CONFERENCE A NEW-YORK - Le secrétaire général de l’Afp déclare ne plus jamais soutenir le Président : Niasse désespère de Wade

C’est au pays de l’Oncle Sam que le secrétaire général de l’Alliance des forces de progrès (Afp) en compagnie de Madieyna Diouf et un groupe de femmes, est sorti de sa réserve, dimanche dernier, au cours d’une conférence et en présence de plusieurs représentants de partis politiques sénégalais. Un parfum de réponse flottait dans ses propos comme pour répondre à la sortie du chef de cabinet du président de la République l’accusant d’avoir été à la base de l’appel de ce dernier à l’opposition pour favoriser son entrée dans le gouvernement. Jurant à plusieurs reprises sur Dieu, Moustapha Niasse a signifié qu’il n’a jamais été question d’un poste de ministre ou de répartition de quoi que ce soit, au cours de son audience avec Wade qu’il prend d’ailleurs à témoin.

Emmuré dans un silence, depuis la sortie de Pape Samba Mboup, le chef de cabinet du chef de l’Etat l’accusant d’avoir préparé un deal avec le Président Wade, c’est finalement un dojo, à la 116e Avenue, à Harlem, que le secrétaire général de l’Afp, Moustapha Niasse, a choisi pour livrer sa part de lumière sur cette affaire. Le leader des «progressistes», rapportent plusieurs Sénégalais présents à la conférence, a révélé que, chaque année, le Président Wade réitère son appel à lui pour entrer dans son gouvernement ; ce qu’il a du reste, affirme-t-il, toujours refusé. Comme s’il désespère désormais de Me Wade, Moustapha Niasse a d’ailleurs déclaré au micro de notre confrère Dame Babou des propos fort éloquents rapportés par Sud-Fm, hier.

«Bilahi Walahi Talahi, Wade le sait plus que vous : même au 17e tour, je ne le soutiendrai pas.» Le secrétaire général de l’Afp ajoute que ce qu’il ne savait pas avant, il ne le savait pas. Avant de dire : «Maintenant, je sais ce que je ne savais pas et je ne peux pas me tromper deux fois. Je ne le soutiendrai pas au 2e tour.» Rassurant ses alliés de la Cpa, M. Niasse confirme que son parti est «pour un candidat unique qui qu’il soit. «Si demain, vous voyez que l’opposition n’a pas opté pour ce candidat unique, ce n’est pas la faute de l’Afp».

Sans le nommer, le patron des «progressistes» répond à Pape Samba Mboup pour préciser qu’il a «parlé avec Abdoulaye Wade des problèmes avec lesquels les Sénégalais sont aujourd’hui gravement confrontés». Puis de re-préciser : «Nous n’avons pas, encore une fois, parlé de postes ou de répartition de quoi que ce soit et je prends le Président Wade lui-même à témoin». Après ce chapitre, Moustapha Niasse a conclu ainsi : «Je n’ai pas l’habitude, parce que je ne veux pas descendre du niveau où mes responsabilités doivent me situer, de polémiquer. Je ne polémiquerai donc pas.».

NON A UN POSTE MINISTERIEL !

Afin que nul n’en ignore, le leader de l’Afp dira au cours de sa conférence, selon plusieurs sources concordantes à New-York, qu’il n’est jamais plus question pour lui d’être ministre. Cela, il le laisse aux jeunes de 36 ans. Cela d’autant plus, fera-t-il savoir à l’assistance, qu’il gagne plus aux Nations-Unies que pour un poste ministériel. M Niasse, rapportent nos interlocuteurs, a également évoqué son salaire de député pour dire qu’il l’a toujours remis à des Daaras, notamment celui de Coky. Et qui plus est, «il n’a jamais posé ses yeux sur sa voiture 4x4 de député de l’Assemblée nationale». C’est pour clamer que ses biens, il les a acquis à la sueur de son front. A propos de la prorogation du mandat des députés, Moustapha Niasse a fait remarquer que lui a démissionné de l’Institution parlementaire, depuis le 30 juin. Cette décision personnelle n’engage pas son parti et les autres députés «progressistes».

Aux femmes qui vivent et travaillent au pays de l’Oncle Sam, Moustapha Niasse fera remarquer que l’argent que Me Wade leur remet, elles le rembourseront sous une autre forme, car chacune d’entre-elles a une famille à entretenir au Sénégal où le coût de la vie a vertigineusement augmenté. Il a donné l’exemple de l’électricité qui manque et qui a pourtant augmenté de 15%. M. Niasse a également décrié la question relative à l’approvisionnement du pays en carburant. Le Sénégal en est réduit, aujourd’hui, a-t-il expliqué, à s’approvisionner au carburant au mois, alors qu’avant on disposait d’un stock pour un an. La clé qui explique cette situation, avance le patron de l’Afp, c’est le manque d’argent au niveau de l’Etat. Or, dans ce domaine, il faut des transactions bancaires et avoir des garanties.

Moustapha Niasse ne se fait pas une idée positive du gouvernement du Premier ministre Macky Sall. Interpellé sur le dernier remaniement, il juge, selon un de nos interlocuteurs, que «c’est un gouvernement bidon avec des postes vides de sens». Avant de lancer : «un gouvernement de travail ne doit pas dépasser 24 ministres». Sur les projets de Me Wade, Moustapha Niasse s’est appesanti sur les travaux routiers à Dakar. Ces travaux bloquent, pour lui, la capitale sénégalaise. D’ailleurs, soutient-il, si on investit tout à Dakar, la conséquence sera de créer un déséquilibre par rapport aux autres régions.

Au cours de la conférence, un responsable du Rassemblement des travailleurs africains/Sénégal (Rta/S), Fallou Guèye interpellera M. Niasse sur son bilan avec les Présidents Senghor, Abdou Diouf et Abdoulaye Wade. Pour le leader de l’Afp, rapporte-t-on, faire ce bilan serait synonyme de traîtrise de sa part. Faire le bilan à l’extérieur de son compagnonnage de 40 ans avec Senghor et Diouf, qui ne sont plus maintenant au pouvoir, serait indigne, s’est justifié Moustapha Niasse. Il reconnaît que Senghor et Diouf lui ont appris à gérer un Etat. Et cela lui a servi dans le cadre du redressement de la situation au Congo où, il faut le préciser, il représente Kofi Annan, pour le compte de l’Onu. D’ailleurs, il affirme assumer son militantisme au Parti socialiste (Ps), en bien comme en mal. Et qui plus est, M. Niasse refuse de juger le Ps, lui qui se voit avec Ousmane Tanor Dieng, chaque semaine.

IRONIE ACERBE

Le patron de l’Afp, un tantinet ironique, a abordé la promesse tenue naguère par Me Wade de régler le problème de la Casamance en 100 jours. A ce propos, il rapporte avoir interpellé le Président sur la question pour se voir répondre : «Oh ho, Moustapha, laisse ça !» Sous le même rapport, le leader des «progressistes» croit savoir que si Wade a échoué dans la réalisation de ses grands projets, c’est parce qu’il ne dit jamais Inchallah. Railleur à souhait, l’ancien ministre des Affaires étrangères du Président Abdou Diouf a dit que «s’il y avait une école pour former des chefs d’Etat, il fallait y envoyer Wade en apprentissage». Un Wade qui, selon lui, «connaît mieux New-York, Hongkong que Kédougou et Tamba».

Moustapha Niasse a tenu à préciser qu’il n’est pas venu à New-York pour les besoins de sa campagne électorale, mais juste pour échanger. D’ailleurs, soutient-il, s’il doit mener une campagne électorale, il privilégierait la France où il y a plus de 28 000 inscrits, alors qu’il n’y en a que 5000 aux Etats-Unis malgré la présence d’une forte communauté sénégalaise.

Nos interlocuteurs informent que la conférence de Moustapha Niasse s’est terminée un peu dans le désordre, vers minuit, du fait du modérateur, El Hadj Ndiaye à qui une partie de l’assistance a reproché une distribution tendancieuse de la parole. Certains ont d’ailleurs préféré partir avant la fin de la conférence. <18>[email protected]