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BANLIEUE : Les Imams assimilent les sinistrés à des « morts vivants»

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BANLIEUE : Les Imams assimilent les sinistrés à des « morts vivants»

A Pikine, Guédiawaye, Thiaroye et Yeumbeul, la Korité a été célébrée dans la ferveur certes, mais pas dans l’allégresse. Tout a été sobre. La faute aux inondations qui ont empêché bon nombre de fidèles musulmans de  sacrifier au rituel des deux «rakaas». Des chemins devenus impraticables ont obligé la plupart des fidèles à faire de longs détours à défaut de s’adonner à un exercice d’équilibrisme pour emprunter des voies de fortune faîtes de pierres et de pneus. Beaucoup de lieux de culte, encore pris en otage par les eaux pluviales, n’ont pu pas accueillir les fidèles. Ailleurs comme à Thiaroye,  il a fallu remblayer avec du sable une partie d’un vaste espace pour permettre à l’Imam et aux fidèles de prier. Très attendus, les sermons des Imams n’ont pas manqué de relayer les difficultés dans lesquelles se débattent les populations des quartiers inondés de la banlieue. Du haut de leur chaire, les Imams ont interpellé l’Etat sur «les inondations, les récurrents délestages qui ont pour corolaires l’insécurité des populations, l’interdiction de la mendicité qui réduit les talibés et les maîtres coraniques à des citoyens de seconde zone». Un cocktail jugé explosif par les Imams et qui, si l’on n’y prend garde, risque de déclencher des  «troubles permanents» dans toute la banlieue.

«L’Etat peut et doit bel et bien trouver une solution définitive au problème des inondations. L’Etat a les moyens et c’est à la limite frustrant de voir tout cet argent régulièrement gaspillé par les autorités au moment où les populations, notamment celles de la banlieue, souffrent», s’est désolé Imam Abdou Khoudoss Diop qui a dirigé la prière de l’Aïd El Fitr à la mosquée «Serigne Fallou» de Thiaroye.

Le ton plus tranché, Imam El hadji Sakho Mandianckho qui a dirigé la prière au quartier Darou Salam 5 de Yeumbeul-Nord a servi un démenti aux autorités en révélant qu’une bonne partie des 54 quartiers de la commune de Yeumbeul-Nord est toujours prise en otage par les eaux stagnantes, contrairement aux assurances de Becaye Diop, «ex-ministre de l’Intérieur», qui avait, au début de l’opération de pompage des eaux, assuré les populations qu’elles allaient bientôt regagné leur maison. Hélas, c’est toujours le statu quo pour les populations sinistrées que Imam Sakho, au cours de son sermon, assimile désormais à des «morts-vivants».

«Chassés de leur maison par les eaux pluviales, ils n’ont pas non plus les moyens de payer le loyer. Ceux parmi eux qui ont des ateliers de menuiserie, de confection… ne peuvent plus travailler, faute d’électricité. Comment peuvent-ils alors nourrir leur famille ou payer la scolarité de leurs enfants ? Il ne peut plus leur arriver quelque chose de pire, voila pourquoi je dis que nous tous, des quartiers inondés, sommes des morts-vivants», a martelé Imam Sakho qui estime «qu’au même titre que les élèves, les talibés régulièrement inscrits dans des daraas reconnus doivent bénéficier du budget de l’Etat».

Sur la mendicité, les Imams ont également fait un tir groupé sur la décision du gouvernement de l’interdire. «Tout musulman, dans le besoin, peut solliciter l’aide de son prochain. Je déplore que la mesure d’interdiction qui frappe la mendicité au Sénégal soit dictée par des bailleurs. C’est une atteinte à notre souveraineté nationale. Nous devons rester dignes face aux bailleurs et toujours préserver notre identité», dira Imam Abdou Khoudoss Diop, au moment où son collègue Sakho de Yeumbeul plaide la cause des écoles coraniques. «Le gouvernement affirme qu’il alloue 40% du budget à l’Education nationale. Où est la part affectée à l’éducation islamique», s’interroge Imam Sakho.

Pour autant, il n’est pas question pour les Imams Sakho et Diop de cautionner l’exploitation des talibés dans certains Daraas. «La mendicité est tolérée par l’Islam, c’est la forme qui est blâmable. J’ai toujours mal quand je vois dans la rue des talibés en haillons s’accrocher aux habits d’un adulte pour réclamer l’aumône», a fait remarquer Imam Abdou Khoudoss Diop.



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