont demandées partout dans le monde. Une fois formées, elles ont des contrats pour travailler aux Etats-Unis, en Europe. Les Philippins ont des représentants dans les ambassades. On les appelle les agents commerciaux. Ce sont eux qui étudient l’évolution du marché dans le pays où ils résident. Quand ils projettent, par exemple, que la France aura besoin dans deux, cinq ou six ans, de techniciens dans le froid, dans le bâtiment, des infirmières dans les hôpitaux, ils forment des gens. Ce sont eux qui cherchent des contrats. Ce qui fait que le Philippin arrive dans le pays avec son contrat dûment signé. A la fin de celui-ci, il rentre chez lui et ne reste pas en situation irrégulière (…).

Wal Fadjri : Parlons de l’actualité politique sénégalaise. Un gouvernement vient d’être formé. Il y a un ministère des Sénégalais de l’extérieur. Si vous devez lancer un message à ce ministre, que diriez-vous ?

Amadou Ciré Sall : Si j’ai un message, c’est de rendre un hommage appuyé au ministre sortant, Mme Aminata Lô Dieng (…). Elle a impulsé des idées nouvelles au niveau de ce ministère. Je demande au nouveau ministre de continuer sur cette lancée et peut-être aller plus loin. Ce dont les Sénégalais de l’extérieur ont besoin, c’est d’être organisés. Malheureusement, ils ne sont pas organisés. Par exemple, le Mali qui prenait sur nous des exemples est en train de nous dépasser. Le Conseil supérieur des Maliens est copié sur le Conseil supérieur des Sénégalais de l’extérieur. C’est vrai que ce conseil supérieur a été créé par le Parti socialiste juste pour nommer des sénateurs. Après la nomination des sénateurs, il a été abandonné. Mais c’était une idée géniale. Il aurait permis aux Sénégalais de l’extérieur de pouvoir faire encore mieux. Pendant le symposium des Sénégalais de l’extérieur, nous avons demandé la dissolution du Conseil supérieur des Sénégalais de l’extérieur ou sa restructuration. Mais finalement, il a été dissous. Je pense qu’il fallait le restructurer. C’est la seule organisation qui peut travailler avec le gouvernement. Vous vous rendez compte que si un ministre de la République veut rencontrer les Sénégalais de l’extérieur, le consul est obligé d’envoyer des lettres à plus de 400 associations pour que tout ce monde se retrouve au Consulat dans une salle exiguë pour discuter avec le ministre. C’est impossible de travailler dans ces conditions. Alors que si l’on avait un Conseil supérieur représentatif de tous les immigrés, on n’aurait pas eu besoin de convoquer les 400 associations, mais seulement les 40 délégués pour une séance de travail avec le ministre. Tant qu’on n’organise pas les Sénégalais de l’extérieur, on ne pourra rien faire avec eux. Aujourd’hui, le problème, c’est comment organiser les Sénégalais de l’extérieur afin qu’ils contribuent mieux encore au développement de notre pays.

Il y a un travail qui a été fait et qui a été oublié. A la suite du symposium, il y a eu un plan d’actions qui contient des choses importantes. En quelque sorte, c’est une feuille de route que l’on devait remettre au ministre. Il n’a rien à faire que de prendre cette feuille de route pour régler les problèmes des Sénégalais de l’extérieur.

Wal Fadjri : Inviteriez-vous le ministre Sada Ndiaye à se saisir de cette feuille de route ?

Amadou Ciré Sall : J’invite le Premier ministre à travailler sur cette feuille de route après l’avoir améliorée parce qu’elle date de 2001. Dans cette feuille de route, il y a la restructuration des Sénégalais de l’extérieur, la banque des immigrés, l’informatisation des cartes consulaires et des consulats, la réinsertion des Sénégalais de l’extérieur. Je propose même que l’on crée à l’aéroport un bureau d’accueil pour les Sénégalais de l’extérieur qui veulent investir dans le pays. Cela leur permettra d’avoir toutes les informations.

C’est vrai qu’Aminata Lô Dieng a réussi à créer un fonds d’investissement de 500 millions, mais qui n’est pas suffisant. On peut aller plus loin. Il faut que les Sénégalais de l’extérieur soient au courant que ce fonds d’investissement existe. Elle a demandé aussi un fonds social qui devait aider les Sénégalais de l’extérieur. Il y a un autre problème que le gouvernement doit régler entre le ministère des Sénégalais de l’extérieur et celui des Affaires étrangères. Le ministre des Sénégalais de l’extérieur est obligé de travailler avec les consulats, mais ceux-ci dépendent des Affaires étrangères. Si l’on veut que le ministère des Sénégalais de l’extérieur réponde aux aspirations des Sénégalais de l’extérieur, il faut qu’il ait des répondants à l’étranger. C’est pourquoi j’avais demandé que le ministère des Sénégalais de l’extérieur soit un ministère délégué qui dépend du ministère des Affaires étrangères pour pouvoir bénéficier des services du consulat.

Wal Fadjri : En tant que Sénégalais de l’extérieur, vous n’avez pas voté le 22 mars dernier, mais vous avez suivi le scrutin en tant que responsable du Pds à Paris. Au résultat, l’opposition a gagné la plupart des villes et une partie du monde rural. Avez-vous été déçu ?

Amadou Ciré Sall : C’est plutôt un sentiment de tristesse. Je fais partie des hommes politiques qui ont alerté le président de la République. Mais cela m’a valu des convocations à la commission de discipline parce que j’avais voulu attirer l’attention de mon parti pour dire qu’il y a des limites à ne pas franchir. Ce n’était pas pour désobéir à mon parti, ce n’était pas pour renoncer à mon engagement. C’était pour dire qu’il y a des risques. J’avais même parlé à des personnes qui entouraient le président. Malheureusement, elles ne m’ont pas écouté. Ce qui est arrivé le jour du 22 mars était prévisible. Nous avons fait une analyse objective de ce qui est arrivé. Tout concorde que si nous avons perdu ces grandes villes, ces villes symboliques, c’est dû à notre arrogance. Alors, je dis à notre Premier ministre de faire attention à cela parce que l’arrogance fait partie des gros problèmes de certains responsables du Pds. Il y a aussi le manque de dialogue avec l’opposition. Elle ne peut pas nous obliger à faire des choses, mais c’est toujours bon, pour un climat apaisé, de discuter avec l’opposition.

Il y a aussi les mauvaises investitures. Nous avions demandé que ceux qui étaient à la direction du parti soit sanctionnés. Pendant les investitures, il y a eu du clientélisme. Ce qui fait que des gens ont été investis alors qu’ils ne représentaient rien. Il y a aussi les mauvais bilans des maires et présidents des communautés rurales. Un parti doit servir à quelque chose. J’attendais que les maires fassent le bilan durant la campagne électorale. On ne peut plus tromper le peuple sénégalais. Vous pouvez mal travailler, on va vous laisser finir votre mandat et vous sanctionner à la fin. Quand le président dit aux maires à Mbour que ‘vous devez tous aller en prison’, c’est qu’ils avaient failli à leur devoir. (…).

Wal Fadjri : D’autres disent que les Sénégalais ont aussi sanctionné la Génération du concret.

Amadou Ciré Sall : Durant cette campagne électorale, quand Karim Wade a fait une direction de campagne à part, les gens n’ont plus compris. La confusion vient de là. Si le président Wade veut prendre les choses en main, il faut qu’on la dissolve dans le Pds. (…). Nous n’avons qu’un seul le parti, c’est le Pds. Même la Cap 21 doit se fondre dans le Pds pour former un grand parti à l’image de l’Ump (parti au pouvoir en France, Ndlr). (…).

Wal Fadjri : Le président de la République a-t-il bien compris le message des Sénégalais le 22 mars dernier ?

Amadou Ciré Sall : Je crois qu’il a compris le message. Mais ce qui me choque, c’est que des ministres qui ont été battus, reviennent encore dans le gouvernement. Ce n’est pas normal. Il doit rectifier tout cela.

Wal Fadjri : N’était-il pas logique qu’il ramène les ministres d’autant plus que Karim Wade a été battu, mais a été nommé ministre d’Etat ?

Amadou Ciré Sall : Il faut situer le degré de responsabilité de chacun. Karim n’a pas de responsabilité politique dans le parti. Il était simplement candidat dans une commune d’arrondissement. Là où il y a des problèmes, c’est que des ministres qui ont eu à gérer les investitures, ont été battus. Ils doivent aller voir ailleurs.

Wal Fadjri : Que pensez-vous de la nomination de Karim Wade comme ministre ?

Amadou Ciré Sall : Je veux que cela soit clair. J’ai connu Karim Wade quand il était au lycée. J’ai travaillé avec lui durant les élections de 1988, de 1993, de 1998 et de 2000. C’est vrai que depuis qu’on a gagné les élections de 2000, il m’a abandonné. Je ne lui en veux pas parce que j’ai plus de relation avec son père. Je suis venu au Pds par conviction. Mais le fait qu’il soit appelé en tant que citoyen pour servir le pays, cela ne me gêne pas. En revanche, ce qui me gêne, c’est le fait qu’on accuse le président Wade de vouloir lui faire succéder. Mais le président de la République s’est expliqué en disant qu’il n’a jamais dit que c’est Karim (Wade) qui sera son successeur. A partir du moment où il l’a dit devant tout le monde, je le crois.

Par contre, je trouve que le président de la République lui a confié une charge très lourde pour une personne qui n’a pas connu d’expérience ministérielle. Mais on va le juger sur pièce. S’il fait un travail remarquable et réussit, on le félicitera. Mais s’il fait un travail qui n’est pas réussi, on le critiquera. Je veux qu’il réussisse comme tout le monde.

Wal Fadjri : Comment se porte votre parti à Paris ?

Amadou Ciré Sall : Je ne peux pas dire que tout va bien. Mais nous sommes en train de remettre le parti en état de marche. Ce parti a connu des difficultés qui sont apparues avec mon soutien à Macky Sall. Les gens ont voulu utiliser ce soutien pour me déstabiliser. Je défendais des valeurs et des principes. Je m’en suis expliqué avec le président de la République. Mes relations avec le président Wade dépassent le cadre politique. Ensuite, mes principaux collaborateurs que j’ai connus depuis 30 ans, ont rejoint l’Alliance pour la république de Macky Sall. Cela est très gênant pour moi. Je les ai connus quand nous étions jeunes. Ce sont des sacrifices de 30 ans.

Wal Fadjri : On vous attendait au ministère des Sénégalais de l’extérieur, on y retrouve Sada Ndiaye. Etes-vous déçu ?

Amadou Ciré Sall : Je suis très déçu. J’aurais voulu que le ministre des Sénégalais de l’extérieur soit quelqu’un qui connaisse l’immigration, comme Aminata Lô Dieng. Je sais qu’on peut trouver de bons Sénégalais en France, en Espagne, aux Etats-Unis, qui ont vécu l’immigration et qui la connaissent. Je ne veux même pas qu’il soit un Hal Pulaar. Il peut être Sérère, Diola, Mandingue, etc. Les ministres hal pulaar qui ont occupé ce poste n’ont pas réussi. Abdou Malal Diop n’a rien fait. Oumar Khassimou Dia n’est pas resté longtemps. Alors, j’ai bien peur que le ministre des Sénégalais de l’extérieur en la personne de Sada Ndiaye que je connais très bien, qui est de mon village, ne soit pas à la hauteur.

Wal Fadjri : Sada Ndiaye ne connait-il pas l’immigration ?

Amadou Ciré Sall : Je ne sais pas. En tout cas, s’il fait un pas en direction des Sénégalais de l’extérieur pour savoir comment ils vivent, ce serait une bonne chose. Je souhaite qu’il réussisse.

Wal Fadjri : Allez-vous l’accompagner dans son travail ?

Amadou Ciré Sall : Je ne sais comment il voit les choses. Tout dépend de lui. Si Sada Ndiaye pense que je peux apporter quelque chose pour que le ministère réussisse, je le ferai non pas pour lui, mais pour les Sénégalais de l’extérieur parce que c’est notre ministère. Maintenant, s’il ne veut pas nous associer, je ferai mon travail de parlementaire. J’ai, tout le temps, défendu ce ministère à l’Assemblée nationale.

Wal Fadjri : Avez-vous des contentieux avec Sada Ndiaye ?

Amadou Ciré Sall : Je n’en ai pas. Le seul contentieux que j’ai avec lui, c’est la loi qui porte son nom. C’est Macky Sall qui l’a amené au parti. Ce que je lui demande, c’est de reconnaître que je suis un militant libéral et que je suis dans le parti avant lui. Il m’a combattu en 1993 quand on a voulu amener Abdoulaye Wade à Guindjilone. Il a empêché Abdoulaye Wade d’organiser des meeting là-bas. Ce sont les calots bleus qui se sont battus. Jusqu’à présent, il y a des gens qui ne me parlent pas à cause de cela en disant que j’ai amené des calots bleus pour les bastonner.

Wal Fadjri : Voilà le différend alors ?

Amadou Ciré Sall : Pour moi, ce n’est pas un différend. J’ai toujours dit que je ne suis pas d’accord avec les transhumants. J’ai des convictions. Je n’ai pas de contentieux personnel avec Sada Ndiaye. Je lui demande simplement de travailler pour le parti.



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