L'ex-Premier Ministre est resté aphone : Ce que cache le silence d'Idrissa Seck

S'il ne communique pas à travers des Cd, Idrissa Seck reste aphone. Une manière, bien singulière, de faire de la politique qui commence à montrer ses limites. Est-ce la raison pour laquelle l'ex-Premier ministre tend la main au président Abdoulaye Wade pour lui demander de retirer, en sa faveur, sa candidature à la prochaine présidentielle et de lui laisser aussi la direction du Pds ?

Idrissa Seck s'est-il essoufflé ? La question ne manque pas d'intérêt et peut même paraître provocatrice. En effet, aux coups d'éclats qui ont suivi sa sortie de prison s'est succédé un silence inquiétant. Un silence que rien ne vient perturber, même pas les annonces en grande pompe de la sortie d'un troisième Cd qui tarde à sortir des alcôves du maire de Thiès. Plusieurs fois annoncé pour imminent, ce Cd n'a jusqu'ici pas vu le jour. C'est comme si Idrissa Seck s'était rendu à l'idée que la politique du coup d'éclats ne fait plus saliver. Il lui faut proposer autre chose aux Sénégalais. On ne s'oppose pas à travers des Cd. La notoriété politique s'acquiert sur le terrain. On l'y perd aussi. Il a expérimenté le contact avec les populations à Thiès, puis à Kaolack, mais sans leur parler. Depuis, plus rien.

L'ex-Premier ministre s'offre une villégiature en Europe au moment où le Sénégal est à un tournant décisif de son histoire. Le pouvoir décide de faire voter les militaires, l'opposition tergiverse sur la question du maintien ou non de ses députés à l'Assemblée nationale. Sur toutes ces questions et sur bien d'autres, tel que le processus électoral qui piétine, les Sénégalais auraient bien aimé entendre Idrissa Seck donner son point de vue. Mais, c'est silence radio de sa part. C'est à croire que le maire de Thiès oublie qu'il est désormais un opposant. Il a, en effet, officiellement, signé son entrée dans le camp de l'opposition après sa déclaration de candidature à la présidentielle le 4 avril dernier, jour de la fête de l'Indépendance. A cette occasion, on se souvient qu'il avait annoncé un programme de redressement national que les Sénégalais n'ont toujours pas vu. D'ailleurs, l'accueil que les leaders de l'opposition avaient accordé à son invite autour de ce programme avait eu l'effet d'une douche froide. Presque en chorus, ils l'ont rejeté en suggérant à l'ex-Premier ministre plus de modestie. ‘L'époque de l'homme providence est révolue’, disait Abdoulaye Bathily dans un entretien accordé à Wal Fadjri quotidien.

Le maire de Thiès, hormis ses mouvements de soutien et le Fidel de Yankhoba Diattara, n'a pu rallier à sa cause que Mamoune Niasse avec son Rassemblement pour le peuple (Rp) et Jean-Paul Dias et son Bcg. Une bien maigre moisson pour quelqu'un qui aspire à se présenter à une élection présidentielle. Cela a-t-il émoussé ses ardeurs ? En tout cas, la tournée politique nationale qu'il avait initiée, a été brusquement interrompue après l'étape de Kaolack. Sans aucune explication. Pourtant, son passage dans le bassin arachidier n'en était pas moins une réussite. Mais, ses détracteurs pourraient lui rétorquer que c'est grâce à l'appui de Mamoune Niasse. L'aura d'Idrissa Seck serait bien mieux quantifiable s'il s'était rendu, par la suite, dans certaines régions du Sénégal où on ne lui connaît aucun allié politique local de grande envergure. Le maire de Thiès s'est passé volontiers de ce test. L'a-t-il différé pour mieux fourbir ses armes, ou est-ce un changement de stratégie politique dans sa conquête du pouvoir ?

La dernière sortie de son porte-parole, Oumar Sarr, incline à croire que l'ex-numéro deux du Pds veut aller au palais de la République sous la bannière du Pds de Me Wade. Sa proposition est on ne peut plus claire : par la voix d'Oumar Sarr, il demande à revenir à la tête du Pds. Mieux, il propose au secrétaire général national du Pds de retirer sa candidature en sa faveur à la prochaine élection présidentielle. Un discours qui jure d'avec l'assurance notée, naguère, lors de ses sorties. Il déclarait, sans ciller, dans un langage imagé, que le Pds est comme une entreprise et qu'il y était l'actionnaire majoritaire. Cela voudrait dire, selon cette logique, que s'il quittait ce parti, il amènerait avec lui plus de la moitié des militants libéraux. Seulement voilà, Idrissa Seck semble avoir oublié sa promesse de vider le Pds de ses militants. Il demande à revenir dans la maison du ‘père’, tel un petit galopin fugeur, après avoir promis l'enfer à celui-ci. Tout se passe comme si l'ex-Premier ministre était subitement désabusé. Il s'est rendu compte qu'il était entouré, pour reprendre l'expression du journal Le Confidentiel, de ‘businessmen politiques’. La querelle de préséance que se livrent les membres de son entourage n'est pas pour le démentir. Et devant le désordre qui règne dans sa maison, Idrissa Seck reste aphone.