Polémique sur les fonds politiques : Me Nafissatou Diop sera-t-elle l'agneau du sacrifice ?

La notaire d'Idrissa Seck, Me Nafissatou Diop, fera face, ce matin, à 11 h, à la commission de discipline pour être fixée sur son sort quant à son avenir dans la profession. Sera-t-elle l'agneau du sacrifice dans le différend qui oppose Me Abdoulaye Wade à son ancien Premier ministre ? Ses avocats, avec à leur tête le bâtonnier Moussa Félix Sow, se réuniront une heure avant l'heure fatidique pour apporter une dernière touche à leur stratégie de défense.

C'est aujourd'hui à 11 h que Me Nafissatou Diop fera face aux quatre membres de la commission de discipline : le Premier président de la Cour d'appel, le président du tribunal régional hors classe de Dakar, le procureur général et un notaire désigné parmi ses pairs. Un face-à-face décisif à l'issue duquel la notaire d'Idrissa Seck sera fixée sur son sort quant à son avenir dans la profession. Au cœur de la polémique entre Me Abdoulaye Wade et Idrissa Seck, Me Nafissatou Diop sera-t-elle l'agneau du sacrifice ? L'ancien Premier ministre ne s'est pas prononcé sur son cas lors de sa déclaration après la publication des résultats officiels du scrutin du 25 février dernier par le Conseil constitutionnel. Mais, Idrissa Seck, disent les proches du maire de Thiès, n'en apporte pas moins son soutien à sa notaire qu'il a rencontrée hier.

Au sein du collectif d'avocats qui se sont constitués pour assurer la défense de Me Nafissatou Diop, rien n'est laissé au hasard. Une réunion de mise à niveau est d'ailleurs prévue ce matin, à 10 h, sous la houlette du bâtonnier de l'ordre des avocats, Me Moussa Félix Sow, qui a enfilé sa basoche pour la circonstance. Cette réunion sera, aussi, l'occasion de recueillir encore des constitutions parce que, indique Me Dior Diagne, membre du collectif des avocats, ‘il y a un élan fort de sympathie en faveur de Me Nafissatou Diop qui fait que beaucoup d'avocats ont voulu se constituer’.

Hier, dans la matinée, le bureau de la Chambre des notaires s'est réuni pour arrêter une position commune. Me Nafissatou Diop n'a pas participé aux débats. Tout juste a-t-elle assisté au début de la rencontre pour faire un exposé des faits et ainsi permettre à ses pairs de se fonder une conviction sur cette affaire. Mais, selon quelques indiscrétions, au-delà du cas de Me Nafissatou Diop, il a été beaucoup question de la vulnérabilité du notaire. Celui-ci ne peut faire aucun recours en cas de sanction. D'où cette réflexion de ce notaire sous le sceau de l'anonymat : ‘On dit que la profession de notaire est libérale, mais c'est plutôt une profession à libérer’. Et d'annoncer, un tantinet optimiste, que ‘des réformes importantes sont en train d'être menées pour permettre au notaire d'avoir une plus grande autonomie vis-à-vis de la tutelle qui a droit de vie et de mort sur lui’.

Dans le dossier à charge contre Me Nafissatou Diop, le procureur général a demandé sa radiation purement et simplement du corps des notaires. Il est reproché à la notaire d'avoir ‘rompu l'obligation’ de réserve mais aussi un ‘manque de délicatesse’ envers le chef de l'Etat. Pour étayer ses accusations, des articles des journaux Wal Fadjri et Populaire en date du 2 mars ont été visés. Mais, curieusement, seuls les titres des articles ont été repris par le procureur général dans le dossier à charge. Dans l'article de Wal Fadjri visé, la notaire d'Idrissa Seck, parlant sous le contrôle de son avocat, Me Dior Diagne, avait dit du document brandi par Me Wade :’Ce protocole est un faux’. Avant d'affirmer : ‘J'apporterai les preuves que c'est un faux document que le président Wade a donné à la presse’. Non sans préciser qu'elle appartient à ‘une profession dont l'éthique est très élevée’ et, par conséquent, elle déclare ne pas vouloir polémiquer avec le président de la République. Mais, avait-elle déclaré, la mort dans l'âme : ‘Quand le président Wade m'appelait dans ses appartements privés, je ne m'attendais pas à être exposée sur la place publique. Je suis mère de famille et j'ai des enfants en âge de comprendre’. Cependant, avait ajouté Me Nafissatou Diop, ‘je me dois de rétablir la vérité’. ‘Le vrai protocole est là, je l'avais gardé dans mon coffre, même mon avocat ne l'a jamais vu’, avait-elle indiqué. Ce que Me Dior Diagne avait confirmé en affirmant n'avoir jamais eu connaissance d'un tel document, avant de louer le sens professionnel de sa cliente. Des faits qui poussent Me Dior Diagne à dire que sa cliente est une victime. ‘Si elle est radiée, c'est un massacre qu'on commettrait’, a déclaré l'avocate, mélancolique.