Elections locales - Fann, Point-E, Amitité : Un symbole qui tombe sous la coupe de « Bennoo Siggil Sénégal »

« On peut envisager la défaite partout sauf ici », résume un membre influent de la majorité présidentielle. Pourtant, l’impensable a eu lieu. Ici, c’est la commune d’arrondissement de Fann, Point-E, Amitié, au cœur de Dakar ; une zone symbolique pour tous : Sopistes comme opposition, société civile comme désintéressés de la chose électorale. C’est que tout le monde s’y retrouve. Les grosses pontes de la classe politique y tiennent leurs quartiers. Beaucoup y habitent dont les figures les plus en vue dans le boueux marigot politique Sénégalais.

Pour les élections locales du 22 mars 2009, une situation paradoxale fait que même s’ils votent dans leurs fiefs respectifs dans les zones rurales, les « majors » vivent dans la zone et tiennent à y imprimer leurs marques. Les adresses des uns et des autres parlent d’elles-mêmes. Le Point-E a une histoire intimement liée à la famille du président Wade qui y vit depuis le début des années 70. L’ancien Premier ministre, Moustapha Niasse, le secrétaire général de l’Alliance des forces de progrès, est une icône de Fann-Résidence. Son voisin, loin de deux rues, est lui aussi ancien chef du gouvernement, le patron de l’Alliance pour la République / Yaakar, Macky Sall.

Retour au Point-E où gîte, dans sa « Maison blanche », un troisième ancien PM, le patron de Rewmi, Idrissa Seck. C’est cette collectivité locale qui est tombée dans l’escarcelle de l’opposition réunie au sein de « Bennoo Siggil Sénégal ». Mais le résultat est là : le patron de la majorité présidentielle et sa proche famille ont été battus dans leurs lieux de vote.

Si Me Wade a son bureau de vote dans le quartier, les autres accomplissent leur devoir électoral à Keur Madiabel, Fatick et Thiès. Cette commune d’arrondissement était donc l’une des plus courues en raison de la charge affective qu’elle entretient. Quartier des universités et de grandes écoles de formation, concentration de représentations diplomatiques et d’organisations non gouvernementales, elle est disputée par plusieurs listes qui tiennent à s’emparer d’une collectivité locale qui était jusqu’ici « gérée » par la « rewmiste » Ndèye Maguette Dièye, proche parmi les proches de l’ancien maire de Thiès.

Vaste programme

Elle a fait face à une très grande offensive de la « Coalition Sopi 2009 » conduite par le jeune conseiller financier du président Wade, Habib Mbaye, ancien président de l’Agence pour la réalisation de la plate-forme du millénaire de Diamniadio qui a réussi tant bien que mal à fédérer une liste qui était minée par le fait que le Pds dans la zone est mité par les partisans de Idrissa Seck qui ont procédé à un extraordinaire maillage de la zone.

Dopés par l’entrée en campagne du président de l’Anoci, Karim Wade, fils du président de la République et résidant dans la zone et qui faisait figure d’épouvantail, les libéraux ont pourtant été laminés par l’opposition. Selon toute vraisemblance, le Dr Malick Diop, de l’Alliance des forces de progrès, a de fortes chances d’être le prochain édile de la commune, si les résultats provisoires sont confirmés. Pourtant, rien n’a été ménagé par la majorité présidentielle pour renouveler son bail avec une collectivité locale qui lui est favorable depuis l’érection des communes d’arrondissement en 1996.

L’actuel ambassadeur du Sénégal en Italie, Cheikh Sadibou Fall, y a été le premier maire de la commune d’arrondissement. A la faveur du contrôle, par Idrissa Seck, de l’appareil du Pds, la collectivité locale fut confiée par la suite à Mme Ndèye Maguette Dièye. Paradoxalement ; elle n’a pas été mise sous « délégation spéciale » comme ce fut le cas pour les mairies de Thiès, Fatick, Sangalkam ou encore la commune d’arrondissement des Hlm dirigée par l’homme d’affaires, Abdoulaye Dieng, oncle d’Idrissa Seck.

Fann – Point E – Amitié représente donc à plus d’un titre un écho très fort des voix sorties du scrutin du 22 mars 2009. Naturellement, de lourdes conséquences devront en être tirées. Pour caricaturer, beaucoup de dirigeants de la « Génération du concret » et des ténors de la classe politique nationale seront des administrés de « Bennoo Siggil Sénégal ». Vaste programme.