PRIX HOUPHOUET-BOIGNY - Au siège de l’Unesco, à Paris, des interrogations sur l’invitation servie à l’opposition : Enigme sur l’origine et l’auteur d’une lettre

La lettre d’invitation adressée à l’opposition sénégalaise pour participer à la remise du prix Houphouët-Boigny et que l’on attribue au directeur général de l’Unesco serait-elle un bluff ? En tout cas, l’origine et l’auteur de cette correspondance suscitent des interrogations au siège de l’institution, à Paris. Par aileurs, l’Unesco n’a pas accédé à la demande des autorités sénégalaises d’organiser une haie d’honneur pour Me Wade à l’entrée du siège et l’opposition sera cantonnée à 5 kilomètres du lieu. Pour des raisons de sécurité.

La lettre que l’on indique avoir été adressée aux leaders de l’opposition pour assister à la cérémonie de remise du prix au président de la République, Abdoulaye Wade, reste une énigme au sein même de l’Unesco. Selon plusieurs sources proches de l’organisation internationale à Paris, «cette lettre suscite un problème au niveau de l’Unesco». Contrairement à ce que l’on pensait jusque-là, la fameuse lettre, révèlent nos sources, que l’on attribue au directeur général de cette institution, fait l’objet d’une vive préoccupation chez la plupart des fonctionnaires qui y travaillent. Au siège de l’Unesco, à Paris, «on se demande quelle est la personne qui a écrit cette lettre», nous signale un de nos interlocuteurs. D’ailleurs, ajoute-t-il, «ici, on est en train de remonter la filière pour identifier l’origine et l’auteur de la lettre d’invitation».

Par ailleurs, depuis trois jours une délégation conduite par l’adjoint du chef de protocole de la Présidence de la République sénégalaise séjourne dans la capitale française «pour préparer la cérémonie protocolaire». Au cours d’une réunion tenue, le jeudi dernier, avec les autorités de l’Unesco, la délégation envoyée par le Président Wade avait proposé que soit préparée «une haie d’honneur à l’entrée du lieu de la manifestation». Seulement ces hôtes du Président Wade ont refusé d’accéder à cette requête en faisant savoir, indique une source au siège de l’institution, que «les espaces extérieurs à l’Unesco sont sous la responsabilité des autorités françaises et non de l’institution». Par conséquent, l’Unesco ne saurait être comptable de ce qui se passe dans la rue. Tout juste, la délégation sénégalaise, conduite par l’adjoint au chef du protocole du Président Wade, a réussi à obtenir une concession. L’Unesco lui concède l’organisation d’une haie d’honneur, le soir de la cérémonie de remise du prix. Cependant, cette haie d’honneur se tiendra à l’intérieur-même du siège de l’Unesco lorsque le Président Wade se rendra au restaurant situé au 7e étage. Dans la foulée des informations qu’il nous a livrées, une source nous révèle qu’il est prévu, au-delà de la cérémonie de remise du prix au Président Wade, une semaine culturelle dénommée «Le Sénégal au cœur de Paris».

Pour l’heure, certains se désolent que rien, côté sénégalais, ne soit encore vraiment préparé de façon pointue. Du juste, se préoccupe-t-on, à ce niveau, de créer les conditions de noyer l’opposition. Dans cet objectif, on a même répertorié les Sénégalais fonctionnaires pour les convier à la cérémonie, des fonctionnaires qui s’interrogent sur la nature de cette invitation. Un de nos interlocuteurs signale que «l’intelligentsia ivoirienne, les Houphouëtistes notamment, se posent la question de la pertinence de l’attribution du prix Houphouët-Boigny au Président sénégalais». Surtout, au regard «des tensions que suscite ce prix-là».

COTE OFFICIEL SENEGALAIS

Un militant du Parti démocratique sénégalais (Pds), à Paris, que nous avons joint avoue ne pas être au courant de la lettre adressée à l’opposition, mais confirme la volonté exprimée par les officiels sénégalais d’organiser une haie d’honneur pour le Président Wade. En effet, il laisse entendre que «le chef de l’Etat avait souhaité une haie d’honneur de ses militants, en prévision d’une contre-manifestation de l’opposition». Toutefois, le militant du Pds confirme que l’Unesco a signifié que l’organisation d’une haie d’honneur, hors de son espace, «n’est pas de son ressort, mais de la préfecture de Paris». D’ailleurs, précise notre interlocuteur, «Me Wade a entretenu ses militants qu’il va instruire l’ambassadeur du Sénégal, Doudou Salla Diop, pour qu’il formule une demande d’autorisation auprès de la préfecture de Paris». C’est la seule condition pour qu’il puisse y avoir une animation à l’extérieur du siège de l’Unesco. Toujours est-il que cette demande d’autorisation, renseigne-t-on, n’a pas encore été introduite, car jusqu’à hier, l’ambassadeur était à Dakar où il a eu l’occasion de s’entretenir avec le Président Wade.

Du côté de la Fédération Pds de Paris, on multiplie les réunions pour finaliser l’organisation de l’accueil à réserver au Président Wade. Des sources concordantes affirment que «600 personnes sont attendues à Paris et (qu’) un avion spécial sera affrété de Dakar». Les responsables sénégalais avaient soumis une liste de personnes invitées, pour leur accès à la salle où le prix doit être remis à Me Wade. Mais, «pour des raisons de sécurité, les autorités de l’Unesco n’ont pas accédé à cette demande». Une secrétaire de l’institution a confié à notre correspondante, à Paris, que «l’Unesco a prévu d’inviter 4 000 personnes, mais elles seront munies de cartes personnalisées». Avant d’ajouter qu’il n’y a pas un protocole particulier prévu, car «tout se passera comme lors des autres remises de prix organisées par l’Unesco».

Une source proche de la Présidence au Sénégal révèle que l’opposition sénégalaise sera arrêtée à cinq kilomètres du siège de l’Unesco, toujours pour des raisons de sécurité.