Enième remaniement ministérielLes infirmités du nouvel attelage gouvernemental

Annoncé depuis quelques jours, le remaniement ministériel tant attendu a finalement eu lieu hier. Mais à l’arrivée, la montagne a accouché d’une souris  : entrée en fanfare de polémistes hors-pair, inflation de ministres d’Etat à la présidence de la République et de ministres-conseillers, émiettement des départements ministériels. Source : Le Populaire

Le président de la République, Me Abdoulaye Wade, a procédé hier à un énième remaniement ministériel, à trois mois des élections présidentielle et législatives. Mais il faut d’emblée faire remarquer que ce nouvel attelage gouvernemental souffre de plusieurs infirmités. D’une part, avec la promotion de personnalités réputées être des polémistes hors-pair comme Me El Hadji Diouf, Secrétaire général du Parti des travailleurs et du peuple (Ptp), qui a hérité du département du Réseau hydrographique national : cours d’eau, bassins de rétention, lacs et canaux latéraux, Abdourahim Agne, Secrétaire général du Parti de la réforme (Pr) qui se retrouve ministre de la Microfinance et de la Coopération internationale décentralisée et Me Abdoulaye Babou, ancien porte-parole des progressistes qui a été propulsé à la tête du ministère de la Fonction publique, du Travail et des Organisations professionnelles. Dénominateur commun de ces trois hommes politiques : ils n’ont pas leurs langues dans leurs poches et faisaient partie, il n’y a guère longtemps, des plus grands pourfendeurs de Me Wade et de son régime. Abdourahim Agne avait même été détenu pour avoir "appelé le peuple au soulèvement", à travers une marche orange. Me Babou était réputé pour ses envolées contre le Président Wade lors des plénières à l’Assemblée nationale. Idem pour Me El Hadji Diouf qui ne ratait aucune occasion pour traiter le chef de l’Etat de tous les noms d’oiseaux. C’est ce trio, réputé pour sa virulence contre le pouvoir de Me Wade, qui a été porté hier au firmament pour jouer, sans aucun doute, le rôle de bouclier contre les nombreux adversaires politiques du président de la République. D’autre part, le nouveau gouvernement du Premier ministre Macky Sall est marqué par l’émiettement des départements - ce qui n’a aucun sens - et également une inflation de ministres d’Etat à la présidence de la République, avec notamment la nomination de Serigne Mamoune Niasse, Premier serviteur du Rassemblement pour le peuple (Rp).

Cette inflation de ministres d’Etat à la présidence de la République, des super-ministres qui n’ont rien à envier au Premier ministre, n’a également aucun sens. L’explosion démographique à la présidence de la République est accentuée par l’arrivée d’une nouvelle vague de ministres-conseillers. En effet, le Palais est en passe de devenir un dépotoir pour tous les ministres défenestrés du gouvernement. Ce qui a été amplement prouvé hier : Abdoul Malal Diop, Marie-Pierre Sarr Traoré, Sokhna Touré et Mamadou Sidibé, tous limogés par Me Wade, ont été reversés au Palais comme ministres-conseillers. Pour tout dire, ce "gouvernement de mission", pour paraphraser le Premier ministre Macky Sall, va davantage grever le Budget national et n’est en fait qu’une façon pour le Président Wade d’entretenir une clientèle politique en mal de repères. Toutes choses qui font que ce énième remaniement ministériel, qui ne s’explique pas à trois mois des prochaines élections, n’avait pas sa raison d’être. Même s’il a fait des heureux, avec le retour au premier plan de Khoureïchy Thiam (ministre de l’Artisanat) et la montée en puissance de deux ministres : Aïda Mbodj et Aliou Sow, qui se retrouvent respectivement à la tête du département de la Femme, de la Famille, du Développement social et de l’Entreprenariat féminin, et de celui de la Jeunesse et de l’Emploi. Sans oublier l’entrée dans le gouvernement du N°2 du Rp, Oumar Khassimou Dia (ministre des Sénégalais de l’extérieur) et le maintien des ministres d’And-Jëf/Pads.