BONJOUR L’ AFRIQUE | La démocratie, cahin caha

Les événements survenus récemment dans certains pays du continent, y compris ceux considérés autrefois comme des modèles, n’incitent pas du tout à l’optimisme. Ainsi, en est -il du Zimbabwe où le Président Robert Mugabe, ancien héros de la guerre de libération, est devenu une caricature de dictateur, refusant obstinément de passer la main, quitte à plonger dans la guerre civile son pays qu’il a ruiné avec une réforme agraire aussi désastreuse que démagogique.

Longtemps considéré comme un havre de paix, le Kenya a aussi frôlé le pire avec des affrontements inter-ethniques qui ont failli être une réédition du génocide rwandais. Là encore, ce sont des fraudes grossières constatées lors de l’élection présidentielle qui ont mis le feu aux poudres. Même l’Afrique du Sud, pays-phare de la « renaissance africaine » a vu son image sérieusement écornée par la récente poussée de fièvre xénophobe dont ont été victimes des émigrés africains.

Devant ce tableau fort sombre, il est alors tentant de cultiver l’afro-pessimisme et de se dire que décidément, il faut désespérer de l’Afrique.

Raccourci facile car malgré tout, la situation n’est pas aussi catastrophique que le laissent penser certains clichés qui ont la peau dure. Plus que jamais, en dépit des guerres civiles, de la corruption pathogène et des élections truquées, les Africains restent attachés à la démocratie. Sous la pression conjuguée d’une presse de plus en plus indépendante, d’une opposition vigoureuse et de la société civile, les régimes dictatoriaux ont de plus en plus mal à se maintenir au pouvoir. Ainsi, le Bénin, premier pays à expérimenter les fameuses « conférences nationales » à l’origine du pluralisme démocratique dans les années 90, abrite une des sociétés civiles les plus dynamiques sur le continent. Une société civile qui est pratiquement devenue le garant de la Constitution béninoise, une des rares à n’avoir jamais fait l’objet de ces révisions constitutionnelles qui consistent souvent à proroger indéfiniment le mandat du Président de la République. De même, des pays comme le Mali et la Mauritanie qui ont pourtant connu des coups d’Etat militaires, ont réussi une transition démocratique exemplaire sanctionnée par des alternances pacifiques au pouvoir.

Au Sénégal, autrefois vitrine de la démocratie en Afrique, la volonté prêtée au Président Wade de se faire succéder par son fils, par une dévolution monarchique du pouvoir, s’est heurtée à la résistance des initiateurs des « Assises nationales », des rencontres parrainées par la société civile qui visent à trouver des solutions à l’impasse économique et politique que connaît ce pays. De surcroît, la jeunesse africaine est de plus en plus exigeante en matière de démocratie et n’hésite pas à descendre dans la rue pour se faire entendre. Au point que certains artistes comme le chanteur ivoirien, Tiken Jah Fakoly ou le rappeur sénégalais Didier Awadi, auteurs de textes très engagés, sont devenus les cauchemars des satrapes qui s’accrochent encore au pouvoir.