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Politique

Cartes sur table avec Ousmane Tanor Dieng (Suite et fin) « Aujourd’hui, le comité directeur du Pds, est infesté de transhumants du Ps… »

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Cartes sur table avec Ousmane Tanor Dieng (Suite et fin) « Aujourd’hui, le comité directeur du Pds, est infesté de transhumants du Ps… »

Dans cette deuxième et dernière partie de l’entretien qu’il nous accordé, Ousmane Tanor Dieng, secrétaire général du Ps, aborde la lancinante question des Assises nationales, les défections qui y ont été enregistrées, les nouvelles adhésions, l’analyse qu’en fait le Front Siggil Sénégal. Le cas Idrissa Seck, l’avenir de son parti, le Ps. Sans oublier l’état de ses relations avec Abdou Diouf. Entretien.

Pour parler des assises nationales, l’on a constaté un bon démarrage, mais on y a noté des défections. Qu’en pensez-vous ?

D’abord, nous pensons comme l’écrasante majorité des Sénégalais, que ce lancement a été une grande réussite, qui a même surpris le pouvoir. Parce que Abdoulaye Wade disait que ces gens-là n’iront nulle part, ils n’ont même pas de termes de références. Nous avons les termes de références, et mis en place le comité national de pilotage. Ensuite, il dit que ces gens-là ne vont même pas s’entendre pour démarrer. On démarre ; et maintenant, il dit, « j’attends les résultats qu’ils vont produire ». Il va encore attendre, parce qu’il sera surpris, parce que nous savons où aller, et quoi faire. Nous savons travailler, parce que la plupart d’entre nous ont fait au moins un quart de siècle au service de l’Etat. On peut tout nous reprocher, sauf de ne pas connaître l’Etat. Ce que nous faisons, nous y irons de manière à ne point être reprochables, en conformité aux règles de la république. On ne peut nous reprocher de faire un complot, alors que tout se fait au grand jour. Nous invitons tout le monde, et continuons à le faire à l’endroit de Me Wade et du gouvernement. De venir, de discuter avec nous, de partager avec nous le diagnostic que nous allons faire, l’analyse que l’on va faire, les conclusions et recommandations que nous allons faire. Ils peuvent même venir, et dire qu’ils ne sont pas d’accord sur ce que nous faisons, donner leur position. C’est une invite, et l’on ne désespère que Wade et son régime reviendront à la raison pour partager avec nous ce diagnostic qui n’est point un complot. Pour dire simplement que nous ne nous faisons pas d’illusions ; parce que le gouvernement qui ne veut pas venir, fait des pressions, chantages, menaces, intimidations pour dissuader des citoyens, afin de faire échouer notre entreprise. Je crois que nous sommes comme dans un train, des gens descendent au moment où d’autres montent. De toute façon, nous irons à bon port. J’avoue que j’ai été déçu de constater le départ de gens comme Babacar Ndiaye, qui a beaucoup fait pour ce pays. Il était avec nous, avait exprimé son engagement, et travaillé avec nous. En un moment, il décide de quitter. Il est libre de le faire. Je respecte son point de vue, comme celui de tous ceux qui partiront. Sur ce plan, je salue le comportement des doyens comme Amadou Mactar Mbow, qui a tout fait pour le Sénégal, qui continue de le faire, malgré son âge ; et qui a même risqué sa jeunesse, en allant en guerre, pour apporter sa contribution à l’indépendance du pays… Je salue sa grandeur et sa sagesse. Il a servi le Sénégal au niveau international, défendu nos couleurs. Quelqu’un comme celui-là, s’il s’engage à son âge, c’est qu’il a vu une cause juste et noble. Un très grand citoyen ! Sa déclaration montre qu’il est clair, qu’il n’y a ni procès, ni complot. Tout le monde devrait être rassuré de cette entreprise. Il s’agit d’inviter les fils du Sénégal à échanger autour des crises multiples, pour chercher des solutions. C’est inédit en Afrique, au Sénégal, que des syndicats, la société civile, les politiques, se retrouvent pour chercher des solutions de sortie de crise. En soi, c’est déjà extraordinaire, et si l’on arrive à des résultats ce sera pour le bien de tout le monde, un précédent pour l’Afrique, mais surtout une manière pour le Sénégal de confirmer l’exception sénégalaise. Je comprends, c’est une initiative nouvelle, inédite, audacieuse, et c’est normal que certains ne comprennent pas les enjeux. Qu’ils nous observent, et ils comprendront que ces assises sont des bonnes choses, un renforcement de la démocratie dans notre pays.

Pouvez-vous nous dire le nom des nouveaux adhérents ?

J’avoue qu’il en a quatre : Yoonu Askanwi, Ferniente, l’Udf/Mbollomi du professeur Pape Demba Sy... On nous signale qu’il y en aura d’autres. Maintenant ce qui reste à faire, c’est de commencer les consultations citoyennes au niveau des départements. En ce qui me concerne, la semaine dernière, j’étais à Kaolack pour sensibiliser, écouter les citoyens et recueillir leurs préoccupations, défendre les assises nationales pour expliquer cette intoxication du pouvoir qui veut faire croire au peuple que les assises nationales sont organisées pour menacer la sécurité du pays.

Certaines sources disent que le refus de Idrissa Seck de participer aux assises nationales vous a fait mal. Qu’en est-il exactement ?

Non, non ! Je pense qu’un invité a le droit de ne pas venir. Nous l’avions invité parce que nous pensions qu’il pouvait venir participer à notre aventure. Il a considéré que toutes les conditions n’étaient pas réunies ; il faut que Abdoulaye Wade vienne. Que Me Wade vienne ou pas, nous continuerons à travailler, nous ne l’attendons pas. S’il ne veut pas venir, nous n’allons pas perdre du temps avec lui. Ce n’est pas juste, et l’on ne peut pas juger le caractère national d’une rencontre par la participation ou non d’un parti. La preuve, nous avions boycotté les législatives, et d’après leurs estimations, l’Assemblée nationale a été élue avec un taux de participation de 34 % des Sénégalais, et pourtant l’Assemblée a un caractère national. Ce n’est pas sérieux comme argument.

D’autres disent que les assises organisées pour le Ps. Qu’en pensez-vous ?

C’est une campagne d’intoxication, de fiction pour essayer de donner mauvaise conscience aux participants. Tout le monde sait que c’est une œuvre commune, nous avions pris ensemble l’initiative au niveau du Front Siggil Sénégal ; une initiative partagée par tout le monde. Les personnes qu’on a rencontrées avaient les mêmes initiatives que nous. Les syndicalistes, la Cnes, la société civile, le Cncr, Unacois, le Forum civil, etc., tout le monde avait la même idée. Notre mérite, c’est d’avoir pu détecter et identifier les préoccupations de tous les acteurs de ces secteurs en crise, de les formaliser et de tout fédérer. Aujourd’hui, le bureau des assises nationales est quasiment conduit par la société civile, formelle, ou « informelle » tel que Amadou Makhtar Mbow. Si nos entreprises, syndicats, la société civile, des retraités pour servir encore le pays, décident de lever tous les tabous, de discuter, de s’entendre, ce serait une chose extraordinaire.

Comment voyez-vous l’avenir de votre parti, le Ps ?

Aujourd’hui, après les élections de 2000, notre visibilité sur le paysage politique sénégalais ne souffre d’aucun doute. D’ailleurs, Abdoulaye Wade ne s’y trompe pas. Nous sommes ses adversaires naturelles, adversaires du point de vue historique. Vous savez les conditions dans lesquelles le Pds a été créé. Abdoulaye Wade est venu de nos flancs, après sa défaite à Kébémer, pour parler de parti de contribution... En plus, eux, ce sont des libéraux, et nous des socialistes, nous n’avons pas la même idéologie ; et enfin, nous sommes ses propres adversaires, parce qu’il nous a battus en 2000, et nous devons préparer la revanche. Notre travail vise la reconquête du pouvoir ; et le battre démocratiquement. La seule différence, c’est que nous, nous étions des démocrates ; et lui, comme le disait Me Ousmane Ngom, « il parle en démocrate et agit en dictateur ».

Mais comment analysez-vous les départs successifs du Ps de personnalités comme Mamadou Diop, Robert Sagna, Souty Touré, Abdoulaye Makhtar Diop ?

Je crois qu’il faut mesurer objectivement les mérites du Parti socialiste, parce que depuis 2000, Abdoulaye Wade a tout fait pour faire disparaître notre parti du paysage politique, avec la transhumance organisée, financée, les intimidations, les chantages, les achats de conscience etc. Ce qui a fait qu’en 2000, le tiers de notre bureau politique a transhumé vers le Pds. D’ailleurs, si je me rendais aujourd’hui au comité directeur du Pds, je n’y serais nullement dépaysé ; car il n’y a là-bas que d’anciens dirigeants du Ps. Il a tout fait pour nous liquider. Malgré tout, le parti socialiste reste un parti essentiel dans l’échiquier politique sénégalais ; et nous avons eu la possibilité de renouveler notre parti. Nous avons un réseau des universitaires dirigés par Assane Mbaye, Vision socialiste, le Mees, les femmes et le mouvement des jeunes, parmi les plus dynamiques du pays, avec Barthélemy Dias. Malgré les acrobaties de Me Wade à la veille des élections, avec les nombreux transhumants, notre parti reste, et demeure une des formations les plus importante du pays, sinon la mieux implantée. Nous avons aussi réussi l’alternance au sein du parti socialiste. Il y a eu Senghor, ensuite Diouf, et maintenant c’est moi. Aujourd’hui, la relève est assurée, j’ai 60 ans, et ceux qui ont 50, 40 et 30 ans sont là, et bien préparés, ils sont nombreux. A côté, il y a ceux qui ont fondé le parti avec Senghor. Je veux citer le Pr Assane Seck, Aboubacry Kane, Thierno Bâ… Nous, nous avons un vrai parti, différent du Pds, à la tête duquel tout appartient à Abdoulaye Wade, et s’il quitte, c’est fini ! Aujourd’hui, si je quitte, la relève est assurée. Le Ps n’appartient à personne, et n’est le patrimoine de personne.

Pourtant, certains vous accusent d’avoir imposé les Tanor’s Boys, contre les dinosaures du parti ?

Ils sont partis d’eux-mêmes, parce que estimant que la manière dont je gère le parti ne leur convient pas. J’ai dit ok, allons vers les renouvellements ; et c’est ce qui a été fait, devant les militants, pour qu’ils choisissent. Cela aussi, nous sommes le seul parti à le faire : déclaration de candidat, vote loin d’un congrès ; chaque coordination devant choisir son candidat pour rassembler, avec un comité électoral. On a dépouillé, et c’est dans ces conditions que j’ai été élu, contrairement à Senghor et Diouf qui ont eu à bénéficier de leur statut de président de la république, chef de parti pour influer, organiser, orienter, sur certaines décisions. D’ailleurs, ceux qui sont partis n’ont rien récolté. Quant à moi, j’ai eu conscience que si le Ps n’avait pas basculé dans l’opposition, ma formation d’homme d’Etat serait incomplète. En huit ans, j’ai encore beaucoup appris.

Au-delà des crises multiformes, quel appel lancez-vous aux Sénégalais, face à la dégradation des mœurs ?

Je crois que le problème le plus grave, c’est la dégradation des mœurs, c’est la déperdition aux niveaux des valeurs. Je lance un appel en ce sens pour un retour à des valeurs fondatrices de notre nation. Le « diom », le « fit », la dignité, la pudeur, ne sont pas de vains mots. Ce sont nos repères. Si chacun fait ce qu’il veut, c’est la déperdition. L’heure est à la reconstruction de l’homo-sénégalensis. D’ailleurs, nous devons bannir des termes comme « transhumance », de notre vocabulaire, des termes plutôt appropriés aux animaux. Ce qui veut dire que nous devons retourner aux valeurs fondatrices de notre société.

A regarder de très près votre salon, l’on décèle un certain goût des tableaux, des arts et de la culture. Un secret ?

Très jeune, et à l’âge de trente ans, j’ai eu la chance de côtoyer des hommes de valeurs comme le président Senghor. Un homme de culture... Avec lui, j’ai tout appris ? Ce qui m’a donné un certain goût de la culture et des arts. Avec lui, je me suis bonifié. Il m’a conseillé un jour d’être humble, modeste, et de croire en moi…

Quels sont actuellement l’état de vos relations avec le président Diouf ?

Des relations excellentes. Abdou Diouf disait, « j’ai eu raison sur tout le monde en choisissant Tanor Dieng » ; parce que tous sont partis ailleurs, et que moi je continue à croire au parti. Des relations amicales, de confiance totale. Disons qu’en langage africain, Abdou Diouf est mon grand frère. J’ai une admiration pour lui, et lui une affection en mon endroit. Il ne se passe pas un mois, sans que nous nous voyions, ou parlions...

Avez-vous toujours de l’espoir pour ce Sénégal ?

Je suis naturellement optimiste, et tout le monde doit croire en ce Sénégal. Un pays riche en valeurs, en ressources humaines qui n’ont d’ailleurs rien à voir avec sa taille géographique. Nous avons des ressources humaines de qualité, des hommes de sciences, de cultures, de média qui continuent de briller partout dans le monde, malgré les coups de poignard, et ruses de Me Wade.



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