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Vendredi 01 Juin, 2018 +33
Politique

NET REFLUX DE LA VIOLENCE : Le sang coule toujours en Casamance

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NET REFLUX DE LA VIOLENCE : Le sang coule toujours en Casamance

«Personne ne pouvait imaginer qu’un jour, une telle situation se produirait dans cette région naturelle de la Casamance, jadis grenier du Sénégal». Ce constat amer et inquiétant de certains observateurs avertis, résume le drame de la Casamance depuis plus de vingt ans. Le «paradis sur terre» légué par les ancêtres semble être bel et bien perdu. Pour longtemps. Plongée dans une situation de ni guerre, ni paix, la Casamance continue toujours de compter ses morts. De paisibles citoyens froidement abattus soit par balles, soit par mines, des engins de morts qui, depuis leur apparition en 1998, ont fait aujourd’hui plus de 700 victimes. Une bonne partie a succombé aux amputions d’une jambe, où d’une partie du corps. Hélas ! Le fleuve Casamance charrie toujours son lot de malheurs. Les espoirs se sont transformés en cauchemars.

Pleins feux sur les attaques les plus sanglantes

La montée de la criminalité dans la région naturelle de la Casamance peut se mesurer à l’aune des attaques les plus sanglantes notées depuis plus de 26 ans que dure le conflit armé. Pourtant, rien ne laissait présager une telle criminalité au début des années 89-91, où il y avait une accalmie avec la gestation d’un mouvement mieux organisé que le régime socialiste avait même autorisé à mener des réunions qui ont poussé les dirigeants du Mfdc à mieux croire à leur mouvement. Les rencontres de Kathiéo en Guinée Bissau et de Banjul en Gambie ont permis d’installer une paix et la cessation des contrôles routiers. Malheureusement, cette accalmie ne sera que de courte durée. Suite à des actions isolées du Mfdc en sa branche administrative ne refusant tout acte commis par ses éléments. Il y’a eu ensuite un resserrement de la sécurisation par la création de certains postes de contrôles, des check point à Django entre Bignona et Bounkiling et à Samine entre Kolda et Ziguinchor. Ce fût alors les attaques les plus sanglantes. Parmi celles-ci on peut citer l’attaque d’Ebinaco sur la route de Diouloulou où 11 soldats ont été tués en 1991. Sans oublier le carnage de Madina Mancagne, de Madina Thierno, deYoutou et de Babonda.

L’armée paye un lourd tribut

Quelques années plus tard, plus précisément en 1994, on assistera à la division des factions rebelles, avec la tendance de Léopold Sagna et celle de Salif Sadio. Cette division a suscité tant de convoitises et a plongé les acteurs de la paix dans un dilemme afin de choisir les vrais interlocuteurs des différentes tendances du Mfdc. Un privilège accordé à certains groupes rebelles sera à l’origine de leurs confrontations, créant ainsi la zizanie, entraînant du coup, l’Etat à trouver des interlocuteurs peu fiables au niveau de l’aile politique et des branches armées. Ce manque de confiance qui a existé au sein des branches armées a entraîné des empoignades qui ont abouti à la mort de certains dirigeants du Mfdc comme Léopold Sagna, Théophile, Abdoulaye Sadio tandis que d’autres sont tombés sous les balles des militaires au cours des attaques. Dans la même année, l’armée enregistrera un lourd bilan. 26 soldats tués entre les villages de Madina Thierno et de Madina Mankagne. Il s’en suivra l’attaque de Babonda en 1996 où 23 morts seraient enregistrés du côté de l’armée. A cela s’ajoute le coup de Youtou en 1998 où les hommes du lieutenant Bâ enregistreront 15 morts dont 2 rescapés. C’est dans cette zone de Youtou, dans le Oussouye que les couples Français Caves et Gagnaire avaient disparus le 6 avril 1996, obligeant l’armée sénégalaise à déclencher une opération de ratissage qui avait été logistiquement appuyée par les Français, avec la mise à leur disposition d’avions C130 pour la réalisation de photos aériennes. Le véhicule des disparus avait été par la suite retrouvé, dissimulé dans la forêt entre les villages de Effok et de Youtou. D’autres attaques suivront dans la période du 12 au 25 novembre 2002. C’est par une série de pose de mines que les Jambaars avaient procédé à une opération de démantèlement de bases de maquisards dans l’arrondissement de Nyassia. Au cours de cette opération, l’armée avait perdu 4 éléments et enregistré 23 blessés dont 2 grièvement. Le 6 janvier 2003, l’armée déclenchait vers 2 heures du matin une vaste opération de ratissage dans le secteur de Nyassia à l’Ouest de Ziguinchor le long de la frontière Bissau guinéenne. Une opération qui a fait une victime du coté des Jambaars avec la mort d’un sergent tué par l’explosion d’une mine. La victime appartenait à la 1ère compagnie de corps de Commando qui fournit l’essentiel des effectifs engagés dans les opérations. A signaler que Nyassia, considéré comme l’une des zones de la Casamance qui abritait le plus de rebelles dans ce secteur, car plusieurs villages ont été abandonnés par les populations fuyant les exactions des rebelles. Auparavant, sur l’axe Ziguinchor-Kolda, à hauteur du village de Niaguis, des rebelles, y ont installé leurs quartiers. Ils opéraient par des braquages de véhicules. 4 véhicules dont une R4, deux camions et un Ndiaga Ndiaye avaient été braqués et tous brûlés par les rebelles. Trois passagers dont un officier en civil avaient été touchés par balle. C’était le 21 février 2002 vers 7 heures du matin. Dans la même année, les rebelles s’invitent aux élections locales. Alors que les candidats tenaient un meeting dans la ville de Diouloulou, devenue aujourd’hui commune. Des rebelles ont interrompu le meeting de la Coalition Sopi ak Cap 21 présidé par Youba Sambou. A côté de Diouloulou, plus précisément à Birassou, Bamba Faye, l’ex-Commandant de la brigade de Diouloulou avait été tué et 3 autres personnes horriblement mutilées, des officiels et journalistes se réfugiaient dans la brigade de la gendarmerie. C’est dans les mêmes circonstances que Gorgui Mbengue sous- préfet de la localité a été également assassiné par une horde d’hommes armés.

Règlement de comptes entre fils du terroir

C’est par ce qui est convenu d’appeler règlement de comptes que l’on peut situer les massacres commis sur des citoyens casamançais. Hélas! Oeuvrant pour le retour de la paix, ils ont été victime de leur engagement. Dans ce lot figure en bonne place le massacre de personnalités politiques et religieuses. Le cas d’Oumar Lamine Badji tué dans sa maison de Sindian en décembre 2006 et de Samsidine Néma Aïdara en décembre 2007 illustrent ce phénomène de règlements de comptes entre fils de même patrie et du même terroir. La mort de certains chefs rebelles ont vu surgir des rangs de différentes branches armées des hommes comme Ousmane Badji dans le Sindian, Magne Diémé dans le Diouloulou, Théophile, César Atout Badiate dans le Oussouye. Ces éléments, de par leur stratégie et leur expérience et pendant que Salif Sadio, (chef charismatique de la branche armée du mouvement) était sous l’ombre, ont mené des actions qui vont pousser l’Etat à trouver des solutions en collaboration avec l’aile politique du Mfdc, et le mouvement des intellectuels de la Casamance à se retrouver autour de la table. Leur action engagée d’un commun accord a suscité des espoirs avec les réunions de Foundiougne I et l’engagement de l’Etat pour la reconstruction de la Casamance. Force est de reconnaître qu’en dépit des efforts déployés ça et là pour la fin des crépitements des armes, l’Etat et les responsables du mouvement dans tous ses segments, ailes politiques branches armées, ailes extérieurs doivent marcher vers la même direction pour un même objectif de paix. Cela ne sera possible que par l’identification de tous les groupes armés évoluant dans la région sans considération aucune ou d’autoritarisme avérée pour se mettre autour d’une même table et discuter des réels problèmes qui permettront d’asseoir une paix définitive dans la partie méridionale du Sénégal. Car, avec l’apparition de nouveaux dirigeants de branches armées dont Bertrand Sambou ( dissident de Diakaye ), à l’origine des attaques depuis deux mois dans le Diouloulou, le conflit casamançais s’enlise de jour en jour.

L’autre mal: les vols de betails

Une autre source d’insécurité au niveau de la Casamance, les vols de bétails. D’un accès difficile et généralement moins surveillé par l’armée qui a mis l’essentiel de ses troupes au front dans le sud de Ziguinchor. Cette zone, depuis presque 5 ans, est périodiquement victime de ses bandes armées qui, après s’être emparées des troupeaux, traversent la frontière toute proche, pour disparaître en Guinée Bissau. En 1998-1999, ce sont plus de 2 000 bêtes qui avaient fait l’objet de vols et se sont retrouvées en Guinée Bissau voisine. Le vol avec la recrudescence de la violence a repris de plus belle. C’est la localité de l’arrondissement de Djibanar dans le Balantacounta (département de Goudomp, région de Sédhiou) qui est plus concernée par ce phénomène. Les semaines dernières, un membre du conseil rural a été touché par balle par les voleurs qui, après leur forfait se sont dirigés vers la Guinée voisine. Cette situation qui a été l’époque, à l’origine des relations exécrables entre les deux pays, obligeant les autorités à mettre en place une commission mixte de «recherches et de restitution» des bêtes volées. Sans efficacité, puisque seules quelques centaines de bêtes avaient été retrouvées et restituées au Sénégal. D’ailleurs, c’est la répétion de ces actes de banditisme qui avaient poussé l’armée à organiser des campagnes de ratissage pour calmer certaines victimes qui menaçaient d’organiser des actions de représailles en territoire bissau guinéen. Au regard du mouvement des armes et munitions en Guinée Bissau où tout se vend comme des cacahuètes, et compte tenu des péripéties que ce pays voisin commence à subir, les autorités doivent s’atteler à asseoir une certaine sécurité dans la région que les exactions actuelles mettent à nu.

L’hivernage : période des vacances des belligerants

Depuis plus de vingt six ans que dure le conflit armé, la Casamance a toujours connu une période d’accalmie durant l’hivernage sans que ce soit forcément la paix. Géographiquement, la région Sud du pays, a toujours été une zone d’accès difficile plus encore en cette période que le reste de l’année. Aussi, les belligérants (rebelles du MFDC, et l’armée sénégalaise), comme les responsables politiques du reste, prennent des vacances renvoyant les problèmes aux calendes sénégalaises. Même si cette année, le contraire semble se produire sur le terrain. Vivement, la reprise des négociations de paix entre le gouvernement et le Mfdc ! Elle doit prendre le dessus sur les tergiversations pour le retour définitif de la paix en Casamance où la reprise de la violence hante le sommeil des populations notamment sur l’axe Bignona-Diouloulou où les dissidents de Diakaye opèrent par des razzias.


Dossier réalisé par Pape Ousseynou DIALLO et Sékou Dianko DIATTA



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