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Vendredi 01 Juin, 2018 +33
Politique

Bacar Dia (Ancien ministre) : «Un gouvernement 100 % Pds, ce n’est pas bon pour l’image»

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Bacar Dia (Ancien ministre) : «Un gouvernement 100 % Pds, ce n’est pas bon pour l’image»
L’ancien ministre de l’Information, porte-parole du gouvernement était réputé redoutable défenseur du régime libéral, mais surtout de Me Wade. Au point d’être surnommé Bacar Wade Dia. Aujourd’hui qu’il est hors de l’appareil, le secrétaire général du Front populaire révèle que sa stratégie consistait à harceler l’opposition, la mettre sur la défensive pour mieux ressortir les réalisations de Me Wade. Le Docteur Bacar Dia qui a jeté un regard sur la nouvelle équipe gouvernementale dit avoir l’impression que c’est souvent la rébellion qui est récompensée.

Wal Fadjri : Depuis votre éviction du gouvernement, il y a un an, on ne vous a plus entendu ni vu sur la scène politique. Pourquoi ce silence ?

Dr. Bacar Dia : Pourtant je suis bien là. Mais il faut dire qu’on ne m’entend plus dans le cadre des activités de mon parti. Je viens d’une tournée dans la région de Kaolack. Nous avons rencontré les militants et nous avons discuté avec eux sur la nécessité de restructurer notre parti. C’est vous dire que nous sommes en tournée nationale parce que nous allons vers un congrès au mois de décembre. Je suis plus centré dans les activités du Front populaire auquel je crois beaucoup.

Wal Fadjri : Qu’aviez-vous ressenti quand vous avez appris votre limogeage du gouvernement après avoir passé près de sept ans dans l’équipe ? N’étiez-vous pas frustré ?

Dr. Bacar Dia : Non, pas du tout. Vous savez, pour être franc, je dirai que j’ai eu le sentiment du devoir accompli. Si vous vous souvenez, en 2007, notre parti a rempli un stade avec plus de 15 000 personnes pour accompagner le président Wade après un bilan que nous avons jugé très positif. Nous avons investi le président Wade en 2007, et c’est lui-même candidat qui est venu présider ce congrès extraordinaire. Et je disais au président Wade devant toute l’assistance : ‘Monsieur le président, le Sopi ne vous appartient plus.’ Je crois en cela et je crois que nous avons tous la possibilité de faire du Sopi. C’est-à-dire de changer positivement notre environnement quel que soit là où nous nous trouvons. C’est vous dire que je n’ai aucune frustration, je n’ai aucune fixation. Ma mission dans le gouvernement a duré presque sept années. Ce ne sont pas les hommes qui choisissent la fin d’une activité, c’est Dieu qui finit les choses. C’est pourquoi, j’ai rendu grâce à Dieu et remercié le président Wade. Et depuis que nous l’avons investi et qu’il a accepté notre choix, je me devais avec mon parti, de garder jusqu’au bout ma part de loyauté vis-à-vis du Pds. Je suis certes sorti du gouvernement, mais je suis resté dans la mouvance présidentielle. Je suis un allié du Président Wade. A la seule différence que je suis maintenant un peu plus libre. C’est-à-dire que je n’ai plus cette contrainte de la solidarité absolue gouvernementale. Aujourd’hui, mon parti s’exprime librement sur certaines questions tout en ayant la claire conscience de la nécessité de rester solidaire au président Wade. Je ne sens jamais de frustration. Je suis un homme qui cherche juste l’équilibre et la sérénité dans ses actions. J’ai fait ce que j’avais à faire en tant que ministre de l’Information et porte-parole du gouvernement. En tant que ministre des Sports également. Ce n’était pas du tout évident. Vous avez vu qu’au département du Sport, j’ai pris certaines décisions courageuses concernant par exemple les primes des joueurs de l’équipe nationale de football que j’avais refusé de payer, parce que je sentais qu’il était utile de remobiliser cette équipe autour du sentiment de fierté nationale. J’avais pensé à l’époque qu’il fallait absolument réduire le train de vie de l’équipe nationale. Je trouvais indécent de mettre chaque fois deux millions de primes après chaque victoire alors que les autres fédérations n’avaient rien du tout. J’ai souvent refusé de collaborer lorsque parfois des hommes proches du président Wade m’ont demandé de signer des dossiers d’un milliard pour un entrepreneur. Cela m’a créé des ennemis, mais je ne regrette absolument rien.

Wal Fadjri : Vous avez battu le record de longévité au poste de ministre de l’Information et porte-parole du gouvernement. Est-il facile de porter la parole d’un gouvernement avec un président comme Me Wade ?

Dr. Bacar Dia : Ce qui est compliqué à mon sens, c’est que chacun porte quelque part une parole. Souvent dans le gouvernement, chaque département cherche à faire voir par lui-même et pour lui-même ses propres réalisations. C’est une difficulté parce que là, le porte-parole du gouvernement n’a pas les mains libres pour coordonner l’activité de communication du gouvernement. Il faut donc savoir prendre ses responsabilités. Moi, quand j’y étais, d’abord j’ai engagé les caravanes de communication qui étaient transversales et rendaient visibles les activités de tous les ministères. Heureusement, les ministères collaboraient bien et on avait une mise à jour des réalisations du gouvernement. La deuxième chose, c’était ‘Les grands débats de l’info’ qui était des débats contradictoires où toute la presse était présente. C’étaien des attaques. Moi je crois en la contradiction.

L’autre difficulté liée au poste est que le porte-parole du gouvernement ne peut pas être conciliant. On ne peut pas porter la parole du gouvernement donc être chargé de défendre le bilan d’un gouvernement et jouer à l’équilibriste. J’étais souvent très tranché. Tout le monde se souvient de mes positions. J’avais cette stratégie de harcèlement. Je ne cessais de harceler Ousmane Tanor Dieng et son parti. Pourtant je l’aime bien, mais il incarnait justement le Parti socialiste pendant l’ère de sa défaite. Et tout cela créait des stigmatisations. Donc, il fallait absolument harceler l’opposition, la mettre sur la défensive pour ensuite pouvoir rendre visibles les réalisations du chef de l’Etat. (…)

‘J’ai souvent refusé de collaborer lorsque parfois des hommes proches du président Wade m’ont demandé de signer des dossiers d’un milliard pour un entrepreneur. Cela m’a créé des ennemis, mais je ne regrette absolument rien’.

Wal Fadjri : Est-ce à dire qu’être porte-parole du gouvernement signifie que vous devez défendre l’indéfendable ou vous faire l’avocat du diable ?

Dr. Bacar Dia : Non, je pense que c’était un écart de langage. Il n’y a rien d’indéfendable dans l’action politique. Moi j’étais resté sur des principes : ces principes, c’était les questions des infrastructures, de l’Education, et aussi de l’audiovisuel. Je vous donne un exemple. Dans le domaine de l’audiovisuel - parce que quand j’étais porte-parole, je mettais l’accent sur ce que j’ai de positif - quand je suis arrivé, il n y avait qu’une seule télévision. Je salue la télévision nationale qui, historiquement, a fait ses preuves. Il n’y avait que ça. Est-ce que vous pensez que c’est juste, dans ce contexte du 21e siècle, de mondialisation et de technologies de l’information que le Sénégal ait une seule télévision ? C’était une aberration. Et c’est à partir de là que sont nées des télévisions comme Walf Tv. J’ai entendu d’ailleurs Sidy Lamine Niasse (Pdg du Groupe Wal fadjri, Ndlr) poser le problème de ses fréquences dans les régions. Ce sont des questions essentielles qu’il faut régler. Je l’avais dit quand Youssou Ndour demandait sa télévision. Et le ministre de l’Information m’avait appelé pour me dire qu’il n’avait pas apprécié ma position. Et l’histoire semble m’avoir donné raison. Aujourd’hui c’est la même chose avec Sidy Lamine Niasse. Il faut savoir lire la trajectoire historique. C’est la force du président Wade. Aujourd’hui Sidy Lamine doit avoir ses fréquences dans les régions. Il ne faut pas que les gens créent de petits problèmes inutiles au Président Wade. Donc l’avènement de toutes les télévisions privées au Sénégal porte quelque part ma petite signature grâce à une confiance et une démarche anticipatives du Président Wade . Ne serait-ce que la libéralisation de l’audiovisuel, c’est un acquis positif qui fait qu’on ne doit pas avoir de complexe à défendre le chef de l’Etat. Je crois que ce qu’a fait Me Wade dans le domaine de l’audiovisuel, il faut être très courageux pour le faire. Sidy Lamine Niasse fait du bon travail et il faut l’encourager et non chercher à arrêter les choses à mi-parcours. Nous avions tous des doutes, des suspicions quand on lui octroyait sa télévision. C’était quand même très risqué. Et quand je signais cette fréquence suivant des orientations données par le président Wade, combien d’alliés, de membres du Pds sont venus me voir pour me dire : ‘Ce que vous faites est dangereux.’ Mais, je l’ai fait, le président m’a soutenu. Je crois qu’il était le seul d’ailleurs à me soutenir car même le Premier ministre Macky Sall qui est aujourd’hui dans l’opposition, je puis vous garantir qu’il était extrêmement réticent dans le processus de libéralisation. Quand je le vois maintenant attaquer le chef de l’Etat sur cet angle, j’ai des problèmes. Parce que lui était souvent un facteur de blocage de ce processus de libéralisation. Macky Sall n’était pas du tout d’accord avec certaines télévisions et certaines radios qu’on devait lancer. (…)

Wal Fadjri : Le chef de l’Etat vient de procéder à un remaniement ministériel, n’êtes-vous pas déçu de ne pas voir un membre de votre parti entrer dans le gouvernement ?

Dr. Bacar Dia : (Rires) Je vous assure que ce sont mes camarades de partis qui m’ont appelé pour me dire qu’il y avait un remaniement. Je vous assure que je suis maintenant un peu loin des fonctions ministérielles. J’ai fait presque sept ans dans le gouvernement et je suis sorti sans décevoir les Sénégalais, sans décevoir mon parti. C’est mon sentiment. Je suis sorti du gouvernement sans être accusé de quoi que ce soit. Ce n’était pas évident. Souvent quand on limoge un ministre, vous entendez les gens dire que le président l’a viré pour telle ou telle faute ou qu’il est incompétent. Cela n’a pas été mon cas. La deuxième chose est que sur dix millions de Sénégalais, tout le monde ne peut pas être ministre. Et c’est ce que je dis toujours à mon parti. Je leur dis : ‘Si vous voulez être ministres, allez à la conquête du pouvoir, travaillez à convaincre l’opinion’. Il est vrai que le président a beaucoup d’alliés et le Pds a intérêt à agir de façon inclusive et non exclusive. Il y a des expertises avérées dans la Cap 21, dans l’Ast et le Président Wade gagnerait à prendre en compte ces expertises-là. Cheikh Bamba Dièye l’actuel maire de Saint-Louis était dans la mouvance présidentielle. De même que le député Moustapha Diop Jamil. Aujourd’hui, ils sont partis et sont en train de faire de bonnes choses ailleurs. C’est une fausse impression qu’on transmet au Président Wade en lui disant que vos alliés sont de petits partis. Il n’y a pas de petits partis dans ce pays.

Seulement, certains partis bénéficient d’une respectabilité plus que d’autres… Aujourd’hui on a l’impression d’avoir un gouvernement cent pour cent Pds. Ce n’est pas une bonne impression quand on a une coalition qui fait plus de soixante partis et au finish avoir un gouvernement où un seul parti allié est représenté. Ce n’est pas une bonne image de la coalition. (…). Toutefois, est-ce qu’il est bon de dire qu’on a été récompensé parce qu’on a crié ? Parce qu’on tapé sur la table, parce qu’on a brûlé des pneus ? Personnellement, je trouve que ce n’est pas bon. J’ai été démis et je n’étais pas à l’époque le moins brillant des ministres et mon parti est très présent sur le territoire national, capable de faire du mal et de nuire, mais après mon éviction du gouvernement, nous n’avons pas bronché. C’est cela la bonne attitude. Mais je crois que, de plus en plus que, c’est la rébellion qui est récompensée.

‘L’essentiel ce n’est pas de dire que le président m’a désigné pour diriger l’Ast. Il faut concevoir le poste de coordonnateur de l’Ast comme une manière de faciliter son fonctionnement. Lorsqu’on voit ce poste de coordonnateur comme un moyen d’avoir des privilèges ou pour diriger, cela pose problème. ’

Wal Fadjri : Comment analysez-vous la crise actuelle qui secoue l’Alliance Sopi pour Toujours et dont vous êtes membre ?

Dr. Bacar Dia : Je suis avec le président de la République et j’ai vu naître la première alliance qui l’a accompagné, je veux parler de la Cap 21. J’ai vu que beaucoup de partis qui avaient accompagné le président, ont refusé de rejoindre la Cap 21. Mais ensuite il y a eu une évolution. Je suis sorti du gouvernement et j’ai appris la naissance de cette Alliance. Je signale que je n’étais pas là-bas. Mais je souligne ici que le Sopi n’appartient pas aux partis qui composent cette coalition. Le Sopi est un bien national. C’est pourquoi je regrette toutes ces sorties dans la presse. La coalition n’a pas besoin de ça. Notre besoin se situe au niveau du bilan économique, social, et des perspectives que nous proposons aux Sénégalais. Ce débat de ‘je dirige ou je ne dirige pas la l’Ast’ est un débat personnel. Ces gens qui se querellent aujourd’hui ne sont pas plus représentatifs que mon parti. Mais, moi, je n’occupe aucune fonction dans cette coalition et ne figure dans aucune commission. Parce que ce n’est pas le plus important. J’ai dit à mes amis de And-Jëf (version Decroix) qu’affirmer que la Cap 21 est là pour déstabiliser l’Ast, ce n’est pas une bonne chose. Que gagne-t-on à être coordonnateur de l’Ast ? Peut-être que cela leur permet juste d’être plus proche du président Wade. C’est peut-être ce qui les intéresse (…).



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