Récompensé pour son combat pour la parité : Aminata Mbengue Ndiaye crache sur 50 millions de Wade

Si Aminata Mbengue Ndiaye avait accepté, elle aurait eu 50 millions dans son compte bancaire pour services rendus à la promotion de la loi sur la parité et serait entrée dans le gouvernement. Mais la présidente du Mouvement des femmes socialistes a refusé cette offre du président Wade.

Qu'une personnalité influente du Sénégal qui n'a pas été tentée d'être soudoyée par le président Wade lève la main ! Elles ne devaient pas être nombreuses. En tout cas, la présidente du mouvement des femmes socialistes, Aminata Mbengue Ndiaye ne peut pas lever son index. Hier, en marge d’une conférence publique présidée par Ousmane Tanor Dieng (voir en page 7), elle a révélé à l'assistance que le président Wade a tenté de la soudoyer pour la faire entrer dans le gouvernement. Mais c'est sans compter sur la détermination de la dernière ministre socialiste de la Famille et de la Solidarité nationale. Elle a renvoyé la somme à l'envoyeur. Cette confidence est partie du fait qu’un militant du Msu, Sidy Fall, a dit n'avoir pas aimé que Mme Aminata Mbengue soutienne qu'elle était en phase avec le président Wade sur la parité. Après avoir expliqué et rappelé son engagement dans la promotion de la femme sénégalaise, la patronne des femmes socialistes lance à l'auditoire : ‘J'ai refusé 50 millions du président Wade’.

Avant de rappeler le contexte dans lequel cette offre lui a été faite. Il s'agissait, selon la présidente des femmes socialistes, d’une manière pour Wade de la récompenser dans son travail de sensibilisation dans le cadre de la préparation de la loi sur la parité et la faire entrer dans le gouvernement. ‘Après cette question sur la parité, le président Wade nous a demandé de rentrer dans son gouvernement. Je lui ai dit que je n'entre pas parce que je suis socialiste et non libérale’, explique-t-elle. Mais Abdoulaye Wade avait une proposition à lui faire. ‘Après cela, il m'a également demandé de lui donner un nom d'une femme qu'elle soit socialiste ou de la société civile, mais en lui garantissant qu'elle est compétente. Je lui ai dit : ça aussi, je ne le fais pas. Je lui ai dit de choisir au sein des femmes libérales’, rapporte le maire de Louga. Comme si cela ne suffisait pas, Wade passe à un argument supérieur qu'il utilise souvent pour venir à bout de ses proies en galère. Mais c’était sans compter sur la détermination du numéro 2 du Ps. ‘Il m'a envoyé 50 millions. Je les lui ai rendus. J'ai refusé de prendre les 50 millions. (…)’, se flatte, comme pour dire à Sidy Fall, qu'elle n'est pas une personne opportuniste qui tombe sur la première offre alléchante.

Tanor Dieng : ‘Elle mérite notre soutien et nos éloges’

A la fin de la conférence, la presse a voulu en savoir plus sur ces 50 millions de francs Cfa. Mais Aminata Mbengue Ndiaye n'a pas voulu y revenir. ‘Je n'y réponds pas. Je l'ai déjà dit. Ce n'est pas la peine d'y revenir tout le temps. Il n'y a rien de grave. J'ai décliné cette offre-là (50 millions) parce que ce n'est pas dans mes habitudes de recevoir de l'argent pour quelque chose que j'ai déjà eu à faire. (…)’, répond-elle aux insistantes questions des journalistes qui voulaient aussi en savoir davantage sur son refus d’entrer dans le gouvernement de Wade. ‘Il a dit que nous devrions faire ce qu'il faisait pour le président Diouf. Mais le président Diouf frappait à la bonne porte parce qu'il ne s'adressait pas directement aux militants de Wade pour les mettre dans le gouvernement. C'était une discussion structurée, une discussion d'hommes d'Etat qui s'instaurait pour que des membres du parti de Wade puissent accéder au gouvernement de Diouf. C'est cela qu'il doit faire avec l'opposition. D'abord, il doit respecter l'opposition, dialoguer avec elle. Peut-être qu'il y parviendra. Mais aujourd'hui, notre combat dans l'opposition, ce n'est pas d'entrer dans le gouvernement de Wade, mais c'est de tout faire pour faire partir Wade’, fait savoir le maire de Louga.

Mais pour lever tout doute sur le fait qu'elle a dit qu'elle est en ‘phase avec le président Wade sur la parité’, Aminata Mbengue Ndiaye a rappelé tout son combat pour la promotion de la femme et sa participation aux instances de prise de décision. Et cela ‘depuis 34 ans’ qu'elle est dans l'administration. C'est ce qui explique sa participation aux côtés de Wade à la sensibilisation sur la parité.‘Effectivement, j'ai dit que j'étais en phase avec le président Wade sur la parité

. Je l'ai dit, je le redis et je le répéterai partout parce que c'est mon combat. C'est un combat personnel que j'ai mené depuis 34 ans que je suis entrée dans l'administration’, martèle-t-elle. Avant de se justifier : ‘Est-ce que c'est normal à chaque fois de mobiliser les femmes, les jeunes et les laisser en rade à chaque fois qu'il faut mettre des listes pour aller aux élections ? On dit souvent que les hommes qui sont élus, ce sont les femmes qui les élisent. C'est pourquoi on s'est battu auprès du président Wade pour que la parité puisse exister.’ Pour ce combat sur la parité, ce n'est pas le combat de Wade. ‘C'était le combat du président Senghor, c'était le combat du président Abdou Diouf, c'est le combat également des femmes sénégalaises. C'est la raison pour laquelle je me suis engagée et je continuerai à le faire. Je n'ai aucun complexe à me mettre auprès de Wade. Parce que se mettre sur une décapotable avec Wade qui vous donne la parole pour parler du combat du président Senghor de 1960 à 1972 pour que le code de la famille soit accepté, parler du combat que le président Diouf a mené en 1999 en mettant en place une loi contre la pédophilie, le viol, sur la violence faites aux femmes, sur l'excision qui sont des combats beaucoup plus profonds que le combat sur la parité’, n’a rien de déshonorant pour la socialiste. Elle rappelle que la parité était aussi un ‘combat de Caroline Diop, Mantoulaye Diène, Arame Diène’. ‘Est-ce qu'il fallait laisser Wade prendre les dividendes de cette parité ? Non, ce n'était pas son combat. C'était le combat de Senghor et de Diouf. (…). Vous croyez que je vais cracher sur une loi sur la parité quelque que soit le président qui nous le propose ?’, s'agace-t-elle.

Mais la présidente des femmes socialistes n'a pas aimé que ses camarades se défaussent sur elle. ‘Heureusement que le Parti ne m'a pas indexée. Certains (de ses camarades) l'ont fait certes. Mais nous sommes en phase avec Tanor sur cette question car quand on discutait avec Wade sur la parité, on venait lui rendre compte et il était de notre côté. (…). Je continuerai à soutenir le combat des femmes. Et je le ferai avec beaucoup de courage parce que je crois que depuis l'alternance, personne n'a été plus courageux que moi au sein du Parti socialiste. Ce que je devais faire, je l'ai fait pour le parti’, s'énerve-t-elle.

Ousmane Tanor Dieng n'a pas manqué de lui apporter son soutien. ‘Nous disons toute notre confiance à Aminata Mbengue Ndiaye. Tous les partis voudront l'avoir en leur sein, mais c'est nous qui l'avons. Nous en sommes fiers, nous la félicitions, nous l'encourageons et nous l'appuyons’, déclare Ousmane Tanor Dieng sous les applaudissements, notamment des femmes présentes dans la salle. Le secrétaire général du Ps soutient que quand Aminata Mbengue Ndiaye ‘prend une décision, c'est qu'elle a bien réfléchi et le fait pour la bonne cause’. ‘Il faut reconnaître aussi que c'est une figure emblématique du combat des femmes. Là où est arrivé le combat des femmes, c'est entre autres, à cause d'elle et grâce à elle. Elle mérite notre soutien et nos éloges’, finit Tanor Dieng.