PROMOTION DANS LES PARTIS POLITIQUES : Un saut d’obstacles pour les jeunes

De plus en plus des jeunes s’engagent dans les partis politiques. Mais ils buttent souvent sur plusieurs obstacles, notamment le manque de formation politique et idéologique... Un manquement que les responsables des formations politiques pourraient surmonter à travers le retour des écoles de partis.

Manque de formation politique et idéologique, absence d’éthique des aînés, trahison, transhumance, etc. Ils sont nombreux, les facteurs que nombre d’observateurs ou de responsables du terrain politique sénégalais considèrent comme des obstacles à la promotion des jeunes en politique. Ces manquements sont-ils des motifs de découragement ? Non, pense manifestement, Mme Penda Mbow, présidente du Mouvement citoyen. « Les jeunes doivent accepter d’être des porteurs de pancartes », souligne l’historienne, enseignante à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad), devant un auditoire principalement composé d’étudiants à la Fondation Konrad Adenauer (Fka). L’historienne est catégorique : les jeunes doivent s’imprégner davantage de la politique. « Ils doivent faire du bénévolat dans les partis politiques, gravir les échelons avant d’accéder à des postes de responsabilité », souligne-t-elle. Une opinion que partage Stéfan Gehrol, représentant résidant de la Fka. Il encourage l’engagement politique des jeunes pour le renforcement de la démocratie.

Manque de formation politique et idéologique

Mais cette position n’est pas partagée par tous. Cadre à la Ligue démocratique (Ld), Moussa Sarr pense qu’il faut lever les obstacles afin de favoriser une meilleure participation des jeunes dans le débat démocratique. Le responsable « jallarbiste » indexe également le comportement de certains hommes politiques. « La trahison, le mensonge, le manque d’éthique, découragent certains jeunes », indique-t-il. Mais le problème le plus saillant, selon M. Sarr, reste le manque de formation politique et idéologique. « De plus en plus les jeunes s’engagent dans les partis politiques sans pouvoir faire la distinction entre les courants idéologiques comme le Marxisme, le Libéralisme, la Social-démocratie, etc. », déplore-t-il.

Retour des écoles de partis

Et Moussa Sarr de proposer le retour des écoles de parti dans les formations politiques. Celles-ci pourraient organiser des séminaires et permettre aux jeunes de se former. Il encourage également les jeunes à lire des ouvrages classiques en politiques écrits par les penseurs marxistes ou libéraux : Engel, Karl Marx, etc. Comme lui, le responsable des jeunes de la Ld, Demba Tevette admet le manque de formation des jeunes engagés dans la politique. « Les gens sont de plus en plus formés sur le tas. Nous allons directement au charbon », souligne-t-il. Toutefois, il estime qu’il y a un minimum qu’un jeune doit savoir avant de s’engager : la ligne du parti. « Je suis à la Ligue démocratique. J’épouse ses idées en matière de démocratie, de solidarité. Si le secrétaire général du parti se détourne de cette ligne, je serais obligé de prendre mes responsabilités », souligne Demba Tevette.

Même s’ils sentent le besoin se former, les jeunes buttent souvent sur l’absence de cadres de formation. « Nous n’avons pas d’école libérale. Pour nous armer, nous allons vers l’information. Nous n’avons pas de documents qui puissent nous aider », se désole Mouhamed Ayib Daffé, porte-parole du Mouvement des élèves et étudiants libéraux (Meel). « Donner une définition claire du libéralisme n’est une chose évidente pour nous. S’il y a une école libérale ou un lieu de concertation entre les cadres et les jeunes, la situation pourrait changer », indique-t-il. Le libéral précise que des formations sont souvent organisées par des organisations internationales, mais celles-ci ne touchent pas un grand nombre. Il avoue également que ceux qui ont intégré la formation libérale avant 2000 sont mieux formés, politiquement, que les nouveaux. « Ils étaient moins nombreux et le parti avait plus de temps à leur consacrer », fait-il remarquer.

En tout cas, jusqu’aux années 1960, la jeunesse sénégalaise a joué un rôle important dans l’accession du pays à l’indépendance avec les mouvements de contestation, selon Mme Penda Mbow. « Ce qui devrait motiver les jeunes à s’engager », affirme Abdou Aziz Diop, politologue. Pour M. Diop, « c’est par la politique que la vie des jeunes est structurée », poursuit le politologue. « S’ils ne s’engagent pas on choisira à leur place » indique-t-il, précisant que les jeunes doivent tenir un discours centré sur leurs préoccupations. « S’il n’y a pas de discours autonome, il n’y aura pas d’émergence des jeunes dans la politique ». M. Diop se désole de l’adhésion des jeunes dans les partis pour simplement les massifier. Il estime que c’est une cause des « violences notées » dans ces instances.

Le politique n’est pas d’avis que la politique est un moyen de promotion sociale pour les jeunes. « Elle n’a jamais été un moyen de promotion sociale, on arrive en politique parce qu’on veut faire avancer sa société », soulignant que « la politique n’est pas un métier mais un acte de bénévolat parmi tant d’autres dans le but d’influencer les sphères de décisions dans le bon sens ».

Babacar DIONE et Angélique THIANDOUM (Stagiaire)