Comment Wade liquide Karim

Karim est sur la liste noire de Wade. Comme feu Fara Ndiaye, comme feu Boubacar Sall, comme Idrissa Seck, comme Macky Sall, il subira le sort tragique de Icare. La Nation est unanime à voir en Wade Minotaure, ce montre grec né des amours de Pasiphaé et de Poséidon, qui éprouve une sorte de délectation à tuer un à un ses enfants.

La seule différence est que Wade a soumis ses fils idéologiques sus nommés à un rythme de vie infernal qui aboutit à leur liquidation politique alors qu’il installe son fils biologique sur un autel mortel en lui donnant les atours d’un ange. Les Sénégalais ne se trompent-ils pas donc en croyant que Wade veut faire de Karim son héritier ? Avec plus d’attention, on se rend compte que Karim, par la volonté de son père, semble être plus au poteau qu’au trône. Il bat des records d’impopularité et suscite une colère nationale en raison de ses libéralités dans la gestion des affaires publiques et des maladresses fatales de son père.

Ainsi, contrairement aux apparences et à une conception mondialement admise donnant à Wade une volonté de procéder à une dévolution monarchique du pouvoir au bénéfice de son fils, le Sénégal assiste, sans s’en rendre compte, à la douce et exquise exécution progressive d’un jeune homme à qui l’exécuteur donne tous les pouvoirs imaginables.

Chaque acte que Wade pose et chaque mot qu’il sort de sa bouche, isolent son fils et amènent les Sénégalais, détenteurs de la Souveraineté à le haïr. Wade a ainsi fait de son fils un monstre affreux, contesté par les uns et haï par les autres. Jamais, sous lui, un homme n’a été dénigré avec plus d’acharnement en réunissant sur sa tête anathèmes nationaux plus furieux que Karim Wade. Wade le fait exprès. Il tue simplement son fils non par sadisme, mais par nature. Il sait mieux que quiconque que la carte Karim Wade ne passe ni sur le plan politique encore moins sur le plan socio- culturel.

Sur le plan politique, le Pds authentique, non celui des transhumants, ne compte point laisser à Karim Wade le pouvoir conquis de haute lutte et sans lui. Wade le sait bien. Il sait que le Pds tolère son fils parce qu’il a le pouvoir mais ne le supporte pas. Aucune force politique ne se constitue pour Karim Wade. La « Génération du Concret » est une monstruosité désarticulée, non structurée et impopulaire qui ne passe pas non plus. La société civile comme les organisations politiques, même celles des ombrageux alliés du Pds, ne s’accommodent point de Karim Wade considéré comme le mal contemporain. Albert Bourgi, le 01 Août 2010, lors de l’émission Remue Ménage sur la Rfm avance même qu’il doute de la neutralité de l’Armée devant un complot politique monarchiste en faveur de Karim Wade.

Sur le plan socioculturel, Karim ne passe pas non plus. Wade le sait également. Les Sénégalais ne se retrouvent pas en ce fils du Walo qui connaît plus Versailles et Westphalie que Kébémer et Tivaoune. Karim Wade est comme l’enfant de Ousmane Gueye et de Mireille de la Vallée dans le roman "Un Chant écarlate" de Mariama Ba. Il est l’autre, ni noir, ni blanc, le Niouloul - Khéssoul qui veut diriger les masses sans leur parler dans le langage de son peuple ! Le clivage n’est guère ethniciste ni raciste. Il pose, dans un pays de plus en plus nationaliste comme le Sénégal, le problème de l’acceptation. Le problème entre Karim Wade et les Sénégalais est ainsi bien culturel. L’authenticité sociologique est un fait de civilisation. Même dans les religions révélées, il est enseigné qu’un Messager s’adresse à son peuple dans son langage.

A cela s’ajoute pour Karim Wade, une communication assez maladroite et non concluante qui confond information et dirigisme de la pensée dans le seul but de l’amener à s’applaudir à la soviétique.

Pire, Wade qui l’exécute en fait, à la grande colère nationale, « un enfant gâté », protégé aux dépens des autres enfants du Quartier . A cause de Wade, personne n’aime Karim, trop privilégié, trop protégé, trop « gâté » par un père et un pouvoir de parjure. « Mettre à l’abri son fils et bastonner le fils d’autre », telle est la méthode Wade qu’aucun Sénégalais n’accepte. « Karim, je dirai à ta mère que tu as bien travaillé. Mon fils est le meilleur. Mon fils est le plus intelligent. ». Ces sorties de Wade relèvent du cynisme non envers le peuple sénégalais qui se sent insulté mais envers Karim Wade lui-même qui, dans le secret de sa conscience, en mesure la gravité et l’impertinence. Ainsi Wade tue son fils qu’il a mis sur l’autel du sacrifice. Ce ne sera pas comme Abraham et son fils. Ce sera comme Minotaure et ses fils et après comme Minotaure et Thésée