ENTRETIEN AVEC… Barthélemy Dias, secrétaire général du Mouvement national des jeunesses socialistes : « Le régime libéral est une honte pour le Sénégal »

Au moment où le débat sur la question du leader de l’opposition refait surface, le secrétaire général du Mouvement des jeunesses socialistes tire la couverture du côté de son parti. Barthélemy Dias, avec son même franc-parler, estime qu’il n’y a pas un problème de leadership dans l’opposition, d’autant que Ousmane Tanor Dieng, secrétaire général du Partis socialiste (Ps) en est le leader. Sans gants, M Dias brocarde les jeunes libéraux et leur mentor, Abdoulaye Wade.

Depuis que vous êtes élu secrétaire général des jeunesses socialistes, on vous entend de moins en moins. Cela vous a-t-il muselé ?

C’est votre opinion personnelle. C’est vous la presse qui détenez les canaux de diffusion et vous me sollicitez moins qu’avant. Mais, nous, on continue de travailler au niveau de la base et nous l’animons avec les moyens du bord.

Avec le mouvement national des jeunesses socialistes, j’ai plus de responsabilités. De par cette position, j’ai des responsabilités au niveau du Front Siggil Sénégal. C’est encore plus de temps. Mais, je n’ai pas d’épée de Damoclès au-dessus de ma tête. Le parti ne met aucune pression sur moi. Nous sommes en train de chercher nos repères et, dans les jours à venir, le combat va s’intensifier.

Qu’est-ce que vous envisagez, concrètement, dans ce combat ?

Nous espérons bien que la base répondra positivement au débat sur la participation ou non aux élections locales. Dans un premier temps, nous mettrons l’accent sur la sensibilisation pour inviter les Sénégalais à participer à la révision des inscriptions sur les listes électorales. Ensuite, nous animerons la base pour espérer gagner le maximum de mairies possibles. En même temps, nous invitons tous les Sénégalais aux Assises nationales.

Apparemment, vous incitez la base à accepter d’aller aux élections locales, alors que les motifs pour lesquels vous aviez boycotté les législatives sont valables pour les locales…

L’objectif principal du boycott des élections législatives était de démontrer à l’opinion que Me Wade et ses affidés ont volé l’élection présidentielle et cela, nous l’avons réussi. Aucun politologue ne peut expliquer le fait que 80% d’un électorat boycotte une élection aussi importante. C’est bien la preuve que le boycott est une bonne chose pour prouver que les Sénégalais n’ont pas voté en masse pour Me Wade. Deuxième élément : le rapport de la Cena qui vient de sortir nous réconforte dans notre position. Ce rapport ne dit rien d’autre sinon que, ces élections présidentielles étaient une mascarade totale. Aujourd’hui, la vocation d’un parti politique est de participer à des joutes électorales. Nous, on a boycotté les législatives et notre objectif est atteint ; donc, ces élections sont derrière nous. Maintenant, c’est la base qui doit se décider et si elle continue dans cette lancée, on ira aux locales. La plupart des réponses qui nous parviennent sont positives. Si cette tendance se confirme, nous participerons à ces élections avec les partis du Front Siggil Sénégal, certains membres de la société civile et les personnes qui peuvent apporter de la plus-value à leur localité.

Mais vous aviez boycotté les législatives en initiant en même temps des Assises nationales. Cet objectif n’étant pas encore atteint, vous décidez d’aller aux élections locales. Est-ce que l’opposition ne démontre pas ainsi une désorganisation ? N’est-elle pas en train de suivre deux lièvres en même temps ?

Pas du tout ! Les Assises nationales, c’est pour trouver une solution de sortie de crise. Aujourd’hui au Sénégal, à l’exception de quelques demeurés, tout le monde est d’accord que le pays va mal. Le patronat, les syndicats, les politiques, toutes les composantes de la société sont d’accord. Je rappelle que sur le plan politique, nous avons un contentieux qui doit être vidé. Et cela le sera, Incha Allah. Maintenant, ce que nous voulons, c’est tenir les Assises et si la base le souhaite, participer aux locales. Les élections locales sont différentes des présidentielles. Ce n’est pas le même type. Ceux qui connaissent bien les élections municipales, vous diront que le Pds ne peut pas rafler tout et l’opposition peut en dire de même. Ce qui est important pour l’opposition, c’est d’aller ensemble pour gagner le maximum de localités.

Mais, les Assises nationales constituent une bouée de sauvetage pour le pays. La situation nationale ne peut plus durer ; sinon le pays va droit au mur.

Où vous en êtes-vous avec cette alliance de l’opposition pour aller ensemble aux élections locales ?

Aujourd’hui au Front Siggil Sénégal, tous ceux qui sont préoccupés par l’avenir du pays s’activent. La société civile est prête à accepter la main tendue du Fss. Ensemble, nous pouvons créer une dynamique qui peut susciter de l’espoir. Les Sénégalais sont écœurés, aujourd’hui.

On sait qu’au niveau du Fss, il y a la Ca 2007 qui est une coalition, d’une part et les autres partis, d’autre part. Comme quoi, il demeure l’antagonisme en termes de leadership entre Moustapha Niasse et Tanor Dieng.

A l’Afp, il n’y a que des socialistes et, un jour, on va se retrouver autour de l’essentiel. Je profite de l’occasion pour dire, solennellement, que j’ai beaucoup de respect et de considération pour le Premier ministre, Moustapha Niasse. Mais, je dis, encore une fois de plus, que ce n’est pas moi qui vais faire des courbettes pour faire affaire avec des gens qui, peut-être (il insiste), n’ont pas envie de faire affaire avec moi. C’est mon opinion personnelle. Aujourd’hui, il n’y a pas de problème de leadership dans l’opposition. Tout le monde sait que le leader de l’opposition significative au Sénégal, s’appelle Ousmane Tanor Dieng. Le dernier baromètre, c’est l’élection présidentielle ; même si elle a été trafiquée. Ceux qui ne veulent pas le comprendre, tôt ou tard, descendront de leur nuage. On ne va pas mettre de gants pour dire que le leader, c’est Tanor. Il a su être constant depuis 2000. Qu’on le veuille ou pas, l’opposition naturelle au Parti démocratique sénégalais (Pds), c’est le Parti socialiste. C’est le Ps qui a été battu en 2000. Je refuse d’entrer dans des polémiques de leadership, il n’y en a pas ; il n’y a qu’un seul leader : Tanor.

Pensez-vous que l’Afp avec Moustapha Niasse accepterait de s’allier derrière le Ps et Ousmane Tanor Dieng ?

Ce n’est pas une question de se mettre derrière ou avant ; la question, c’est de cheminer ensemble. Moustapha Niasse est un leader politique ; l’Afp est une force politique considérable et respectée, mais il n’y a pas d’anguille sous roche concernant le leadership de l’opposition. Le leader est connu et il s’appelle Ousmane Tanor Dieng. Maintenant, que certains ne veulent pas se mettre derrière le Ps pour des raisons que je ne maîtrise pas, je respecte leur point de vue.

Certains observateurs ont parlé de votre liberté de ton comme d’un handicap pour votre accession au Bureau politique ; maintenant que vous avez franchi le pas, avez-vous changé vos attitudes pour rester en phase avec la ligne du parti ?

C’est des gens qui ont des opinions personnelles sur moi. Mais, je reste moi-même. J’ai beaucoup de respect pour les membres du Bp, en commençant par le Secrétaire général. Et ils me le rendent tous bien. Je ne manque de respect à qui que ce soit. Ceux qui pensent que j’ai un style un peu particulier, c’est parce que nous sommes dirigés aujourd’hui, par un groupuscule d’individus un peu particulier aussi. Le problème, c’est les gens qui pensent que Barthélemy est différent. Je suis différent parce que nos dirigeants sont différents. On ne peut pas applaudir des menteurs et des voleurs. J’utilise un style que j’assume, parce que le régime libéral constitue une honte et une insulte pour le pays.

Mais, les jeunesses libérales disent autant de vous ; ils ne vous prennent pas au sérieux…

Je veux dire à ces jeunes libéraux que faire de la politique, ce n’est pas l’art d’exceller dans les louanges. Ce que vous appelez jeunesses libérales souffrent d’anonymat, sont en manque de base politique. Ils ne sont rien d’autre que des vers de terre qui ont décidé de s’aplatir pour faire plaisir au prince. Il n’y a pas de jeunesses libérales à mes yeux ; je m’adresse à Abdoulaye Wade et mon combat se dirige contre lui et personne d’autre. On ne peut pas dire qui est le responsable des jeunesses libérales. Il y en a un qui n’est pas militant du Pds. Je rappelle au passage que ceux qui se disent libéraux, ont milité au Parti socialiste et faisaient partie des jeunesses «Tanoristes».

Vous faites allusion à qui ?

Non, je ne vais pas citer de noms ; c’est leur donner de l’importance. Ils se connaissent. Aujourd’hui, ils sont de l’autre côté parce qu’ils sont des alimentaires. Abdoulaye Wade vient de dire à l’un d’entre eux que c’est un incapable. La vérité est qu’ils sont tous des incapables ; ils ne sont pas mesure de réaliser une politique de jeunesse cohérente. Ils n’ont aucune vision. Le combat que nous menons contre Abdoulaye Wade va continuer. Et je lance un appel à Abdoulaye Wade. A Bruxelles, nous avons tout mis en œuvre pour manifester contre lui ; il a fui, il n’est pas venu. Il n’a qu’à savoir qu’on l’attend. Et, je ne polémique avec aucun responsable à deux francs des jeunesses libérales. Wade doit arrêter de fuir et venir, quand il organise quelque chose.

A vous entendre, c’est comme si vous avez un problème personnel avec Me Abdoulaye Wade.

Non ! Mais, Abdoulaye Wade constitue une honte et une insulte pour ce pays. Il doit partir et nous ferons tout ce que nous avons à notre disposition pour débarrasser le Sénégal d’Abdoulaye Wade.