AMINATA LO, MINISTRE DES SENEGLAIS DE L’EXTERIEUR, DU TOURISME ET PORTE-PAROLE DU GOUVERNEMENT : « Dans le parti, seul Wade m’intéresse… »

L’As : En plus de vos charges de ministre des Sénégalais de l’Extérieur et du Tourisme, vous venez d’être nommée porte-parole du gouvernement. Comment appréhendez-vous vos nouvelles fonctions.

Aminata Lô Dieng : Avant d’entrer dans le vif du sujet, je voudrais remercier très sincèrement le président de la République, Me Abdoulaye Wade, de m’avoir, d’abord, renforcée dans le gouvernement en me confiant en plus du ministère des Sénégalais de l’Extérieur, le ministère du Tourisme, mais aussi en me nommant porte-parole du gouvernement. Je voudrais très sincèrement le remercier lui et son Premier ministre, Cheikh Hadjibou Soumaré, pour cette haute marque de confiance qu’ils viennent de me témoigner. J’ai appris la nouvelle hier (Ndlr, avant-hier), c’est pour moi un honneur d’avoir obtenu une promotion dans le gouvernement. Mais c’est aussi en même temps un défi. Parce que porter la parole du gouvernement constitue un challenge en tant que jeune et femme, mais je le prends avec sérénité. Je mettrai tout en œuvre pour relever ce défi.

On reproche souvent aux différents gouvernements de l’alternance de pécher dans la communication. Quelle stratégie comptez-vous mettre en place pour rectifier le tir ?

De mon point de vue, ce sera chose aisée parce que nous avons un gouvernement réduit, seulement 28 ministres. Nous avons également un programme très large, soutenu, pertinent à tous points de vue. Déjà depuis 2000, nous avons effectué d’énormes réalisations au niveau des Infrastructures, de la Santé, de l’Education, de la Promotion féminine… Donc aujourd’hui, je pense qu’il n’est pas du tout difficile d’être le porte-parole d’un gouvernement formé par une personne de la dimension du président de la République. Il s’agira simplement de mettre en exergue toutes les réalisations ainsi que les programmes qui vont les suivre, mais aussi d’avoir une communication directe et franche avec les populations.

Vous vous prévalez d’un certain nombre de réalisations, mais il se trouve que les Sénégalais sont asphyxiés par l’inflation généralisée des prix des denrées de consommation courante…

Je suis consciente de cela. Mais vous savez l’environnement de l’économie mondiale, la hausse du pétrole, la rupture des accords Union Européenne-Acp qui vont être remplacés par les Ape qui vont nous faire perdre beaucoup d’argent, en tant qu’importateur de produits européens. Tout cet environnement mondial fait qu’aujourd’hui, nos économies rencontrent beaucoup de difficultés. Et cela se répercute sur la vie quotidienne des Sénégalais. A cela s’ajoutent toutes les grandes réalisations que nous avons entamées depuis 2000, on ne peut faire d’omelettes sans casser des œufs, nous sommes en train de construire des routes, des autoroutes, des hôpitaux dont les financements proviennent pour la plupart du budget de l’Etat. En faisant en même temps face à un environnement mondial économiquement difficile, je comprends qu’il y ait une inflation due à tous ces facteurs que je viens d’énumérer.

Vous êtes également le ministre des Sénégalais de l’Extérieur. Depuis la création de ce département ministériel, il ne manque pas de gens pour dire qu’il est une coquille vide. Depuis six mois que vous êtes là, quel contenu avez-vous donné à ce ministère ?

Ce que je puis dire, c’est que le ministère des Sénégalais de l’Extérieur ne peut être considéré comme une coquille vide. Je vais vous donner deux raisons pour vous le prouver. Premièrement, plus de 2 millions de Sénégalais vivent à l’extérieur. Et tout le monde sait qu’ils participent énormément au développement de l’économie nationale, en transférant pratiquement plus de 360 milliards par voie régulière. Ce sont là des chiffres très impressionnants. Maintenant, c’est un ministère jeune auquel nous sommes en train de donner tout le contenu qu’il lui faut, pour faire face à la demande des Sénégalais de l’extérieur. Laquelle demande tourne autour du logement, de l’investissement. Donc nous avons profondément réformé en six mois le ministère pour véritablement lui donner un contenu.

Concrètement, qu’est-ce que vous avez fait pour les Sénégalais de la diaspora depuis que vous êtes ministre ?

Dans la vie, on a une vision. Il faut maintenant mettre en place une stratégie pour concrétiser cette vision. La vision de M.le président de la République en direction des Sénégalais de l’extérieur, c’est qu’ils soient des partenaires au développement. Comme je suis là pour concrétiser cette vision, nous avons engagé des réformes qui vont nous permettre de mettre en œuvre la politique du chef de l’Etat en direction des Sénégalais de la diaspora. C’est dans ce cadre que nous avons créé la direction de la promotion de l’habitat pour les Sénégalais de l’extérieur pour faire face aux sollicitations de nos compatriotes

Une direction de l’investissement et des projets parce que tous les Sénégalais vivant à l’extérieur rêvent de revenir au pays. Donc, il faut un réceptacle pour les accueillir, les encadrer, les orienter afin qu’ils puissent réussir leurs investissements dans notre pays. Cette direction est soutenue par un fonds de garantie à l’investissement qui permettra d’accompagner nos compatriotes qui n’ont pas suffisamment de moyens. Il y a également le plan social parce que vous n’ignorez pas que dans l’émigration, certains ont réussi, d’autres non. Ils se sont égarés dans certaines villes, rencontrent d’énormes difficultés. Nous avons une enveloppe pour aider cette catégorie d’émigrés. Nous avons aidé beaucoup de gens dans plusieurs pays.

Dernièrement, il s’est posé une pénurie de passeport pour les Sénégalais vivant à l’étranger. On n’a pas beaucoup senti votre présence dans ce dossier

Les problèmes de passeports son gérés par le ministère de l’Intérieur. Maintenant, je suis d’accord avec vous qu’il est de notre devoir de répondre à cette demande qui est urgente. Tout émigré a besoin de son passeport pour avoir sa carte de séjour et être dans la régularité. Quand j’ai été saisie du problème lors de mes tournées à l’étranger, j’ai immédiatement contacté le ministre de l’Intérieur. Après, on a ouvert un guichet au ministère de l’Intérieur où on a détaché un des nos agents pour diligenter ce dossier. Nous sommes également en train de voir avec le ministère des Affaires étrangères comment nous allons faire pour nous occuper des bordereaux et diligenter autant que faire se peut le problème.

Il se raconte que la tournée que vous avez récemment effectuée à l’étranger a été quelque peu mouvementée. On parle des déboires que vous aurez eu en Espagne et auprès de la communauté sénégalaise de France

(Surprise) Qui vous a dit cela ? J’ai été très bien accueillie par la communauté sénégalaise. Il y a eu une très forte mobilisation de nos compatriotes lors de mes tournées. Il y a eu, tout juste, un petit incident à Paris dû à un problème de communication. J’ai tenu un discours en français, après j’ai voulu parler en wolof, mais il s’est trouvé que les halpulaar n’ont pas apprécié. Voilà ce qui s’est passé. Il n’y a pas eu d’incident majeur.

Après la formation du gouvernement Soumaré 1, il a été beaucoup question de ministres aux mœurs légères et aux Cv douteux. Vous avez été accusée d’avoir falsifié votre Cv. Qu’en est-il ?

Les gens qui me connaissent savent que je ne suis pas de nature à tremper dans des choses louches. Je ne connais pas la falsification. Quand on informe l’opinion, il faut prendre quand même le soin de donner des preuves. Surtout quand on accuse une personnalité de la République d’une chose aussi grave. Ils auraient dû publier le Cv en question, et cela me donnerait l’occasion de prouver le contraire. Quand on informe, il faut informer juste et vrai. La réalité, je l’ai dit et redit : j’ai fait deux ans de pharmacie qui équivaut à un Deug parce qu’en pharmacie, il n’y a pas de diplôme intermédiaire. On va jusqu’au doctorat. Après la première année et la deuxième année, j’ai fait une spécialisation en cosmétique parce que c’est une chose que j’ai toujours aimée. J’ai travaillé à l’Oreal en Belgique. Après je suis rentrée au Sénégal où j’ai dirigé une Ong pendant des années. Donc, j’étais dans le milieu de la société civile parce que je suis très sensible aux problèmes sociaux que rencontrent nos compatriotes, notamment dans la zone de Pikine où j’habite. Même si j’étais seulement titulaire du bac, je l’aurais dit. Parce que ce qui est important, c’est mon combat pour le pays et qui date des années. Je suis dans le Pds depuis 23 ans.

En tant que responsable libérale, comment analysez-vous la crise qui secoue aujourd’hui le Pds et qui a fini par déteindre sur le fonctionnement de nos Institutions ?  

Je suis militante du Pds depuis 23 ans. Un parti a toujours des difficultés et des sensibilités. Même les grands partis européens connaissent des problèmes. Cela est normal parce que dans un parti, chacun a des ambitions et chacun est libre d’avoir des ambitions. Aujourd’hui, on ne peut reprocher à X ou à Y d’avoir des ambitions présidentielles. On ne peut non plus reprocher aux autres qui ont la même ambition de combattre cette personne-là. C’est légitime. C’est même le propre de la politique. Maintenant, tout le monde est d’accord que le secrétaire général du parti est le dénominateur commun. Quelles que soient les sensibilités, quelles que soient les batailles de positionnement, il n’y a qu’une constante qui peut à tout moment réunir les gens autour de l’essentiel. Et l’urgence aujourd’hui, c’est le développement de notre nation. Cela dit, je puis vous assurer que les Institutions -Assemblée nationale et Sénat- fonctionnent normalement.

Mais la tête du président de l’Assemblée nationale est réclamée par certains députés de la majorité…

Je vous l’ai dit et je vous le répète, au-delà de tout ce qui se passe dans notre parti, il y a toujours quelque chose de plus important qui nous réunit tous, c’est la réussite du président de la République. Maintenant la mise à prix de la tête du président de l’Assemblée nationale à travers une pétition concerne les députés. Et puisque je ne suis pas député, permettez-moi de ne pas en dire plus.

Mais en tant que membre du Pds, vous avez une position sur le débat autour de la destitution de Macky Sall du perchoir

Je crois aux idées de Wade pour le développement de notre pays. J’ai une base politique. Je me bats dans ma base politique qui est le département de Pikine. Au niveau national, je suis surnommée la fille du Président Wade. Au-delà du fait d’être son ministre, je suis très proche de Me Wade. J’ai le droit de lui parler et discuter avec lui des questions importantes qui interpellent notre parti. En ce qui concerne ma position sur le problème que vous évoquez, je vous signale que je n’ai pas d’ambitions présidentielles. Je me contente d’assumer la mission gouvernementale qui m’a été assignée.

Etes-vous pour ou contre le départ de Macky Sall de la tête de l’Assemblée nationale? C’est cela ma question !

Macky Sall est un responsable du Pds. Ceux qui sont pour son départ sont en train de signer leur pétition. Ceux qui ne veulent pas, se sont abstenus. Qui plus, je ne suis pas député. Ce n’est pas Macky Sall ou X ou Y qui m’intéresse dans le parti. Une seule personne m’intéresse dans le parti, c’est mon secrétaire général national. Je suis une militante disciplinée. Pour l’instant, je mets en priorité ma mission gouvernementale pour le bénéfice des populations.