(Correspondance) - L’âge, un sujet tabou, voire pudique au Sénégal, risque d’être au centre de la campagne électorale pour la présidentielle de février de 2007. Me Wade qui a souvent clamé, même dans l’opposition, (taquin ou sérieux ?) avoir des ascendants centenaires, doit se préparer à cette querelle qu’on lui fera, à coup sûr, sur son âge. Les socialistes de Kolda, eux, ont en tout cas annoncé la couleur, convaincus que le président Wade est trop âgé pour briguer un second mandat. Le respect de l’âge tant vanté dans nos sociétés passe pour un handicap pour les socialistes.
‘Tous les responsables politiques ou membres de la société civile sérieux doivent convenir qu’à 84 ans, le président Wade doit renoncer à la présidentielle de 2007 !’ Ce cri du cœur fuse, comme on s’en doute, de l’opposition. L’auteur est Boubacar Mané, responsable politique socialiste à Mampatim. Il présidait un meeting à Saré Niyel, village situé dans la communauté rurale de Coumbacara (70 km à l’est de Kolda). ‘Me Wade est du quatrième âge, les jeunes qui avaient voté pour lui en 2000 feront tout pour le pousser à la retraite’, se convainc Boubacar Mané. ‘Le seul regard qui mérite d’être porté sur le secrétaire général national du Pds est celui d’un petit-fils attendri’, lance-t-il, exhortant les Sénégalais à contraindre Me Wade à ‘faire valoir ses droits à la retraite politique’.
A cet âge, tonne Mané, on a de la volonté peut-être, mais on est privé de la capacité à prendre en mains les affaires du pays. Pour s’en convaincre, le responsable socialiste de Mampatim, visiblement dopé par la dernière visite à Kolda du premier secrétaire du Ps, Ousmane Tanor Dieng, promène son regard sur le monde rural. ‘Où sont les forages et les moulins de M. et Mme Abdou Diouf ?’, s’interroge-t-il ajoutant que le monde rural vit une situation dramatique. ‘Les populations sont dans la misère’, constate, amer, Boubacar Mané. ‘Nous aurions souhaité vivre en Guinée-Bissau’, martèle Boubacar Seydi, un intervenant. Son désespoir est, à l’apparence, bien partagé par nombre d’habitants de Saré Niyel.
Moussa Kandé et Madigogne Koïta, deux paysans de la zone, ont failli engager entre eux la querelle, rien que pour ‘cracher’ leur amertume et la désolation sur les ondes des radios. Madigogne, au wolof chaotique, pense que Moussa n’a pas bien traduit son propos, lui qui tient à faire savoir que le ciel n’a pas encore ouvert ses vannes dans ces contrées. ‘Cette année, il n’y aura ni eau ni arachide’, alerte Moussa Kandé. Pour lui, nombre de ménages qui avaient la réputation de remplir leur grenier de riz, perdront le sourire… du riz. Les rizières se sont asséchées, réduisant les femmes à l’ennui, elles qui ont élevé en Casamance au rang de sacerdoce la culture du riz. D’ailleurs, nombre de paysans n’ont pas pu accéder aux semences faute d’argent.
La campagne de commercialisation de la noix d’anacarde n’est guère meilleure. Les prix ont chuté jusqu’à 150 F Cfa le kilo. Pire, signale Samba Kandé de Médina Issa, un opérateur qui avait acheté à crédit la production des arboriculteurs de Coumbacara, a voulu faire chuter les prix jusqu’à 105 F. Face au refus des paysans, l’opérateur a voulu troquer deux kilos de riz contre un d’anacarde. Nouveau refus des producteurs ! Pourtant, dans nombre de maisons, la marmite ne bout pas. ‘Des familles restent deux jours fermes sans manger !’, se désole Madigogne Koïta. Le bétail n’est guère épargné. En raison du déficit pluviométrique, l’eau et les fourrages se font rares dans certains villages, avertit Koïta.
La solution à cette détresse des paysans ne se trouve pas, selon Boubacar Mané, entre les mains de Me Wade. ‘Il n’en a pas le temps, parce que préoccupé par les déchirements au sein de son parti’, s’assure-t-il déplorant que ceux qui levaient la main pour se faire compter dans les rangs des sans-emploi continuent, hélas, de le faire au fond des océans. ’Il n’y a qu’une solution à ces drames : forcer Me Wade à quitter le palais par vos cartes !’, lance Mané.
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