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Politique

LA VIOLENCE POLITIQUE AU SENEGAL

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LA VIOLENCE POLITIQUE AU SENEGAL

« LA VIOLENCE POLITIQUE AU SENEGAL »

Les politiciens mettent le feu

Marcel Mendy fait la radioscopie, dans son ouvrage, « La violence politique au Sénégal », de ce phénomène en circonscrivant ses causes rélles. Il revisite les différentes catégories de la violence, avant d’identifier ses acteurs ainsi que leurs modes opératoires, sans oublier de cerner les vrais enjeux qui sous-tendent le phénomène. Le journaliste-écrivain indexe les hommes politiques qui en seraient les auteurs.

« Une fusillade nourrie a été ordonnée contre les membres de l’opposition, manifestant (…) contre les fraudes et le règne de l’arbitraire, pendant qu’un hélicoptère survolait les centaines de milliers de résistants (hommes, femmes, jeunes, personnes âgées), en les arrosant de grenades offensives (…) Le bilan officiel a été de 10 morts et de plusieurs blessés ». Le récit du Pr Iba Der Thiam ne sera suffisamment pas complet ou exhaustif pour décrire l’horreur des émeutes du 1er décembre 1963 sur les allées du Centenaire, l’actuel boulevard Général-de-Gaulle. L’incident s’est passé du temps où Léopold Sédar Senghor, le très puissant secrétaire général de l’Union progressiste sénégalais, était à la tête de L’Etat. Une formation qui régnait en maître sur l’échiquier politique. Sous le monopartisme de fait, pour reprendre les mots de l’auteur de « La violence politique au Sénégal ».
Dans ce bouquin de 263 pages, Marcel Mendy nous plonge, quarante-trois ans après, dans un passé entaché de sang. En faisant l’archéologie de la violence, sous deux séquences temporelles (sous le règne du parti unique de fait (1963-1974) et l’ouverture démocratique partielle), l’écrivain veut nous faire prendre conscience de l’ampleur d’un phénomène qui nous rapproche, chaque jour, de ces pays frappés par la foudre du chaos.

L’humus du monopartisme

Le contexte du monopartisme est-il est une sorte de terreau fertile pour l’expression d’une violence, sur fond de répression tous azimuts contre des opposants, avec une violation systématique des droits de l’homme. Cette période est caractérisée, selon l’auteur, par l’existence d’une presse aux ordres et d’un débat politique monopolisé par les thuriféraires du parti au pouvoir. Même le recrutement dans les emplois civils, nous dit le journaliste-écrivain, était tributaire de l’appartenance à l’Ups. Et sur la gestion du parti, le centralisme démocratique a eu des effets pervers à l’origine d’interminables batailles de positionnement, surtout lors des renouvellements. Résultat des courses, des animateurs se regardent en chiens de faïence.

L’ouverture démocratique n’y fera rien

Mais l’ouverture démocratique de 1974 a-t-elle baissé la fièvre de la violence ? Les batailles rangées de Maka Coulibantang, en février 1978 entre socialistes et libéraux prouvent le contraire. « Quand ils ont commencé à disperser notre meeting, il y a eu des bagarres (…) C’était une bagarre très violente (…) Mon chauffeur a sorti son fusil, il a tiré en l’air, puis il a rechargé, les gens ont reculé (…) Après, quand on a voulu partir, les gens nous ont poursuivis, et mes gardes du corps qui étaient dans une Citroën familiale que je venais d’acheter, l’ont laissée aux assaillants qui l’on brûlée (…) La tactique est très simple : on met des troncs d’arbre, et au moment où vous descendez pour les déplacer, ils arrivent avec des haches, des flèches », raconte Me Abdoulaye Wade interrogé par Marcel Mendy, l’auteur de « Wade et le Sopi ». Le bilan sera d’un mort et de nombreux blessés. Mais les instigateurs qui appartenaient au parti au pouvoir (Parti socialiste), ne furent pas inquiétés.
Cette situation de violence et d’insécurité allait perdurer jusqu’au départ de Senghor. Son remplacement par Abdou Diouf en 1981, grâce à l’article 35 de la Constitution, n’y fera presque rien. Réforme institutionnelle, situation économique et social difficile. Un cocktail explosif. Deux logiques s’affrontent : « l’une avait comme fondement l’aspiration très forte à l’alternance d’une jeunesse avide de changer ses conditions de vie, l’autre prenait appui sur la volonté clairement affirmée d’une classe dirigeante soucieuse de conserver ses privilèges ». Et pour l’auteur, « ce duel ne pouvait être que brutal, frontal, destructeur, ravageur. Les différents protagonistes étaient prêts à tout. Déterminés ». La surenchère verbale prenait le dessus sur toute autre forme de civilité, faisant ainsi le lit de la violence qui allait rythmer la campagne de la présidentielle, et qui atteindrait son point d’orgue avec l’assassinat du vice-président du Conseil constitutionnel, Me Babacar Sèye, le samedi 15 mai 1993, après la proclamation des résultats des législatives donnant Ps vainqueur.

Quand les politiques disjonctent

Et pour l’écrivain « la classe politique, sans jeu de mot, avait littéralement…pété les plombs. Repères perdus, bornes dépassées ; tel était le désolant spectacle offert par une élite politique désincarnée face à la populace qui, elle-même semblait ne pas retrouver ses marques dans ce maelströn (…) ». C’est clair dans sa tête : « Babacar Sèye aura été l’agneau du sacrifice ».
Ainsi, après les brigades de vigilance, les comités d’action, les comités de bastonnade, les calots bleus, les sentinelles rouges, les jambaar et autres milices chargées d’assurer la sécurité dans la sécurité dans les partis politiques, voici venu le temps des groupuscules terroristes, encagoulés, ayant des revendications politiques. Ils s’appellent « Mouvement de résistance du 29 février », en 1988, « Armée du peuple » en 1993, et « Cercle d’acier », en 2003.
L’auteur explique « lorsque les milices affiliées aux partis politiques opéraient à coup de bombes à gaz, pistolets, machettes et gourdins, les apprentis terroristes eux, avaient recours aux techniques modernes de communication : téléphones, fax ». Et d’ajouter : « désormais, les acteurs politiques vont solder leurs comptes par procuration, par personnes interposées. Des hommes de main, recrutés dans la pègre des banlieues urbaines ou dans la jeunesse désœuvrée des bidonvilles ».

La série noire

Après avoir indiqué les présupposés théoriques pour tenter de cerner le phénomène de violence politique, Marcel Mendy s’est employé à donner quelques cas pour l’illustrer.
Il y a l’assassinat de Demba Diop, député socialiste, maire de Mbour, sauvagement poignardé, le 3 février 1967, dans le parking de la préfecture de Thiès, par un certain Abdou N’Dafakhé Faye, l’un des partisans de Jacques d’Erneville, rival de la victime. Abdou Faye est condamné à la peine capitale, puis exécuté.
Quant au 22 mars 1967, cette date rappelle l’attentat manqué contre Léopold Sédar Senghor et perpétré par Moustapha Lo. Ce dernier sera exécuté.
L’auteur parle des troubles électoraux de 1998, avec le meeting de Abdou Diouf, du 25 février, qui enregistre des perturbations à Thiès. Excédé, le président-candidat traite la jeunesse de « malsaine » et ses adversaires de « bandits de grand chemin ». Au lendemain des élections, Me Abdoulaye Wade est mis en prison.
Le 14 mai 1998, Djibril Thiam dit Mbakha, jeune militant du Ps, sera poignardé au cours d’une bataille rangée opposant des tendances rivales.
En 1993, il y a l’assassinat de Me Babacar Sèye et le 16 février 1994, six policiers sont pris à parti et tués froidement par une horde déchaînée.
Marcel Mendy ferme la série noire par l’agression de Talla Sylla qui s’est produite le 5 octobre 2003.



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