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Politique

[ Interview ] Arona Gaye, Conseiller technique du Président : « Wade est un ogre politique, il mangerait même son fils Karim »

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[ Interview ] Arona Gaye, Conseiller technique du Président : « Wade est un ogre politique, il mangerait même son fils Karim »
Champion du monde de scrabble en 2000, Arona Gaye est depuis quelques années conseiller technique en jeunesse et sports du Président Wade. Il adore le « pape du Sopi » mais abhorre la manière de faire de l’entourage du Chef de l’Etat. Dans cette interview, il dit comment jusqu’ici il n’a pas reçu la villa que Me Abdoulaye Wade lui avait offert. Dans les habits du biographe du Secrétaire général national du Pds, Arona qualifie celui-ci d’ogre (politique) qui n’hésiterait pas à « manger » son fils Karim.

En tant que conseiller du Président de la République dans les domaines de la jeunesse et des sports, avec quel œil regardez-vous la crise de l’emploi et celle du football ?

Pour ce qui est du football, je pense que la décision de l’Etat de dissoudre la Fédération et d’instaurer un comité de normalisation de la discipline est très sage. Cette décision s’imposait, en tout cas, au retour de la Can au Ghana. Je pense qu’il faut tourner la page et soutenir ceux à qui le football a été confié. Je fais entièrement confiance à Diagna Ndiaye et son vice-président, Saer Seck. Je pense qu’avec cette équipe les choses vont évoluer. Ce sont des personnes qui n’ont plus rien n’à prouver, ils ont fait leur preuve ailleurs. Ensuite, ils n’ont pas besoin de se remplir les poches, parce qu’ils en ont déjà et c’est cette race de dirigeants qui nous manquait.Il ne faut pas maintenant s’arrêter là, il faut des infrastructures et que l’Etat apporte son soutien. Je me suis beaucoup investi pour le dénouement de cette crise. D’abord en tant que conseiller sport, mais aussi et surtout pour éviter l’inactivité des jeunes footballeurs. C’est ce qui est à l’origine du Tournoi de la Solidarité que j’ai initié à Bargny et qui regroupe 27 Asc de la zone et dont la finale se jouera le 27 juin prochain, entre autres actions. Et pour ce qui est de la jeunesse, elle a besoin d’occupation. Et je trouve que le sport et les loisirs sont un facteur d’occupation. C’est pourquoi, il faut trouver aux jeunes un terrain pour se divertir. Je pense par ailleurs que la Goana peut être une solution à ce manque d’emploi.

Championne du monde en 2000, les portes de la Présidence vous ont été ouvertes. Racontez-nous un peu votre parcours.

C’est une aventure faite de hauts et de bas. Cette aventure m’a forgé. Le scrabble a joué un grand rôle dans mes études, c’est pourquoi je demande aux élèves de pratiquer le scrabble et, par la même occasion demander, au ministre de l’Education de concrétiser son souhait d’introduire le scrabble dans les écoles. Mais je retiens une note négative que je n’oublierai jamais. En 1990, Jean Collin m’avait refusé le titre de Chevalier du Lion à cause de mon jeune âge. Ensuite, Assane Goumbala, alors conseiller sportif du Président Abdou Diouf, avec la complicité de Cheikh Tidiane Dièye, lui aussi conseiller en communication de Diouf, avait volé l’argent que le Président Abdou Diouf m’avait offert après mon titre de vice-champion du monde cadet obtenu en Belgique en 1989. 16 ans après, grâce à la générosité de Wade, je suis à la place d’Assane Goumbala. J’évoque tout cela pour vous dire seulement que nos Présidents ne sont pas toujours aidés par leurs proches collaborateurs. Diouf n’était pas mauvais en soi, mais il était coupé de beaucoup de choses. C’est la même chose avec le Président Wade dont les instructions ne sont pas souvent suivies d’effet. Par exemple en 2000, le Président Wade nous avait offert une villa pour nous récompenser, Ndongo et moi, après notre titre de champion du Monde Blitz, mais malgré nos multiples relances et qu’on soit tous les deux ses conseillers, on n’arrive pas à rentrer dans nos droits. C’est pour vous dire qu’un Président ne peut pas tout faire, il lui faut des collaborateurs loyaux pour l’aider dans sa tâche.

Vous êtes maintenant dans la politique, quel sens donnez-vous à votre engagement militant ?

Je suis un jeune qui a des ambitions pour mon pays et pour sa jeunesse justement. Je veux servir mon pays et non se servir de mon pays comme le font actuellement les politiciens toutes sensibilités confondues. Le Sénégal a aujourd’hui besoin d’une jeunesse citoyenne, éduquée, responsable, une jeunesse qui s’assume. Sûre de ses droits et consciente de ses devoirs citoyens. Une jeunesse qui refuse et qui espère.

Que voulez-vous dire par là ?

Je veux dire que cette jeunesse doit s’investir dans cette jungle de la politique dont vous parlez. Et essayer de faire de la politique autrement, avec une éthique. La jeunesse sénégalaise doit prendre conscience de la pleine mesure de sa force. Elle qui constitue plus de la moitié de la population. Donc je trouve qu’elle a un rôle capital à jouer car elle est l’avenir de la nation. Pour cela, elle ne doit pas être manipulé à souhait pour faire le combat des adultes qui récoltent les lauriers après qu’elle est versée sa sueur et son sang. Pour cela, j’invite toute la jeunesse de mon pays à s’investir en politique et de ne pas avoir peur, car on peut faire de la politique autrement comme je l’ai dit tantôt.

Comment par exemple ?

Il faut juste faire abstraction des difficultés et mettre en avant la noblesse des causes qu’on est amené à défendre, surtout quand on est animé par la morale de l’homme d’action qui est celle du politique au sens noble du terme. Moi je n’ai jamais fait de la politique avant d’être au service du Président Wade. Ce qui m’a poussé à faire de la politique après 10 ans de réflexion est une manière de m’investir pour le quotidien des Sénégalais. Je veux avoir mon mot à dire dans mon pays. Et je ne veux pas que des minables décident à ma place parce qu’ils ont accepté de faire de la politique même s’ils le font que pour eux- mêmes au détriment des populations qu’ils prétendent représenter.

L’arène politique est aujourd’hui très agitée, avec la crise sociale entre autres difficultés que rencontre notre pays. Quelle est selon vous la solution de sortie de crise ?

Moi je ne vais pas rester ici à faire l’avocat. Ce que je veux dire et qui est important pour moi, c’est d’appeler toutes les forces vives de la nation à se retrouver autour de l’essentiel. Si le Sénégal est en crise, tout le monde doit se retrousser les manches. Le bateau, la pirogue est commune, si elle sombre personne ne pourra échapper. Toutefois, je pense qu’il est temps d’assainir l’arène politique avec l’émergence du politicien nouveau qui a des convictions au service de la vérité et du peuple. Les politiciens ont théoriquement les mêmes ambitions pour leur pays, celle d’être à son service. Pour cela donc, ils ne doivent pas être des ennemis, car les ennemis se détruisent, tout au plus devrait-ils être des adversaires et mieux encore des adversaires loyaux. D’où la prière des poètes. René Charles disait : « Oh Dieu fasse que ces vieux ennemis deviennent de loyaux adversaires qui doivent s’épouser une fois pour toutes devant l’essentiel ». L’essentiel étant la transformation du quotidien et l’ouverture vers un avenir meilleur pour les population qui souffrent de renchérissement du coût de la vie. J’appelle donc encore une fois mes compatriotes, la jeunesse à plus de sérénité. Surtout les politiciens de quelque bord qu’ils soient. Car quand la case du voisin brûle, je ne suis pas à l’abri.

Ça va être difficile ce que vous dites dans le contexte actuel. C’est quoi la solution pour y arriver à votre avis ?

Je pense que l’opposition doit rester une opposition républicaine. Qui doit se méfier des perversions politiques pour ne pas confondre l’action de l’excitation. La politique politicienne ne doit pas plus être de mise dans notre pays. Le président Wade a été réélu démocratiquement et le Sénégal n’a jamais été aussi bien gouverné, même si le bilan n’est pas parfait. La perfection n’étant pas de ce monde, il est plus que positif et est visible. L’opposition a le droit de jouer son rôle en s’opposant, mais d’une manière républicaine en dénonçant les manquements et les errements du régime libéral. Et elle doit aussi avoir l’honnêteté intellectuelle de reconnaître sa défaite et les réalisations du Président Wade, en attendant les prochaines élections où le peuple aura la latitude d’arbitrer.

Un mot sur la question de la succession du Président Wade qui fait débat ?

L’héritage d’Abdoulaye Wade n’est précédé d’aucun testament. Je pense que tout père rêve d’être remplacé par son fils pour une raison très simple : un vœu d’éternité, de la continuation de son œuvre. Mais dans le cas de Wade, faudrait-il que Karim soit digne de le remplacer et en ait les capacités. Si Wade choisit son fils, c’est parce qu’il pense qu’il sera à la hauteur, en perpétuant sa vision et son héritage, sinon, il choisira un autre. Et c’est au peuple que revient le dernier. Lui seul jugera de la faculté des uns et des autres par la voie des urnes. Personnellement, ça ne me gène pas que Karim soit candidat, il en a le droit. De toutes les façons, le choix de Wade sera le mien. Mais je ne crois pas au messie. Je crois à l’alternance générationnelle. Avec des jeunes nourris aux valeurs du wadisme et de la République.

Sinon ?

A défaut, ce sera l’implosion, car à part Wade, personne ne respecte personne dans le parti. Et c’est eux même qui le disent, c’est-à-dire ceux qui sont dans les instances de décision du parti. Wade est la seule constante. Donc théoriquement, après lui, c’est le déluge, le chaos. Pour cela donc je suis pour la grande retrouvaille de la famille libérale, sans mépris pour les anciens, donc sans âgisme ni jeunisme.

Vous n’avez pas la même vision que d’autres au Pds qui ferment la porte aux nouveaux adhérents ?

Moi je suis d’abord un républicain avant d’être un politicien et un wadiste, plus qu’un libéral. Si je suis les conseils de ma mère, j’arrêterai la politique après la fin de règne du Président Wade, mais si Dieu me prête vie, je trahirai ma mère comme j’ai trahi un de mes maîtres à penser, René Charles, qui aurait refusé d’intégrer le cabinet du Général de Gaulle pour rester libre et ne pas tomber dans les travers de la politique. Abdoulaye Wade, moi je l’aime d’amour et pour moi, l’amour ce n’est pas exclusivement un don de soi, mais c’est consentir, ce sont des valeurs en partage. Il y a des valeurs que je partage avec lui, et d’autres que je partage moins ou plus que je comprenais moins mais que j’ai compris mieux, maintenant que j’ai passé trois ans au Palais et que j’ai beaucoup appris avec lui.

La personne qui exerce sur vous une certaine fascination, Wade pour ne pas le nommer, provoque souvent l’opposition. Est-ce une marque de respect de son prochain ?

Vous savez, pour comprendre Wade, il faut passer peu de temps avec lui. Il ne s’agit pas de provocations. Pour me résumer, je rappelle que Wade est un politicien, joueur, un maître dans l’art politicien. Dans Wade, il y a un millier de Wade, Wade l’humaniste, Wade le libéral, Wade l’ogre qui mange ses enfants, Wade le généreux, Wade le clément… Bref Wade est un homme un homme de la contradiction, c’est pour cela qu’il est incompris. Et d’ailleurs à trop l’embrasser on se consume. La vie et la trajectoire politique ont fait de Wade une bête politique. Ce qui fait qu’aujourd’hui, il est le président de la République avec sa multidimensionnalité.

Mais malgré tout, il ne maîtrise pas son parti miné par des querelles...

Il y a autre chose que je vais vous dire, le Wade ogre mangerait même Karim son fils, qui est son sang, s’il n’est pas capable de perpétuer son œuvre, de préserver son héritage, je ne dis pas que Idy et Macky sont victimes de cela, mais c’est pour vous dire combien de fois il est exigeant. Car Wade est un bien commun, il n’appartient à personne, il est un viatique. Il est un bien pour le Sénégal et pour l’Afrique.

SB/FC



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