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Politique

Mamadou Diop Decroix sur les 10 ans de l’alternance : « l’indiscipline des sénégalais a retardé notre progression »

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Mamadou Diop Decroix sur les 10 ans de l’alternance : « l’indiscipline des sénégalais a retardé notre progression »

Le leader d’Aj/Pads, « l’autre Pads » diraient certains, jette un regard sur les dix années de compagnonnage présidentiel avec Abdoulaye Wade. Mamadou Diop Decroix revient sur ses relations avec l’opposition, le conflit qui l’oppose à Landing Savané. Du bon et du moins, comme il y en a dans le bilan qu’il fait de dix années d’alternance.

19mars 2000-19mars 2010 : 10 ans d’alternance quel bilan  en faites –vous ?

Il y a du bon et du moins bon, c’est sûr ! Pour moi l’un des principaux succès de Wade ce ne sont pas les infrastructures, mais son pari sur le capital humain à travers ce qui a été fait sur l’école sénégalaise.  Les infrastructures ne se discutent plus. Le dicton de l’opposition pour montrer que les infrastructures  ne se discutent plus,  c’est : « le goudron ne se mange pas », mais si Le goudron se mange, car il permet d’avoir des gains de compétitivité et si vous accroissez vos parts du marché et votre richesse, les gens qui étaient pauvres s’enrichissent et les gens qui avaient faim, mangent à leur faim. Maintenant, il y a des faiblesses. C’est clair que nous n’avons pas été suffisamment fermes avec nous-mêmes. Les Sénégalais continuent d’être indisciplinés, chacun fait ce qu’il veut. C’est le laxisme et c’est cela qui a freiné la vitesse de notre progression. Si nous avions réussi à faire que tous soient disciplinés, on aurait aujourd’hui des taux de croissance de 2 chiffres. Quand ils sont hors du Sénégal, les Sénégalais sont compétents et travailleurs. Mais ici, ils  vous disent : « xaalis ken du ko gnax da nu koy lijënti ». Je pense que le président à compris cela et commence à s’attaquer à ce front, où nous étions vraiment faibles. Les  marchés de gré-à-gré qui étaient estimés en 2007 aux environs de 150 milliards sont tombés à 16 milliards en 2009. La chute a été de 90%. Ça c’est extraordinaire, mais on ne le dit pas. Les tenants du régime ne communiquent  pas suffisamment sur l’essentiel. Moi j’ai beaucoup de reproches à faire à notre communication. Ce sont des gens qui se crêpent les chignons à droite et à gauche, c’est de cela dont on parle alors qu’on aurait  dû parler  de choses beaucoup plus importantes et intéressantes  pour les populations.    

Comment jugez-vous le rôle et la place de Karim Wade au sein du pouvoir ?

Je n’ai rien contre Karim Wade. Il ne s’est pas bombardé ministre, on l’a nommé. Celui qui l’a nommé, c’est celui  qui est élu par le pays, donc aucune loi ni aucun règlement n’a été transgressé. Le président exerce son droit  démocratique à nommer parce qu’il est élu et les autres exercent  leur droit à critiquer par ce que la Constitution le leur reconnait  et le pays fonctionne, tout marche bien.

Comment analysez-vous la recrudescence de la  violence en Casamance, et qu’est ce que l’Etat peut faire pour faire régner la loi dans cette région ?  

C’est une question très importante. Lorsqu’on veut traiter un problème, il faut en faire l’étiologie, ou en faire l’archéologie. Je veux dire que  ce problème d’abord,  a surgi en 1982, 18 ans avant l’accession de Wade aux affaires. C’est une série de contradictions non résolues, qui se sont accumulées, qui au début étaient des contradictions secondaires, mais par la suite sont devenues des contradictions antagoniques  par ce qu’elles n’ont pas été résolues. Le problème n’a pas été réglé pendant dix-huit ans. Entre temps, il y a eu ce que l’on a appelé l’arc de crise, c'est-à-dire les pays du littoral ouest-africain qui ont connu la guerre civile comme la Sierra Leone, le Liberia ou qui ont connu l’instabilité politique comme la Guinée-Bissau ou la Guinée Conakry. Dans ces pays on a connu le délitement de l’Etat ou parfois l’absence pure et simple d’Etat. La nature ayant horreur du vide, on a assisté, impuissants, à l’implantation progressive  de la mafia internationale de la drogue dure. Les trafiquants ont fait de certains territoires de l’Afrique de l’Ouest  des bases intermédiaires sur l’Europe. Chez nous, l’Etat doit continuer à marquer sa présence, sinon ça va être comme les autres pays de la sous-région. L’Etat doit marquer sa présence en sécurisant les populations, mais en même temps considérer que c’est une question politique qui se résout sur le plan politique autour d’une table. Toutes les guerres se  sont terminées autour d’une table de négociation, à plus forte raison, ici, où il s’agit de gens qui ont tout en commun. Mais cette discussion doit se faire avec les chefs qui sont dans le Maquis. Ils doivent être au cœur de toute négociation. Il faut également poursuivre les efforts d’industrialisation  de la Casamance, parce que quand vous industrialisez, vous créez des emplois  et offrez des perspectives aux jeunes qui sont dans le maquis, vous leur donnez de l‘espoir. Enfin, il faut avancer dans la politique de décentralisation.

Comment jugez-vous leur décision  de faire constater l’incapacité du chef de l’Etat ?

Ça fait rire, vraiment. Nous sommes tous des sénégalais ; on voit  les uns et les autres aller et venir. On sait bien que le président est en très bonne santé ; il voyage. L’Opposition trouve même que le Président voyage trop. Quelqu’un qui n’est pas bien portant ne voyage pas beaucoup. Pourquoi parlent-ils de son âge ? Si vous êtes âgé et que vous avez une meilleure santé  que ceux qui sont moins âgés que vous, où est le problème ? Certains d’entre eux vous diront plus tard qu’en fait, il s’agissait juste d’une forme de communication. Non ! Je crois qu’il y a des limites à tout.

Que vous inspire l’appel au dialogue lancé par le chef de L’Etat ?

Il faut s’en féliciter, d’abord. Nous  avons  toujours estimé que le dialogue entre le pouvoir et l’opposition doit être quelque chose de tout à fait naturel. C’est dans l’ordre normal de la vie démocratique. C’est l’absence de Dialogue qui est plutôt anormale. L’opposition s’oppose, le pouvoir  gouverne, mais les gens doivent discuter. L’opposition peut changer de position après avoir discuté avec  le président, au motif peut être qu’il y a des éléments  d’appréciation qu’elle ne maitrisait pas. Tout comme le pouvoir peut changer d’avis sur certaines questions après avoir discuté avec l’Opposition.

Est-ce qu’on peut s’attendre à un gouvernement d’union à l’issue du Dialogue ?

Il n’y a pas de règle, il n’y a pas de dogme dans ce genre de choses. C’est parce qu’on a une compréhension du dialogue politique, qui n’est pas la nôtre que dès qu’on parle de dialogue on pense que le dialogue, c’est le gouvernement d’Union. Nous, nous disons que le dialogue doit être permanent. Mais si tous les partis doivent être dans le gouvernement, dans ce cas, il n’y aurait plus  d’opposition. Or, l’opposition est utile dans toute démocratie. Dialogue politique et Gouvernement d’union, il n’y a pas de lien ombilical  entre les deux. Maintenant, il n’est pas exclu non plus qu’un dialogue conduise à un gouvernement que partagent ceux qui s’accordent sur ce qu’il y a lieu de faire. Donc, tout dépend de la perception des uns et des autres  quant à leur apport à ce dialogue-là.

Quelle analyse faites-vous de la percée de la  coalition Benno Siggil Sénégaal ?

Benno est une coalition de l’opposition et d’ailleurs, tous les partis de l’opposition ne sont pas à Benno, il y a un troisième pôle que sont les non-alignés. C’est  une tradition en République de constituer des coalitions quand les gens doivent aller en élections.  Ils cherchent à se retrouver pour accroitre leurs chances de gagner, c’est ce que Benno tente de faire.  Sur ce plan, n’y a aucun problème. Maintenant, je pense qu’il y a une grosse erreur que Benno est en train de faire.  Ce que les leaders disent est différent de ce qu’ils pensent réellement.  Ils se battent pour avoir un candidat unique, je pense qu’ils n’ont pas tort, parce que s’ils n’en ont pasils ne gagneront pas. Eux-mêmes le savent. Mais malheureusement pour eux, ils n’auront pas de candidat unique. Le porte-parole de l’Apr/yakaar dit que Macky Sall sera candidat et il y’en aura encore d’autres.

Vous  êtes nommé coordonnateur de L’Alliance Sopi pour toujours, quel est le rôle et la place d’Aj dans cette alliance ?

C’est un regroupement de partis politiques. Ils sont nombreux ! Certains disent 70 d’autres disent 80partis, et on continue de recenser. En 2000, il ya eu plusieurs pôles d’alliance avec notamment, la Code 2000 autour de Moustapha Niasse et la Ca 2000 autour de WadeAprès le premier tour, on a eu le Front pour l’alternance (FAL), qui a porté le président  Wade au pouvoir. Depuis lors l’Alliance est toujours là, mais il a manqué la formalisation, la coordination, bref,  l’organisation de toutes ces forces politiques. Il y a eu entre temps la Cap 21, coordonnée par le professeur Iba Der Thiam. Dans l’Alliance Sopi pour toujours, vous avez les partis qui sont à la Cap 21 et les partis qui ne sont pas à la Cap 21. Pour ce qui est de la place d’And Jef, nous sommes là comme tous les autres. Nous ne revendiquons pas une place particulière, singulière. Nous essayons de faire notre travail. Notre principe de base est que dans une coalition, c’est la santé de chacun qui fait la santé de la coalition. Nous essayons de travailler dans la loyauté, la sincérité, l’engagement et la fraternité avec tous les autres qui sont dans l’alliance. Là-dessus, il faut souligner que la relation entre And Jef et le Pds date de très longtemps. C’est un compagnonnage ininterrompu depuis février 1990 avec la Conférence nationale des chefs de partis de l’opposition (CONACPO).

Peut-t-on s’attendre à ce que Aj Fusionne avec le Pds ?

Ce n’est pas la même histoire. And Jef a été crée en 1973 dans la clandestinité, donc le Pds n’existait pas encore. Cette question n’est pas à l’ordre du jour. C’est vrai qu’en politique, on n’insulte pas l’histoire, ni l’avenir d’ailleurs. Cependant, les cursus et les trajectoires sont assez différents. Je ne crois pas que cela soit simple sauf si des transformations profondes sont opérées dans les deux partis, en terme de revisiter les doctrines etc.

Que reste-t-il de votre compagnonnage avec Landing Savané ?

C’est une question qui est derrière nous depuis  le sept janvier dernierLe tribunal a rendu sa décision. Vous savez qu’il y a eu une bataille politique avec trois moments importants. Le premier a été le congrès du parti en juin, ensuite lorsque le ministère de l’Intérieur,  qui a pour vocation de reconnaitre les partis politiques, nous a écrit pour reconnaitre le congrès et ses décisions. Le troisième moment, c’est lorsque les autres ont porté plainte devant le tribunal correctionnel pour usurpation de fonction. Le tribunal a rendu son verdict le sept janvier dernier en les déboutant de leur demande et en les condamnant avec dépens. Pour nous le dossier est clos, la page est tournée ! En dehors de ces moments dont  j’ai parlé, le ministre de l’Intérieur  discute avec les partis politiques sur la réforme du Code électoral, et c’est moi qui envoie des représentants en tant que Secrétaire Général d’Aj/Pads, les autres ne peuvent pas envoyer des représentants parce qu’ils ne sont plus reconnus. Si demain on devait voter, c’est moi qui présenterais des listes de  candidats, les autres n’y auraient pas droit.

N’empêche, Landing continue de mener ses activités au nom d’Aj/Pads ?

Qu’est ce que vous voulez que je fasse. La légitimité politique a parlé au congrès, l’administration  a parlé à travers le Ministre de l’Intérieur, la justice a parléDonc le problème est réglé. La presse couvre ses activités parce qu’on est au Sénégal. Tout ce qui s’est passé (le congrès, l’administration ou la justice) n’a aucune signification pour certains. Mais je note qu’il y a quand même une baisse de la couverture des autres dans les medias, et progressivement tout le monde tirera la leçon.

Pourquoi Aj n’est pas présent dans le gouvernement ?

On m’avait posé cette question et j’avais répondu en disant deux choses : Nous ne sommes pas avec Wade  pour des postes, c’est très important par ce qu’on considère qu’au Sénégal, tous ceux qui font de la politique, le font pour leur propre poche, leurs intérêts individuels et personnels. Ce n’est pas le cas d’AJ. On n’est pas avec le président  pour des postes, on est avec lui par ce que nous constatons  qu’il aime le pays, qu’il travaille nuit et jour pour le Sénégal et qu’il marque des points et enregistre des  succès, voila les trois raisons ! La preuve, cela fait un an qu’on a quitté le gouvernement mais notre soutient à Wade n’a pas faibli et ne faiblira pas tant que Wade gardera le cap de travailler pour le Sénégal et pour l’Afrique. S’il change de Cap, comme nous l’avons fait avec Diouf, nous arrêterons de le soutenir. Nous sommes très différents de Beaucoup d’autres.



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