Moustapha Diallo vient juste d’être déposé à la frontière avec une bande d’amis, tous des Guinéens comme lui. Il est 20 h et ils informent n’avoir rien mangé depuis le matin. La fatigue se lit sur ces visages inquiets. ‘C’est tôt le matin que des policiers nous ont réveillés dans la violence. Sans même nous laisser le temps de prendre quelques bagages, ils nous ont entassés dans des bus pour nous expulser de la Gambie. C’est inhumain de traiter ainsi son frère africain’, lance Amadou Diallo. A tour de rôle, chacun a voulu s’accaparer du micro pour tailler une camisole de honte aux responsables de leur désarroi.
Ces expulsés restent tout de même convaincus de leur retour en Gambie et s’activent déjà pour repartir dans la soirée. ‘Nous trouverons les moyens de repartir aujourd’hui même, cette frontière n’est pas très bien gardée de toute façon. Ce n’est plus pour rester dans ce pays mais juste pour récupérer nos affaires et rentrer chez nous ou venir vivre ici au Sénégal’, confie Thierno, teint noir, taille moyenne, jacket jeans sur l’épaule. Ce jeune homme de 20 ans avoue être en Gambie depuis trois années. Coiffeur de son état, ses affaires ne marchent plus. Voilà pourquoi il lui a été impossible de payer sa carte de résidence cette année. Expulsé, arraché à ce qui semblait être pour lui son unique avenir, Thierno a le visage hagard. Soudain, comme pris par une vive colère, il lance : ’Je pars tout de suite récupérer mes bagages et venir m’installer ici.’
Comme lui, plusieurs expulsés préfèrent élire domicile à Karang. Une option qui expose souvent les populations de cette petite commune à des dangers réels. A Karang les braquages de boutiques, vols de scooters, agressions humaines sont devenus fréquents. L’édile de la ville, Ousmane Sène, s’interroge sur cette pratique qui a fini selon lui d’exposer Karang à une insécurité chronique : ‘Ce phénomène existe depuis plusieurs années et l’on s’est toujours demandé s’il existait un compromis entre les deux Etats. Quoi qu’il en soit, ce phénomène porte une atteinte grave à la sécurité de notre commune. Les autorités administratives et policières rencontrées ne nous ont rien dit de plausible. Maintenant, nous allons agir à notre niveau’.
Dans cette entreprise, le maire de la ville ne sera pas seul puisqu’il pourra compter sur une population plus que jamais décidée à en découdre avec ce qu’elle appelle ‘un danger permanent’.
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