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Politique

CONF'DE PRESSE - Serigne Mor Mbaye, coordonnateur du Msis : «J'ai dit à Idrissa Seck qu'il n'est pas question de revenir avec Wade»

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CONF'DE PRESSE - Serigne Mor Mbaye, coordonnateur du Msis : «J'ai dit à Idrissa Seck qu'il n'est pas question de revenir avec Wade»

Si Idrissa Seck préfère rester muet depuis sa déclaration de candidature aux élections présidentielles de 2007 en avril dernier, on ne peut pas en dire autant de certains de ses partisans. Lors d'une conférence de presse, qui a eu lieu samedi dernier à Paris, Serigne Mor Mbaye, le coordonnateur du Mouvement de soutien à Idrissa Seck (Msis), est longuement revenu sur la situation politique, économique et sociale du Sénégal, ainsi que sur la candidature et le programme politique de l'ancien Premier ministre.

EMIGRATION : «ENCORE UN NAUFRAGE, APRES LE JOOLA»

Ces jeunes, de 25 ans, j'ai discuté avec eux sur toutes les côtes sénégalaises. Ils m'ont dit qu'ils vont recommencer. Ceux qui étaient à Rabat pensent pouvoir endiguer ce mouvement d'émigration. Ce n'est pas possible! Peut-être qu'il faudra les tuer. De Toubab Dialao en passant par Dayane, ils m'ont dit qu'ils recommenceront à prendre les bateaux. Ce climat suicidaire peut verser dans la violence. Wade et la clique avec laquelle il gouverne sont capables de l'utiliser à d'autres fins. J'ai eu du mal à parler à ces jeunes. Au moment de l'alternance, j'étais professeur à l'Université de Dakar et je parcourais le pays, sans parti politique, pour leur parler. Je leur disais qu'ils avaient une chance de changer ce pays et leurs conditions : «Il faut vous inscrire, il faut vous battre !» Ce sont ces mêmes jeunes qui me disent aujourd'hui : «C'est toi qui nous avais fait voter Abdoulaye Wade, tu vois bien que cela ne marche pas.» Je leur réponds qu'on va essayer encore de chasser ce personnage-là, pour remettre le pays sur les rails et le redresser. Mais, je ne peux pas les empêcher de partir. Dans mon village, les jeunes sont en train de vendre les champs et les pirogues, pour repartir vers les côtes espagnoles. J'ai inventorié plus de 150 jeunes que je connais, qui ont grandi devant moi. Ils me disent qu'ils vont recommencer, qu'ils n'avaient qu'un moteur, et que maintenant, il leur en faut deux pour y aller. Ils envisagent d'embarquer à partir de Saint-Louis pour gagner du temps, parce que le courant est trop fort entre la petite et la grande côte. Que voulez-vous que je leur dise? Ils sont nés devant moi. Certains ont disparu, d'autres sont cachés en Mauritanie, appellent pour dire qu'ils sont à Barcelone et attirent les autres. Avez-vous vu ces Guinéens qu'on a embarqués, depuis les îles de Loos, au large de Conakry, et qu'on a débarqués sur les plages de Mbour, en face de l'hôtel Aldiana, en leur disant qu'ils sont arrivés en Espagne? C'est dramatique, c'est un génocide, des boat people. C'est encore un naufrage, après Le Joola. Abdoulaye Wade devrait avoir honte que son peuple s'engage dans des bateaux. Rien que pour cela, il devrait démissionner et laisser le pouvoir. Il a échoué devant ces jeunes qui l'ont élu et à qui il disait «Qui n'a pas de travail ?Je vais vous donner, à tous, du travail !». Il fait pitié ce personnage.

OU EST PASSE IDRISSA SECK ?

Idrissa Seck est de passage à Paris, il parcourt le monde, rencontre les communautés sénégalaises. Nous aussi, Msis, nous avons été en Italie, où vivent 40 000 Sénégalais, puis en Espagne au mois de décembre dernier. Nous parcourons la diaspora, car elle est essentielle dans tout changement au Sénégal. C'est elle qui nourrit les Sénégalais. On parle de 4 à 5 milliards de francs Cfa qui arrivent chaque année sur le territoire national en provenance de la diaspora. C'est l'argent du migrant qui soutient les familles ; ce n'est pas le gouvernement de Abdoulaye Wade ou une politique de développement. Cette diaspora, travailleurs comme intellectuels, représente des ressources humaines capitales pour aller vers le changement. Ces citoyens à part entière ont leur mot à dire. Nous cherchons des électeurs certes, mais pas seulement cela. Nous cherchons des hommes et des femmes qui ont des compétences avérées et qui sont parfois dans une position de peur par rapport à ce pays-là. En Allemagne, j'ai rencontré un grand savant sénégalais travaillant dans des laboratoires allemands. Il a tenté d'aller s'installer dans son pays, pour ouvrir une usine de fabrication de médicaments. Il n'a pas pu. Il a 65 ans ; il a pleuré devant moi en me disant : «Mes enfants vont vendre mes brevets. Je ne vais même pas pouvoir en faire profiter mon pays.» Il existe tellement d'hommes et de femmes, qui ne veulent que rentrer pour travailler pour leur pays et participer à la dynamique de changement. C'est ça qui nous mobilise.

ROLE DU MSIS

Nous sommes en phase avec Idrissa Seck ; il est notre partenaire. Nous l'avons choisi comme leader. Je lui ai rendu visite lorsqu'il était en prison. Je lui ai dit : «Monsieur le Premier ministre, le mouvement social qui t'accompagne veut une rupture avec Abdoulaye Wade, parce qu'il t'a mis en prison sur la base d'un complot.» Il m'a répondu : «Je suis tout à fait en phase avec vous.» C'est pourquoi le Msis a lancé à l'époque Idy 2006, c'est-à-dire Idrissa Seck se présentant aux élections de 2006. Depuis, il est sorti de prison et a posé sa candidature.

Notre travail, notre objectif, à notre naissance, c'est la massification : essayer de rassembler ce que notre peuple a de meilleur, capitaliser ce fort mouvement qui a amené le Sénégal à l'alternance. Et nous avons réussi : nous comptons 980 000 membres au Msis, chiffrés, sur la base de nos cartes. C'est ce qui a fait dire à Abdoulaye Wade : «Le Msis, ce n'est pas normal que ça existe, ce n'est pas un parti politique.» De l'air de dire : «Je peux interdire le Msis.» Et moi de rétorquer : et tous ces «Falaat Wade ! ». (...) Le rôle de coordonnateur du Msis, que je suis, est de prendre le pouls du pays. Le Msis est organisé à partir des milliers de points focaux. Dans chaque ville, chaque village, nous avons des points focaux. Nous avons donné des consignes à ces gens : ils doivent discuter avec les populations, sur les préoccupations de leurs terroirs, sur ce qu'elles pensent du pays... Vous savez ce que les gens disent et que j'ai dit à Idrissa Seck ? Ils disent qu'il n'est pas question de revenir avec Wade. C'est l'unanimité dans notre pays. Alors j'ai dit à Idrissa Seck qu'il n'était pas question de revenir avec Wade. Et c'est ce que les populations nous disent à 90 %. Je lui ai dit : «Tu es l'otage d'un peuple exigeant, dont la conscience est arrivée à maturité et qui sait ce qu'il veut. Il veut en découdre avec Wade.» Il m'a dit qu'il a pris son engagement : «En déclarant ma candidature, mon engagement est ferme sur cette question.» On lui a rendu compte de ce que les Sénégalais espèrent. Ces jeunes que j'ai rencontrés sur toutes les côtes disent qu'ils ne veulent pas du programme Reva (Retour à l'agriculture), et surtout pas avec Farba Senghor. Je lui ai rendu compte de la tonalité de l'engagement de la diaspora : une tonalité extraordinaire ! Ils vivent et espèrent participer au redressement de ce pays. Je lui ai dit que nous voulons un vaste rassemblement. Il l'a confirmé, il veut rassembler les forces sociales intéressées au changement du Sénégal

QUEL PROGRAMME POLITIQUE ?

Idrissa Seck s'est porté candidat, il y a à peine deux mois. C'est clair et net. Il a choisi le moment où cela a fait le plus mal pour porter sa candidature. Est-ce qu'il devrait parler ' C'est quelqu'un de pragmatique et de rationnel. C'est le psychologue qui parle. Il a innové au plan politique, en termes de réflexion, pour porter l'action de façon économique et pragmatique. C'est ce qu'il a toujours fait depuis qu'il est au pouvoir. Là où les Sénégalais en veulent terriblement à Abdoulaye Wade, c'est qu'il a nommé un Premier ministre qui a mis en place un discours de politique générale consensuelle. Même l'opposition était d'accord sur ce discours. Mon ami, Amath Dansokho, grand patriote devant l'Eternel, était d'accord. Il a dit : «Nous ne pouvons rien dire. Nous sommes d'accord avec ce que Idrissa a dit, si les choses vont dans ce sens.» Ce discours est un programme. Il existe des secteurs prioritaires sur lesquels Idrissa Seck avait mis l'accent dans son discours : le tourisme, les phosphates, l'artisanat, le coton... Comment donner de l'énergie à ces secteurs? Et surtout créer du travail ! Le drame de notre pays, c'est qu'on ne travaille pas. Nos jeunes, qui représentent 60% de notre population, ne travaillent pas. L'école, le grand mensonge ! Ils disent qu'ils ont mis 40 % du Budget national dans l'éducation, mais c'est faux ! L'école est un gâchis énorme. Ils ne font que du bluff ! (...) Il faut rendre formelle la gestion de notre pays. Ce qu'il y a de plus informel dans ce régime, c'est de se lever et de dire : «Cultivez du maïs! Cultivez du manioc !». Qui a vu un Sénégalais manger du manioc, si ce n'est un petit bout dans son assiette ? Il y a quelque chose de vulgaire, à la limite du cynisme, dans ce pouvoir (') Je suis de tradition paysanne, je sais que l'arachide permet de vivre toute l'année : acheter une charrette, se marier, faire le baptême. Toute la vie sociale était organisée autour de cette arachide. Aujourd'hui, la paysannerie se retrouve sans rien. C'est cela le caractère du cynisme, à la limite génocidaire (')

LE MSIS ET L'OPPOSITION ?

Nous ne sommes pas un mouvement sectaire. Nous sommes ouverts à toutes les forces sociales intéressées à parachever l'alternance, y compris l'opposition traditionnelle. C'est cela notre bataille. (...) Le Msis souhaite que notre peuple, avec une coalition, arrive à battre Abdoulaye Wade. Et Idrissa Seck en a parlé tout à fait clairement en disant qu'aucun homme politique ne peut gouverner seul le Sénégal. C'est évident. Il faut une coalition telle celle qui a fait l'alternance. Il y aura des difficultés pour cela. Il y a une prise de conscience incontournable, celle de nous débarrasser de cette clique. (...) Les neuf personnes qu'on appelle frondeurs comptent beaucoup au Pds et c'est pour ça qu'ils sont partis. Ces hommes et femmes, nous les rencontrons quotidiennement, parce qu'ils travaillent pour le Msis. Tout le potentiel électoral de ces hommes et de ces femmes, qui constituent le groupe des frondeurs, se retrouve dans le Msis.

ETAT DE SANTE DE IDY ? Vous vous souvenez du moment où il avait perdu sa voix, j'en étais témoin ? Idrisssa Seck avait rencontré 500 Sénégalais de tous les secteurs de la vie sociale, pour préparer son discours de politique générale. Qui peut le faire sans perdre la voix ? Lorsque l'autre voyageait partout dans son avion pour recevoir ses médailles, il fallait bien que quelqu'un garde la maison. Il dormait à une ou deux heures du matin. Il se levait parfois à trois heures du matin pour aller à Thiès voir les chantiers et faire une réunion à sept heures du matin. On avait dit à cette époque qu'on lui avait jeté un sort, comme le disent nos amis ivoiriens. En tout cas, je n'ai pas vu une perte de voix d'Idrissa Seck. Est-ce qu'il est stressé ? C'est le psychologue qui parle. Ce qu'il a vécu en prison est terrible. Jean-Paul Dias en est sorti en pleurant. Il doit se reposer de cela aussi. Quelque part, il met aussi à profit ce retrait pour rencontrer sa famille et ses enfants, pour essayer de se débarrasser de ce moment assez stressant qu'ont été ces sept mois de prison. C'est quelqu'un qui fait du sport régulièrement et qui est en bonne santé.

RETOUR DE IDRISSA SECK ? On n'a pas parlé de son retour. Mais, il faut qu'il vienne rapidement parce que le temps presse. Je lui ai dit que les Sénégalais l'attendent le plus rapidement. C'est à lui aussi de voir, du point de vue stratégique, si les choses sont arrivées à maturité. Il voyage parce que vous savez que le Sénégal n'est pas un îlot. Il fait partie d'un monde mondialisé. Il y a des intérêts qui ne sont pas seulement nationaux. Il faudrait se faire connaître, créer des réseaux, rencontrer la classe politique et la société civile internationale.

APPEL A LA COMMUNAUTE INTERNATIONALE ? Une petite clique vient tenir le pays en otage pour manipuler les élections. La communauté internationale ne doit pas les laisser faire. Il y a toute une dimension de prévention des conflits et des risques à venir. J'interpelle l'Onu, la société civile mondiale, pour dire qu'il faudrait, pour le Sénégal, mettre la pédale pour que cette clique ne mette pas le pays en péril. Il ne faut pas se leurrer : ce sont les gens qui ont fait l'alternance qui sont aujourd'hui massivement dans le Msis. Ce ne sont pas des politiques, c'est la masse populaire, qui aspire au changement. C'est l'originalité du Msis. Partout où nous allons, les hommes et les femmes viennent au Msis et nous disent : «Moi, je ne veux pas faire de politique, je veux le changement. Je veux que Abdoulaye Wade, qui nous a trahi, s'en aille.» Nous avons une population dont 60% a moins de 25 ans. Des jeunes désespérés, ceux que vous voyez dans les bateaux et qui disent : «Barça ou Barsakh» (Barcelone ou l'Au-delà). C'est le mot d'ordre des jeunes qui prennent les bateaux ; je les ai interviewés. Dans un climat suicidaire, à haut risque, je fais appel à la communauté internationale, à la société civile, au gouvernement français qui, aujourd'hui, se plaint de tous ces jeunes amenés sur les côtes espagnoles. Il faut faire en sorte que, dans notre pays, la démocratie soit et qu'on nous aide à nous débarrasser de cette clique, qui organise la rapine et la corruption. Nous demandons que la communauté internationale sonne le tocsin pour dire à Wade d'arrêter de jouer avec le pays.

 



1 Commentaires

  1. Auteur

    Allons Y Molo

    En Octobre, 2010 (18:36 PM)
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