MENACE - Il réclame toujours plus d’un million de francs de loyer au Pds : Kéba Diop prêt à se suicider, s’il n’est pas reçu par Wade

Une audience ou le suicide. Un brin d’espoir lui reste encore, même s’il est au bout du rouleau. L’homme qui court, depuis l’année dernière, derrière le loyer de sa maison que les libéraux de Bignona ont transformé en permanence, n’en peut plus d’attendre une audience que le leader du Pds lui a promis, pour régler définitivement le différend. Ayant marché de Ziguinchor à Dakar pour réclamer son dû, il veut, à tout prix, conserver son honneur et sa dignité.

Kéba Diop menace de se suicider s’il n’est pas reçu au Palais par le président de la République. L’homme, qui dit avoir tout perdu, affirme avoir averti les autorités qui sont chargées de son dossier. Car, pour lui, il n’est plus question de retourner auprès de sa famille, à Bignona, sans atteindre son but. Et sa menace semble sérieuse, puisqu’il explique que l’option lui trotte l’esprit depuis quelques temps déjà.

Kéba Diop est à Dakar, où il cherche par tous les moyens à rencontrer le chef de l’Etat, Me Abdoulaye Wade, pour lui réclamer l’argent que lui doivent des responsables libéraux de Bignona. Ces derniers avaient pris en location sa maison pour en faire une permanence. Mais depuis le mois de mai de l’année dernière, il ne voit plus la couleur de son argent. En plus, ses locataires gardent toujours la clé des locaux avec eux. Depuis lors, Kéba Diop estime qu’on lui doit plus d’un million de francs Cfa. Ses réclamations n’y feront rien. Pis, il est poursuivi par sa banque auprès de qui il avait contracté un prêt de 5 millions Cfa pour faire fonctionner ses deux magasins de commerce. C’est ainsi qu’il décide de se mettre en route.

DEPART DE ZIGUINCHOR A PIED

Parti de Ziguinchor le 4 novembre 2007, Kéba Diop a rallié Dakar la capitale à pied. Une manière d’attirer l’attention sur lui et sur le différend qui l’oppose aux responsables locaux du Pds à Bignona. Après onze jours de marche, il est à Rufisque. Avec des pieds enflés, son état de santé se détériore. Et c’est un comité d’accueil composé de la Police et du préfet qu’il y trouve. Là, Kéba Diop explique qu’il a subi toutes sortes de tortures avant de se voir proposer par le chef de l’exécutif départemental une enveloppe de 500 mille francs pour rebrousser chemin. Son refus d’empocher l’argent qui serait remis par Babacar Gaye, directeur de cabinet politique du président de la République et Mamadou Lamine Keïta, ministre de la Jeunesse, est catégorique, exigeant toujours d’être reçu par Me Abdoulaye Wade.

Deux jours après, le marcheur est à Dakar, mais n’est pas au bout de ses peines. On lui propose encore l’argent qu’il continue de refuser. Interpellé par la Police pour «trouble à l’ordre public», il est conduit à la prison de Reubeus. Pour combien de temps ? Kéba Diop ne s’en rappelle pas exactement. Tout ce qu’il sait, c’est qu’il a fini par tomber malade et interné, la veille de la Tabaski, à l’hôpital Principal de Dakar d’où il sortira avec une facture de 123 116 francs Cfa qu’il est incapable de payer faute de moyens. Sa seule garantie, sa carte d’identité nationale que l’hôpital a confisquée.

72H DE COMA

Depuis lors, l’homme erre dans les rues de Dakar et mange une seule fois dans la journée, parfois pas du tout. Son logement, une maison en construction au quartier Point E. Le gardien des lieux a bien voulu le recueillir et il dort sur des cartons. Récemment, il a été à Touba pour demander de l’aide et une médiation. Fatigué et épuisé, Kéba perd connaissance le 22 avril dernier et finira dans le coma pendant 72 heures. Ce qui lui a valu un séjour de neuf jours à l’hôpital Matlaboul Fawzaini.

Le malheur ne venant jamais seul, son portable disparaît au moment des secours, probablement volé par des passants. Raison pour laquelle, la Présidence a eu du mal à le localiser, lorsque le chef de l’Etat qui a eu, enfin, vent de ses difficultés, a voulu en savoir davantage. Le conseiller technique Ouseynou Bèye, chargé de le rencontrer, a fini par mettre la main sur lui par le canal d’un ami. Et c’est pour lui remettre une lettre du président de la République, datée du 11 mars 2008. «J’ai pris connaissance de votre courrier m’informant que vous avez des problèmes avec les structures locales du Parti démocratique sénégalais à Bignona. J’ai décidé de vous recevoir et j’ai instruit mes collaborateurs de prendre les mesures idoines pour un règlement définitif de ce problème», lui assure Me Abdoulaye Wade. Mais jusque-là, rien. Aucune audience.

Obligé de vendre tous ses biens dont une maison, un de ses magasins retiré, Kéba Diop n’a plus de quoi entretenir sa famille. Ses deux épouses ont d’ailleurs rejoint le domicile de leurs parents respectifs avec leurs enfants. Ce lundi 19 mai, il devait se trouver devant la barre du tribunal parce qu’il n’a pas payé, depuis des mois, la location de la seule cantine qui lui reste. Faute de pouvoir faire le déplacement, il a demandé le renvoi de son jugement jusqu’au 20 juin prochain, date à laquelle il espère retourner -si tout va bien- chez lui.