Le Pr Abdoulaye Bathily, secrétaire général de la Ligue démocratique/Mouvement pour le parti et le travail (Ld/Mpt), a adressé ouvertement, hier, au secrétaire général du Parti démocratique sénégalais (Pds), Me Wade, une lettre-miroir. Une lettre qui plonge dans les méandres du passé des actes et des prises de positions de Me Wade dans les années de braises oppositionnelles. Un «tsunami épistolaire» destiné à celui qui soupçonne, aujourd’hui, l’opposition, de recourir aux mêmes pratiques et comportements dont il avait fait usage à l’envi dans le passé.
Une lettre grave. Une lettre symptomatique de la dégradation des relations entre deux hommes qui se sont pratiqués dans de dures épreuves, durant les années de braise et de pain noir dans l’opposition. Le Pr Bathily, fidèle à sa détermination et ses principes, a choisi de répondre ouvertement au Pape du Sopi, afin que refluent, dans la mémoire de ce dernier, les traces noires de ses actes et prises de position. Une lettre motivée par la sortie de Me Wade, le 20 février, accusant «l’opposition sénégalaise d’avoir fomenté, en intelligence avec un Etat étranger, les évènements survenus à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar».
En promenant les lecteurs de cette correspondance ouverte dans les méandres d’un passé récent, le Pr Abdoulaye Bathily, au nom de son parti, se livre à un terrible devoir de mémoire, en évoquant et en convoquant des dates-repères et des prises de position, pas toujours bien inspirées du Pape du Sopi. Pour Bathily, Me Wade, «en homme d’honneur», aurait pu reconnaître publiquement» certains faits.
Comme sa «proposition d’inviter les syndicats et le mouvement étudiant à décréter des grèves générales pour soutenir (leurs) initiatives politiques d’opposants d’alors». Une «proposition» qui avait enregistré un niet catégorique de ses alliés, défendant «que les organisations de travailleurs et d’étudiants doivent être laissées à leurs revendications matérielles et morales». A la face de Me Wade, Bathily exhibe une date-repère et un acte qui en dit long sur la perception que son ancien allié avait alors de la lutte estudiantine. En effet, s’adressant à Me Wade, le secrétaire général de la Ld/Mpt, écrit : «En 1999-2000 vous avez encore insisté pour inclure les syndicats et les étudiants dans le soutien à votre candidature.» Une volonté de l’actuel locataire du Palais Léopold Sédar Senghor, qui s’était heurtée au refus encore de ses alliés, au motif «que les membres des organisations sociales doivent garder leur totale liberté individuelle de soutenir le candidat de leur choix». Difficile de faire croire à l’historien Bathily que la mémoire de Me Wade aurait «faibli au point de (les) accuser aujourd’hui de ce qui était (sa) démarche constante du passé.»
DES DATES-REPERES
Il sollicite aussi la mémoire du secrétaire général du Pds qui ne peut oublier que lui, Abdoulaye Bathily, s’était «opposé aux initiatives qui avaient conduit à la pose de pièges dans les voitures à la Sicap Dieuppeul en 1988 et à la diffusion de tracts d’une prétendue «Armée du peuple» appelant à l’insurrection des Forces armées contre le pouvoir d’alors».
Toujours, sur le même registre du devoir de mémoire, le patron des «Jallarbistes» convoque le meeting unitaire en 1989 à Niari Tall (Dakar). Au cours de ce meeting, il rappelle à Me Wade ce qui suit : «Sans en avoir discuté avec nous, vous avez appelé les jeunes à se munir de coupe-coupe, de cailloux et de chaînes de vélo pour résister aux forces de l’ordre.» Au passage, comme répondre à Me Wade qui a déclaré le 20 février que les gens de l’opposition sont des couards, Bathily lui signifie que «la Ld/Mpt, qui est composée d’hommes et de femmes responsables, a toujours, avec son secrétaire général en tête, été à la pointe des manifestations pacifiques dans la rue.»
Comme d’ailleurs, entre autres, lors des manifestations de l’Ads en 1985, de la Coalition Sopi en 1988, de la Conacpo en 1992. A ce niveau, le Sg de la Ld se remémore son arrestation et les sévices qu’il a subis à la police, contrairement à Me Wade qui trouvait chaque fois le moyen d’être dégagé par ses gardes de corps «pour des raisons de sécurité» au moment de l’arrivée des forces de l’ordre.» Et Bathily de poser, non sans subtilité, une question dans laquelle se trouve sa réponse. «Qui doit recevoir des leçons de courage physique ?», demande-t-il à Me Wade. Parmi les échardes des blessures évoquées par le leader de la Ld/Mpt, surgissent du passé, l’assassinat de Me Babacar Sèye dont Me Wade a «gracié puis amnistié les auteurs et commanditaires, l’agression de Talla Sylla, jusqu’ici impunie». <13>[email protected]
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